En prolongement du précèdent billet, j'ai pensé qu'un deuxième ouvrage sorti des presses de Louis Jou ferait une bonne suite. Et comme il fallait un peu se démarquer du livre de Gongora, voici donc un exemplaire avec une suite… [deux suites de gravures dans le cas présent !]
Mais à quoi peuvent donc servir ces "suites" me direz-vous ?
Une suite est un tirage spécial des gravures d'un ouvrage, souvent imprimées sur un papier de qualité différente, et insérées dans certains exemplaires de luxe de cet ouvrage. C'est le cas pour le livre proposé ici. Notre ouvrage est sur papier de Rives (Rives sur Fure est une commune française, située dans le département de l'Isère). Les deux suites sont sur papier Japon et Chine (deux petits pays du soleil levant) ; papiers rares, fragiles et chers qui présentent la particularité de donner d'excellents résultats lors de l'impression. II peut aussi s'agir d'épreuves d'états ; dans ce cas la suite devient un document des plus intéressants sur l'évolution de l’œuvre gravée.
Ces suites sont souvent présentées en début d'ouvrage. Elles sont libres. Le nombre de gravures présentes est indiqué dans la justification en début d'ouvrage. Elles peuvent aussi être absentes car facilement utilisées pour des encadrements... Les avoir dans un ouvrage est donc le fruit d'un heureux hasard si le propriétaire n'est pas au courant de l'existence et de "l'utilité" d'une suite. C'est la preuve que l'ouvrage est resté entre les mains d'un bibliophile dans le cas contraire.
Enfin… de "l'utilité", n'exagérons quand même pas trop! Disons que cela donne une plus-value légitime à l'ouvrage puisque le lecteur peut, à loisir, s'extasier devant la qualité des illustrations de son livre. De plus cette, ou ces suites, sont un gage de personnalisation de l'ouvrage pour l'acquéreur, à l'égal d'un autographe ou d'une reliure signée. Plaisir de bibliophile, dirons-nous ! Je vous présente aujourd'hui un ouvrage à la vente, imprimé en petit nombre en 1922, à Paris, pour Mornay éditeur. Les photographies parlent d'elles-mêmes. On aime (ou on n'aime pas) le style mais il est évident que l'ouvrage est une œuvre d'artiste sinon une œuvre d'art. Comment ces deux suites sont-elles arrivées dans cet exemplaire dont la justification ne mentionne pas la présence ? Elles ont pu être achetées à part. Elles ont pu, aussi, être dérobées à des exemplaires prestigieux, au nez et à la barbe de libraires confiants et malheureux de l'être…. Pierre
1922: Le Carton aux Estampes, G. & A. Mornay, libraires, La Collection Originale, illustrations de Louis Jou, dont 1 ex. vieux japon à la forme (n°1), 40 ex. japon impérial avec suite sur chine (n° 2-41), 100 ex. hollande van Gelder avec suite sur japon (n° 42-141) et 849 ex. vélin de rives à la forme (n° 142-990) + 90 ex. HC dont 9 japon, 25 hollande et 56 rives; réédité en 1943 chez Albin Michel dont 3 ex. papier du japon (n° A-C), 25 ex. vergé d'archives (n° I-XXV), 50 ex. vélin de rives (n° XXVI-LXXV) et 200 ex. alfa mousse navarre (n° 1-200).
T'SERSTEVENS – JOU. Le carton aux estampes. Paris, Mornay éditeur, 1922. Ouvrage édité dans la "Collection Originale" n° 2. Broché, couverture saumon rempliée, [3 ff n ch], 182 pp. Format In-8, frontispice et 19 gravures sur bois à pleine page, nombreux bandeaux et culs-de-lampe en noir, lettrines tirées en deux tons. Edition Originale. Exemplaire n° 691 / 1080, un des 905 sur vélin de Rives à la forme (4ème papier après 1 sur vieux Japon, 40 sur Japon impérial et 100 sur Hollande Van Gelder). S'adossent à l'exemplaire deux suites de gravures sous couverture reproduisant la page de titre. Pas de rousseurs. Dos frotté aux coiffes. Emboîtage amateur postérieur. Bon exemplaire. Vendu
3 commentaires:
Encore Louis Jou ! vous n'avez pas peur de lasser, à force ?
Les admirateurs de ce monsieur doivent former une secte bien puissante.
Je suis fidèle en beauté... Et pour promouvoir ce génial artiste typographe et graveur, vous remarquerez que je n'hésite pas à présenter des ouvrages déjà vendus.
Où la passion va se nicher ! Pierre
Non ! on ne se lasse pas de Jou. Par ailleurs il arrive de temps en temps que dans les éditions de luxe des suites soient ajoutées à un exemplaire sans que cela soit noté dans la justification. Cela ne vient pas forcément d'un larcin mais d'un ajout à un exemplaire ordinaire appartenant, par exemple, à un ami de l'artiste, ce dernier lui ayant fait ce cadeau. J'en ai plusieurs exemples.
Patrick C.
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