jeudi 31 janvier 2013

C'est mieux si on habite Chalon sur Saône, n'est-ce pas…


Vous ai-je dit qu'un libraire ne choisissait pas toujours l'ensemble des ouvrages qu'il achetait ? Voilà bien la grande différence entre le lecteur, l'amateur de livres anciens et le boutiquier. Il n'empêche qu'étant, par nature et par vocation, passeur de livre, un professionnel ne doit pas laisser passer un lot qui lui semble digne d'intérêt. C'est ainsi que je vous propose, aujourd'hui, quelques ouvrages sur Chalon sur Saône et sa région. Il y a ceux qui vont espérer trouver la perle rare dans ce petit lot, ceux qui vont cliquer rageusement sur la touche èsképe et ceux qui vont attendre patiemment que je me lasse de cette incursion régionaliste en territoire étranger ;-))


Chalon-sur-Saône est, aujourd'hui, une ville moyenne de 57 000 habitants qui, dans la hiérarchie urbaine, se situe entre Lyon et Dijon. Pourtant, Chalon a gardé son identité propre et a su conserver son rôle de capitale économique du département. Située en un point où l'île Saint Laurent facilite le passage de la rivière Saône, elle a eu de tout temps une vocation commerciale et représente, aujourd'hui comme dans le passé, un axe de communication important.


Ville celte à ses débuts, base navale romaine dans l'Antiquité, lieu de foires importantes au Moyen Âge, centre de négoce aux temps modernes et à l'époque contemporaine, Chalon est classée "ville d'arts et d'histoire". Son centre ville regorge de maisons à colombage, témoignages de son rôle important au Moyen Age. De plus, le pont Saint-Laurent, construit par les Romains, montre bien l'intérêt stratégique de la ville pour les troupes romaines.


Au Moyen Age, Chalon-sur-Saône, ville épiscopale d’origine antique se développe autour de la cathédrale Saint-Vincent, de son évêché et du Châtelet, palais fortifié construit au milieu du VIe siècle. A quelques lieues de là, Cluny va devenir le centre du plus important ordre monastique du Moyen-âge, rayonnant sur toute l'Europe. Une première période faste s’achève en 1100 avec l’acquisition du Châtelet par Hugues II, duc de Bourgogne, prélude à celle du comté tout entier par Hugues IV en 1237. A l’intérieur des remparts, l’évêque et le seigneur se partagent la ville. En 1237, en fondant les foires ducales, Hugues IV pose les bases pour l’émergence du pouvoir urbain. Siège d'un évêché jusqu'à la Révolution, d'un comté jusqu'à son rattachement au domaine des ducs de Bourgogne au XIIIe siècle, et d'un bailliage très étendu sous l'Ancien Régime, elle n'est pas devenue en 1790 le chef-lieu du département de Saône-et-Loire, mais en reste encore la ville la plus importante… Pierre


1 - DICKSON Marcel et Christiane. Les Églises romanes de l'ancien diocèse de Chalon. Cluny et sa région. Mâcon, Protat 1935, in-4 de X-360 pp. et 18 H.T. dont plan de St Vincent de Chalon, dépliant; plan de Mont St. Vincent, plan de St. Philibert de Tournus et coupe de l'abbaye de Tournus, sur double page; une carte dépliante in-fine et 13 photogravures, à pleine page. Très nombreuses ill. dans le texte (72 plans et 138 photogravures). Étude développée en deux parties : caractères généraux et monographies, dans l'ordre alphabétique des localités, de 68 églises (Inventaire de Bourgogne). Rare volume. Vendu


2 - BRUEL (François-Louis). Cluni. Album historique et archéologique, précédé d'une étude résumée et d'une notice des planches. Mâcon, Frères Protat, 1910. In-4, broché, 34 planches à pleine page dont dépliantes, 56 pp. Ouvrage publié à l'occasion du millénaire de Cluni. Tiré à petit nombre. 80 € + port
3 - BLANC (Georges) et LAFILLE (Pierre). Saône et Loire. Histoire et géographie régionales. Tome I et II. Macon, Buguet-Comptour, 1943. Les deux volumes : 26 € + port
4 - SUHARD-MARECHAL ( Marie-Thérèse). De Campo ferreolo à Champforgueil. Mémoire de la Société d'histoire et d'archéologie de Chalon sur Saône, tome 57,1989. 13 € + port


5 - CHENU (Pierre). Ferronneries chalonnaises. Edité en 1977 par la Société d'histoire et d'archéologie de Chalon sur Saône. 13 € + port
6 - CHENU (Pierre). Notre vieux Chalon. XVIIIeme siècle. Edité en 1980 par la Société d'histoire et d'archéologie de Chalon sur Saône. 13 € + port
7 - CHENU (Pierre). Chalon sur Saone. Anciennes tourelles-escaliers. Edité en 1977 par la Société d'histoire et d'archéologie de Chalon sur Saône. 13 € + port


8 - ARMAND-CALLIAT (L). L'Hôpital de Chalon sur Saône et ses anciens objets d'art. Chalon sur Saône, 1965. 12 € + port
9 - GUIDE (Philibert). La colombière et autres poèmes. Avant propos de Dominique Perben. Société d'histoire et d'archéologie de Chalon sur Saône, 1986. Réédition de l'original. 9 € + port


10 - COLLECTIF. Les inondations à Chalon sur Saône et dans sa région. Janvier 1955. Plaquette in-8 à l'italienne non paginée. Texte et photos. 10 € + port
11 - RECUEIL factice de 20 cartes postales anciennes. Chalon sur Saône, ville sinistrée. 20 vues visions de guerre. Sd [1945]. 17 € + port

mercredi 30 janvier 2013

Décompressez avec César ! Une rétrospective de ses œuvres en 1976.


C'est au cours de ma visite de Marseille, ce samedi, que j'ai découvert qu'un de ses enfants allait bientôt être au coeur d'une exposition retraçant sa carrière. Je reprends, pour cela, un article écrit en 2010 par Pierre Rammah. Nul n’est prophète en son pays, dit-il !  


César Baldaccini,  le déroutant sculpteur de métaux, ferait-il partie de ses enfants du pays dont Marseille honore mal la mémoire. Il est pourtant né ici, en 1921 dans le quartier populaire de la Friche de la belle de Mai.  Il y commence même sa carrière. Sur les conseils d’un voyageur de commerce qui remarque ses dessins, sa mère décide de sa destinée  en l’inscrivant à quinze ans, aux Beaux-Arts de Marseille. C’est là que son parcours artistique commence, ne cessant de croitre jusqu’à atteindre une renommée internationale. Ses oeuvres ont été exposées de par le monde entier, de la Tate Gallery à Londres, au MoMa de New-York. En 2008, la fondation Cartier à Paris lui consacre une exposition dont l’installation est confiée à Jean Nouvel.  Chaque année le cinéma français récompense ses talents avec une figurine que " César " a conçu et qui porte son nom.


Et Marseille dans tous ça? A part la statue du pouce géant, posée sur un rond point, il n’y a rien ou pas grand-chose. Pourtant César était attaché à Marseille. Il avait même légué à la ville 186 œuvres majeures, dont 60 compressions, d’une valeur estimée à 183 millions de francs (le cours des oeuvres d'art étant fluctuant, quelle serait la valeur de cet ensemble, aujourd'hui ?), à condition qu’un musée spécifique fut construit au plus tard pour fin 1997… N’ayant pas trouvé d’accord, la municipalité va donc lui rendre ce qui lui appartient.

La ville a-t-elle raté sa chance ? 17 œuvres majeures ont été léguées à la Municipalité à la mort de l’artiste. Si ces 17 pièces étaient exposées de manière permanente, la cité pourrait déterminer, en fonction de l'affluence, si la postérité lui accordera la renommée ou si, comme quelques grands artistes incontournables de leur vivant, elle le rangera au banc des grands oubliés de l'histoire de l'art.


Avec Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture, le projet pourrait être porteur et réhabiliterait également la mémoire de l’artiste. Les manifestations populaires (lumière-bruit-spectacle) qui ont accompagné les débuts de cette manifestation ne semblent pas avant-coureurs d'une telle orientation… Et puis, qui a dit que l'art était populaire ?


Un autre problème, bien plus important, semble poindre avec le temps qui passe pour ces œuvres d'avant-garde. Leur conservation dans le temps. Beaucoup de produits synthétiques, comme certains plastiques utilisés par notre sculpteur, n'ont pas été élaborés pour défier le temps. On est loin de l'espérance de vie du papier chiffon, voyez-vous !  Pierre


CESAR (Baldaccini César). César, rétrospective des sculptures. Catalogue d'exposition itinérante (Genève, Grenoble, Knokke, Rotterdam, Paris), 1976. In-4 carré (250 / 210 mm ) de 130 pages + 74 reproductions d'oeuvres hors-texte, biographie, expositions, bibliographie, broché par 2 vis de reliure sous couverture illustrée. Ouvrage imprimé sur papier recyclé gris, important cahier central de reproductions photographiques des oeuvres de l'artiste. Nombreuses photographies et documents dans le texte. Catalogue de l'exposition au Musée d'art et d'histoire de Genève fevrier - avril 1976, au Musée de peinture et de sculpture de Grenoble avril - mai1976, au casino de Knokke mai - septembre 1976, au Museum Boymans-van Beuningen de Rotterdam septembre - novembre 1976 et au Musée d'art moderne de la ville de Paris novembre 1976 - janvier 1977. Texte en français et en néerlandais, tirage limité à 7000 exemplaires. Bel état. Vendu

mardi 29 janvier 2013

Le Mont Cervin Par Guido Rey. Accessible...



- Avez-vous des lithographies de la moitié du 19eme siècle représentant le Matterhorn ?
- Non, mais j'en ai représentant le Cervin…

C'est à peu près le dialogue qui s'est établi, il y a quelques temps, entre un client et moi. J'ai découvert à cette occasion que les deux sommets ne faisaient qu'un et que j'étais d'une incompétence notoire en géographie régionale, car après tout, le Mont Cervin, c'est quand même pas l'Everest !


Je me rattrape donc aujourd'hui en vous proposant un petit ouvrage sur ce Mont Cervin, pas trop fréquent, écrit au tout début du 20eme siècle. L'auteur, Guido Rey (1861-1935), est un célèbre alpiniste italien connu pour avoir réussi la première ascension du Cervin par la crête de la Furggen. Certains puristes lui reprocheront néanmoins d'avoir utilisé, pour un passage difficile, une longue échelle lui permettant d'escamoter le danger…


Je fais partie des quelques personnes que l'ascension en montagne terrorise. Sans doute le fait d'avoir découvert tardivement la neige pour mon voyage de noce ! Ma fille pratique l'alpinisme en Amérique du sud (Mexique et Argentine dont L'Aconcagua) et j'en tire plus d'inquiétude que de fierté...


Donc, Guido Rey nous relate l'histoire de cette ascension et nous fait découvrir la beauté des cimes... L'ouvrage est illustré de 16 clichés qui dénotent un réel don de photographe chez notre auteur. On lui devra ensuite, dans ce domaine, de forts jolis clichés de femmes qui lui assureront une renommée internationale. Où l'on constate que la femme reste, parfois, un sommet inaccessible… Pierre


REY (Guido). Le Mont Cervin. Paris, Hachette et Cie, 1905. Un volume in-8 broché. Ouvrage traduit de l'italien par Mme L. Espinasse-Mongenet. Avant-propos de E. Pouvillon. Préface de E. de Amicis. Ouvrage illustré de 16 gravures. (2)-xv-410 pp.-(1). Édition originale en français. Pages un peu jaunies. Vendu

lundi 28 janvier 2013

Des Baux à la mer : Maurice Druon chez Louis Jou...


Ce samedi matin, je suis parti Des Baux à la mer pour voir un bon ami, Bernard Avella, libraire d'ouvrages anciens – Liber, 26 Boulevard Notre-Dame - à Marseille. Il organise, avec la Fondation Louis Jou, une exposition sur L'artiste du livre du 9 au 15 mars 2013 e t m'a demandé d'amener quelques ouvrages pour garnir ses vitrines. Je ne suis pas certain qu'il ait vraiment besoin de mes modestes compétences mais c'est un confrère qui sait entretenir l'amitié…

Après être monté jusqu'à la Bonne mère – La Basilique Notre-Dame de la Garde - avec mon épouse,  nous sommes donc descendus chez Bernard qui organisait, heureux hasard, un petit apéritif entre amis à la boutique. Pas eu trop le temps de regarder sur ses rayonnages car la bande des copains arrivait, elle aussi en procession !  Quel endroit sympathique ! Je vous en reparlerai. L'ambiance me rappelle celle que l'on trouvait chez quelques avenants libraires du bon vieux temps (et je pense ici à la boutique du 5 rue Charlemagne à Paris ; il y en a qui connaissent ?)


Je profite bassement de cette occasion pour vous présenter un ouvrage intitulé Des Baux à la mer, écrit par Maurice Druon et illustré, bien évidemment par Louis Jou. Édité en 1972, il a la particularité d'avoir été imprimé après son décès en 1968.


C'est grâce au dynamisme des proches de Louis Jou que nous devons cet exemplaire. Le matériel de notre grand typographe et graveur ayant été conservé, cet ouvrage sort donc de l'atelier des Baux de Provence, les gravures ayant été choisies dans l'ensemble des bois à disposition dans le local, les caractères et la présentation sont ceux que Louis Jou utilisaient et c'est un papier à la forme comme ceux dont se servait l'artiste qui a été sélectionné. Fidèle à la tradition de la maison, nous avons ici affaire à un très petit tirage limité à 115 exemplaires, celui que je propose étant nominatif (n°13). Il est parfois confondu avec le même texte de Druon, édité par les Heures Claires à 1000 exemplaires, à la même époque, avec des dessins de Thuilier, célèbre restaurateur du petit village provençal.


" Nous parcourions, à l'entour des Baux-de-Provence, le pays baussenc où de tout temps se sont succédé les poètes occitans.  En quête d'un mas,  tomba-t-il en ruine, qui convint à nos ressources pécuniaires, nous nous étions assuré l'aide  d'un autochtone fringant, excellent, selon les ouï-dire et autres on-dit, aux affaires extravagantes, tels le drainage des résurgences dans les zones aquifères et l'asepsie des entreprises séricicoles. Nous croyions en l'effet convaincant de son esbroufe et de son bagou pour le cas où nous louerions un gîte et conclurions un bail emphytéotique.
Le quidam nous mena, de cimes en thalwegs, jusque dans un vallonnement, au diable vauvert, où naguère il avait chassé à vau-vent, et où croissaient yeuses, myrtes et cytises, et des cistes agrippés au roc schisteux, et même un marronnier d'Inde aux thyrses violacés ou amarante.
Un bâtiment décrépi s'élevait sur un terre-plein jonché de tuileaux rose pâle et de faîtières ébréchées.  Une vieille catarrheuse sans appas mais non sans acné, portant besicles, sarrau dégrafé et socques cloutés, entrebâilla l'huis, et nous invita, d'un sourire auquel manquaient trois dents, à pénétrer dans une salle tout abîmée communiquant de plain-pied avec des absidioles décorées d'haltères noirs, pendus là comme des ex-voto.
Dans l'office contiguë, la malpeignée nourrissait une chèvre bréhaigne, deux agneaux nouveau-nés couchés sur des bat-flanc, un jars, un verrat et quelques canards d'Inde.

Cette métairie, nous expliqua-t-elle d'une voix tout heureuse, date des époques mêmes des schismes ariens.  Je la tiens de feu ma trisaïeule la diaconesse,  qui s'en était arrogé les droits en avance d'hoirie.  Je me suis constitué une retraite par la cession sous seing privé de la nue-propriété: un bailleur de fonds, ancien quincaillier du bailliage, est depuis quelque temps mon débirentier.

- Au temps pour moi, dit notre gardian, les yeux dessillés sur-le-champ.

Contrecarrés par le plus de contretemps et contre- ordres possibles, nous quittâmes ce repaire de cathares."  Maurice Druon

Texte piégeux… J'ai vérifié l'orthographe. Tout est bon  ;-)) Pierre


DRUON (Maurice). Des Baux à la mer. Les Baux de Provence, Atelier de Louis Jou, 1972. Un volume in-4 en feuillet et couverture rempliée illustrée. Ouvrage illustré de bois gravés de Louis Jou, composé avec ses caractères et imprimé sur ses presses à bois a été tiré à 115 exemplaires ainsi justifiés. 10 exemplaires sur papier au filigrane de L.J numérotés de 1 à 10, 90 exemplaires sur vergé des moulins du Val de Laga numérotés de 11 à 100 plus 15 exemplaires hors commerce. Cet exemplaire n°13 est nominatif. Bel état. 175 € + port

samedi 26 janvier 2013

Denis Diderot : Est-il bon ? Est-il méchant ?


Il y a chez Diderot un goût singulier pour la mystification, qu'il appelait de la perversité et qu'il garda jusqu'à la fin de sa vie. Sa mort elle-même fut une mystification posthume ; il fut autopsié, à sa demande… Jeune, Denis Diderot (1713-1784) se crut une vocation religieuse. Il en joua jusqu'à en persuader sa voisine d'étage, Madame Champion, pour capter l'attention de la bonne dame et séduire sa fille qui devint effectivement Madame Diderot. De nombreux points de sa biographie restent cependant obscurs. De sa jeunesse bohémienne, il nous laisse un trou de dix ans où brillent quelques lueurs incertaines, quelques vagues anecdotes à la Murger… Le plus grave est que nous ignorons tout de la crise intellectuelle qu'il traversa pour aboutir au scepticisme et à l'incroyance.


Il fréquentait beaucoup les cafés, principalement le Procope, sur la rive gauche, devant la comédie française et le café de la Régence devant le Palais royal. Il se lia avec Le Sage, Rameau et bien d'autres compositeurs mais la rencontre la plus marquante qu'il fit fut celle de J.J Rousseau qui essayait, à cette époque, de faire adopter son nouveau système de notation musicale.


Voici donc nos deux compères devenus amis (leurs femmes aussi). Diderot travaillait à des traductions pour des libraires pendant que Rousseau paradait près des grands de ce monde. Un jour, le libraire Le Breton lui proposa d'adapter en français l'encyclopédie anglaise de Chambers. Il eut alors l'idée de faire éditer la sienne. L'encyclopédie était née ! Évoquons maintenant la douloureuse gestation.

Il se mit à recruter des collaborateurs : Rousseau pour la musique, D'Alembert pour la partie scientifique, Buffon, etc… Cette bataille, car il faut utiliser le mot de bataille, dura plus de vingt ans et les difficultés ne vinrent pas toujours de l'extérieur ; les philosophes au siècle des lumières étaient prudents avec le pouvoir, malgré tout. Les écrits qui font maintenant sa gloire ne furent, d’ailleurs, jamais imprimés de son vivant sous son propre nom !


L'Encyclopédie tour à tour poursuivie et tolérée parut grâce à la persévérance de Diderot et à l'appui de Malesherbes, directeur de la librairie du roi qui partageait ses idées et les couvrait. Plus sympathique que le sec Voltaire, moins farouche que Rousseau, Diderot avait ce côté humain qui le rendait agréable aux gens de son époque et qui font qu'on le lit encore aujourd'hui avec plaisir.


On va me dire que Diderot fut volage et que sa correspondance avec Madame Volland prouve qu'il n'était pas infaillible. A sa décharge, je répondrai en disant que sa femme avait, de notoriété, fort mauvais caractère et qu'il avait des scrupules. Il en sera pour cela pardonné… Pierre

DIDEROT Denis. Œuvres complètes de Denis Diderot. A Paris, Chez A. Belin, Imprimeur-Libraire, 1818-1819. 6 volumes in-8, relies, demi percaline vert olive et papier coloré, dos lisses avec motif, pièce de titre et tomaisons en maroquin cerise. Œuvres en partie originale, elles contiennent  plusieurs textes inédits : Voyage e Hollande, Salon de 1761, 5 dernières lettres du salon de 1759, 3 dialogues, Mon père et moi, fragments politiques… 754, 736, 795, 751, 678, 525, avec in fine du premier volume, 2 grandes planches dépliantes, dont une de figures géométriques et en début du volume second, une planche dépliante intitulée "Système Figure des Connaissances Humaines". Coins légèrement frottés, les coiffes sont toutes intactes ainsi que les mors. Des rousseurs claires irrégulières. L'ensemble est de belle qualité. Reliure en bon état. 200 € + port

vendredi 25 janvier 2013

Une ordonnance avec les mots de Jean de La Fontaine et les dessins de Joseph Hémard…



Une belle tradition a fait du médecin, pendant longtemps, un homme de culture à l'égal du curé, de l'avocat et du notaire. Quand les progrès de la mécanisation créèrent l'industrie pharmaceutique, c'est donc tout naturellement que celle-ci eu l'idée d'inciter le corps médical à utiliser ses produits par des petits cadeaux pour bibliophiles

Aujourd'hui, une telle incitation commerciale est interdite et c'est le plus grand des hasards qui fait que les réunions de formation professionnelle se font maintenant à proximité de restaurants étoilés ou sur des bateaux de croisière à destination du tropique du cancer de la peau…

Je vous propose, ici, une charmante édition imprimée en 1937 pour les laboratoires Bouillet. Il s'agit des fables de la Fontaine illustrées par Joseph Hémard, déjà présenté sur le blog (on clique). Les médecins d'alors recevaient les feuillets par livraison et les plus méthodiques d'entre eux les classaient afin, qu'en dernier lieu, ils les fassent relier.

Je vous propose, ici, un exemplaire complet en feuillets sous cartonnage remplié formant étui. C'est agréable à lire, bien présenté, joliment illustré et peut satisfaire le collectionneurs d'éditions de La Fontaine - j'ai bien peur que l'entreprise ne soit démesurée – ou l'amateur de dessins de Joseph Hémard.


Habité par le langage, Jean de La Fontaine a passé une grande partie de son existence à faire circuler, sous forme de mots rimés, des phrases en dévidant le fil d'un discours immuable : Pour être aimé, pour nous défendre, pour blesser ou pour avoir simplement le sentiment d'être, l'homme doit relater sa vie avec un faux détachement, avec un dilettantisme de façade. Son expérience, il la mettra au service des autres. De nombreux écrivains feront de même. Certains, comme notre fabuliste, auront la chance d'être entendus, la grande majorité des autres se contenteront d'un succès d'estime ou de l'expression de la plus grande indifférence de leurs lecteurs. C'est ainsi*… Pierre


* il y a des jours où je suis capable de pondre de grandes tirades creuses simplement pour la mélodie des mots...


LA FONTAINE. Quarante cinq fables illustrées par Joseph Hémard. Roger Dacosta éditeur mai 1937 pour les laboratoires Bouillet. Un volume petit in 4 en feuillets sous couverture rempliée. 66 pages, 44 bandeaux, la plupart en couleurs, 9 culs de lampe de Joseph Hémard. Très bel état. Vendu

jeudi 24 janvier 2013

L'inquisition des temps modernes...


Bon ! C'est vrai que je suis plutôt spécialisé dans les écrivains morts mais je peux faire une exception de temps en temps… Celui-ci n'est pas vraiment écrivain, d'ailleurs, mais sa plume me plait et j'ai toujours du plaisir a lire ses billets sur Les Rogaton Bleus, blog que j'ai mis parmi mes favoris avec les sites bibliophiles que vous connaissez déjà. Je reproduis un de ses derniers textes qui m'a fait sourire tant la fin m'a surpris et amusé à la fois ; où la façon de dire des choses vaches avec élégance… Merci, Jean-Michel, et merci aussi pour la gentillesse et la pertinence de vos commentaires sur le blog tout au long de l'année. Pierre


Au mois de juillet 1209, les soldats de l’Eglise massacrèrent dit-on sept mille personnes dans l’église Marie-Madeleine de Béziers au nom de l’éradication des hérétiques. Le légat Arnaud, représentant du pape, lorsqu’il lui fut demandé s’il fallait épargner les catholiques orthodoxes, aurait eu cette phrase devenue célèbre : « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens ! ». Cette phrase est apocryphe, on en est maintenant quasiment certain, mais elle révèle tant l’esprit de la lutte de cette époque qu’on l’a gardée, époque où l’hérésie épouvantait tant qu’il était parfaitement admis par tous que mieux valait sacrifier dix innocents que laisser échapper un hérétique.


Mais il y a pire : L’Inquisition mise en place par la suite et dont la préoccupation légale était le seul salut des âmes se servit d’une arme autrement plus efficace et plus délétère que l’éblouissement des martyrs, ce fut la confiscation des biens. Toute personne suspectée étant présumée coupable, ses biens étaient immédiatement confisqués, bien avant que le jugement fut rendu. D’ailleurs celui-ci pouvait durer des dizaines d’années.

Mais il y a pire : Cette confiscation ne concernait pas seulement l’hérétique supposé, mais ses enfants et petits-enfants, tous jetés à la rue sans un denier vaillant et exempts de toute compassion de la part de leurs semblables puisque leur en témoigner aurait rendu ipso facto hérétiques ceux qui s’y seraient laissé aller.


Mais il y a pire : Les dettes qu’avait pu contracter le suspect étaient éteintes car un hérétique perdait tous ses droits, notamment celui d’avoir pu conclure un quelconque contrat, ce qui évitait aux personnes bénéficiant de ces confiscations d’avoir à prendre en compte les créanciers, mais ne les empêchait pas de réclamer immédiatement les sommes dues par les débiteurs.

Mais il y a pire : Toutes les ventes dont avait bénéficié le suspect, meubles comme immeubles, rentraient dans le lot de confiscation, et même si une maison par exemple avait passé ensuite par plusieurs mains, le fait qu’un jour un hérétique l’eut possédée l’avait entachée à jamais et elle devait être restituée sans aucune indemnité à espérer pour celui qui, de bonne foi, l'avait acquise.

Mais il y a pire : Lorsque des procès étaient intentés contre des morts leurs ossements étaient déterrés, puis brûlés sur le bûcher, forcément brûlés puisque l’accusé ne pouvait plus se défendre (d’ailleurs la défense était interdite, sinon de droit au moins de fait puisque quiconque se posait en défenseur d’un hérétique, témoin, avocat, notaire, était soupçonné d’hérésie), et les biens de ces personnes mortes étaient confisqués, biens dont croyaient pouvoir jouir les héritiers.


Mais il y a pire : Les orphelins de parents strictement orthodoxes mais dont la tutelle légale revenait à un oncle soupçonné par la suite d’hérésie se voyaient spoliés de leurs avoirs.



Mais il y a pire : Une invention moderne et vraiment diabolique, six lettres que nul ne peut prononcer sans que sa voix ne tremble, un sigle symbole de l’effroi : URSSAF. Cet organisme muet, aveugle et sourd devant qui chacun courbe et plie, inventeur de la pire des tortures morales par un principe on ne peut plus simple, demander une restitution d’argent avec suffisamment de retard pour qu’il soit forcément déjà dépensé, ce qui implique une course en avant de plus en plus accélérée, de plus en plus folle, épuisante, mortelle. Il oblige les gens à vivre comme si chaque année devait les rajeunir, jusqu’à ce que, parfaitement épuisés et las de faire semblant, ceux-ci ne se reposent un instant et se fassent proprement assommer.

Mais là, il n’y a pas pire…

mercredi 23 janvier 2013

Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon. Première édition polychrome de 1887.


Alors que la cote des cartonnages romantiques à plaque est en net repli depuis dix minutes - mais non, Francis, je blague…- l'attrait pour les plats historiés, et en particulier pour ceux traitant de l'aventure et des colonies, ne cesse d'augmenter. Vous en connaissez tous l'instigateur qu'il faudra penser, un jour, à décorer de l'ordre du mérite bibliophile


Je prends aujourd'hui le train en marche avec un ouvrage fort bien décrit sur le catalogue de Jean-Etienne H. D'ailleurs qu'en est-il de ses notices ? Un libraire a-t-il le droit (je ne parle pas de l'inélégance) de recopier une fiche qui lui semble bonne ? S'il ne le fait pas, est-on en droit, comme en médecine ou en chirurgie, de lui reprocher de ne pas avoir utilisé le meilleur protocole qui soit à sa disposition ? La recherche du moins bien n'est, en effet, pas judicieuse  ;-))


L'édition que je propose aujourd'hui à la vente est la première édition polychrome illustrée publiée. C'est pourquoi elle est très recherchée des collectionneurs. Le papier est malheureusement souvent jauni, truffé de rousseurs et les ors sont parfois floutés. Mon exemplaire a échappé à la première atteinte mais n'est pas indemne de blessures superficielles. Il présente même une petite restauration à peine passable à un coin… Une étape vers le Graal !


Je ne veux pas me vanter mais je crois être devenu un spécialiste international des éditions de Tartarin de Tarascon, ce qui ne signifie pas pour autant que j'en possède les exemplaires les plus luxueux. Je crois d'ailleurs vous avoir raconté que j'ai eu le privilège de feuilleter, lors du salon du Grand Palais, une édition in folio superbement reliée aux tarifs prohibitifs. Je ne l'ai pas acheté, non par manque de liquidités vous vous en doutez, mais parce que présenter un tel ouvrage en ma modeste boutique, c'était m'exposer à faire des clients frustrés

 









Il faut reconnaître que depuis plus d'un siècle les tarasconnais, roulés dans la tartarinade ont fini par jouer, à "contre mauvaise fortune bon cœur" ! Ils ont offert une maison à Tartarin, ils ont placé dans leur vitrine des santons tartarinesques ou bien, à mon exemple, de flatteurs ouvrages illustrés pour en tirer un notable bénéfice, ils ont accouplé l'immortel chasseur de lions et la Tarasque en confisquant le héros à son créateur comme les paroissiens avaient fait de même avec Sainte Marthe.


Résumant l'histoire des aventures de Tartarin, Daudet reconnaît, quinze ans après leur publication, que la cité de Tarascon refusait de lui pardonner ce personnage bravache et hâbleur qui allait devenir la fausse image-symbole des citoyens de la ville. Il n'en demeure pas moins que c'est Tartarin qui a fait connaître Tarascon au monde entier, et en s'accaparant du mythe à son profit, la cité de Sainte Marthe a fini par mettre les rieurs de son côté, ce qui tient, une fois de plus, du miracle ! Pierre


DAUDET (Alphonse). Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon. Paris, Dentu, 1887. Un volume grand in-8. Cartonnage recouvert d'une percaline polychrome sur le premier plat, dos illustré, deuxième plat simplement estampé à froid, tranche supérieure dorée, bord biseauté, garde de couleur taupe. Plat historié représentant Tartarin dans un décor colonial gravé par Paul Souze et relié par Engel. Il s'agit de la première édition illustrée de Tartarin avec les illustrations de  Jeanniot gravées sur bois par Auguste Lepère. Défauts de reliure, un coin refait avec, en regard, les premières pages très légèrement rongées. 85 € + port