mercredi 30 septembre 2015

Vie privée et publique des animaux par Grandville. Un exemplaire à prix d'appel pour commencer une collection...


Et si les Animaux opprimés depuis la nuit des temps se révoltaient et, pour faire entendre leur voix et sortir enfin de l'esclavage, exigeaient une Constitution conforme à leurs besoins ? Ces cahiers de doléances, réunis grâce à la vigilance d'écrivains publics attentifs, exposent les griefs, les revendications et les avanies de chaque famille animale, tandis que Grandville fait vivre devant nous leur société, avec ses cauchemars et ses rêves qui répondent à ses propres visions.


Une nuit de 1840, au Jardin des Plantes à Paris, L'Assemblée Générale des Animaux a décrété après délibération les trois articles suivants : Art. Ier. Il est ouvert un crédit illimité pour la publication d'une histoire populaire, nationale et illustrée de la grande famille des Animaux. Art. II. Pour éloigner l'ignorance et la mauvaise foi, ces deux fléaux de la vérité, l'ouvrage sera écrit par les Animaux eux-mêmes, seuls juges compétents. Art. III. Comme les arts et la librairie sont encore dans l'enfance parmi eux, la nation s'adressera, par l'intermédiaire de ses ambassadeurs, pour illustrer cet ouvrage, à un nommé Grandville, qui aurait mérité d'être un Animal.


Les Scènes de la vie privée et publique des animaux sont un recueil d'articles, de nouvelles et de contes satiriques paru en livraison de 1840 à 1842, puis en livre illustré en deux volumes de 1841 à 1842 avec le sous-titre "Études de mœurs". Édité par Pierre-Jules Hetzel avec la collaboration d'écrivains célèbres, notamment J.P Stahl (son pseudonyme), l'ouvrage connu un tel succès que de nombreuses rééditions furent mises à disposition des lecteurs. Je ne m'étendrai pas sur le thème " Vie publique / Vie privée", gisement inépuisable pour journaliste en manque de publicité mais vous constaterez que le 19eme siècle n'est en manque, ni d'informations, ni d'imagination sur la vie privée de ses dirigeants.


À voir nos hommes politiques se mettre en scène avec femme et enfants, on finit, nous aussi, par douter qu'ils aient encore une vie privée, aujourd'hui. Pour preuve, nos présidents de la République mettent maintenant un point d'honneur, sous prétexte de transparence, à se faire filmer pour des reportages en "prime-time" télévisuels. Celui présenté cette semaine n'échappe pas à la règle... Le phénomène n'a rien de nouveau, et la France reste cependant un pays où la vie privée de ses dirigeants est plutôt bien protégée. On ne saurait pourtant nier qu'il s'est produit en France un déplacement dans la manière qu'ont les professionnels de la politique de faire une grande place à leur vie privée jusque dans l'exercice de leurs fonctions. On ne s'étonne plus de voir dans une élection présidentielle des candidats faire campagne, accompagnés de leur épouse, de leur mari ou de la compagne ou du compagnon du moment quitte à ce que l'électeur se pose la question de la légitimité de celui-ci.


Si le chef d'orchestre de l'œuvre proposée aujourd'hui est bien Pierre-Jules Hetzel, vous verrez en lisant ce recueil d'articles que le virtuose est, en fait, l'illustrateur Jean Ignace Isidore Gérard plus connu sous le pseudonyme de Grandville… Pierre


GRANDVILLE (J.-J.). Vie privée et publique des animaux. Vignettes par Grandville, publiée sous la direction de P. J. Stahl avec la collaboration de Balzac, Louis Baude, Emile de La Bédollière, Jules Janin, Alfred de Musset, Charles Nodier, George Sand, Louis Viardot. Paris, J. Hetzel, 1868. Un volume In-4. Reliure demi chagrin rouge, plat estampé, dos à nerfs orné, gardes colorées.636 pp. Très nombreuses illustrations in texte. Des rousseurs irrégulières. 50 € + port

mardi 29 septembre 2015

Yves Brayer et la Provence : Unis par la couleur...


Il fit partie des peintres qui, entre les deux guerres mondiales, éprouvèrent la nécessité de s'attacher à la réalité qui les entourait. C'est pourquoi Yves Brayer et la Provence sont si intimement liés. Né à Versailles en 1907, il passera la plus grande partie de son enfance à Bourges. A son arrivée à Paris en 1924, il prend le chemin des académies de Montparnasse, puis celui de l'Ecole des Beaux-Arts. Très jeune, il témoigne de sa personnalité et des aînés, comme Jean-Louis Forain, l'encouragent.


Encore étudiant, il expose au Salon d'Automne et au Salon des Indépendants. En 1927, une bourse de voyage de l’État lui permet de partir en Espagne où la rencontre avec les maîtres du musée du Prado aura une influence décisive sur son œuvre future. Après un séjour au Maroc grâce à un prix créé par le Maréchal Lyautey, il décroche le Grand Prix de Rome en 1930.


Paris demeure son port d'attache, et, après avoir vécu dans le quartier du Panthéon, il s'installe, dès 1935, rue Monsieur le Prince, dans le sixième arrondissement. Démobilisé à Montauban, il s'installe à Cordes sur Ciel dans le Tarn en 1940. En 1942, il regagne la capitale où Jacques Rouché le charge d'imaginer ses premières maquettes de décors et costumes pour un ballet à l'Opéra de Paris. Il y demeure durant l'occupation et peint la ville enneigée, puis la ville libérée.


L'année 1945 marque une nouvelle étape dans son œuvre. En Provence, il réalise qu'il existe d'autres harmonies que celles des architectures créées par l'homme, celles de la nature pure et sauvage et il est bientôt fasciné par la diversité des Alpilles et leurs plissements calcaires, puis par les étendues de la Camargue peuplées de chevaux blancs et de taureaux noirs. Il se fixe bientôt en Provence plusieurs mois chaque année. Fortement attiré par les paysages méditerranéens, il retourne travailler en Espagne et en Italie, mais la Provence et la Camargue resteront ses lieux de prédilection jusqu'à la fin de sa vie.


Son goût pour le graphisme l'entraîne tout naturellement à pratiquer la technique de la gravure sur cuivre et de la lithographie; ainsi il réalise de nombreuses estampes et illustre des livres à tirage limité avec des textes de Blaise Cendrars, Henry de Montherlant, Baudelaire, Paul Claudel, Jean Giono, Frédéric Mistral, etc... C'est pourquoi il n'est pas méconnu des bibliophiles. Je vous propose aujourd'hui un ouvrage retraçant une partie de son œuvre. Il fut édité par la Maison Arthaud au temps de sa splendeur… Pierre


BRAYER Yves / André CHAMSON. Yves Brayer et la Provence. Grenoble, Éditions Arthaud, 1962. Texte d'André Chamson de l'Académie française. Un grand et fort volume in 4, en feuilles sous couverture rempliée, chemise cartonnée beige et emboîtage vert éditeur. Ouvrage comportant 107 peintures, aquarelles et dessins, en couleurs ou en bistre, hors texte dont de nombreuses double- pages. Table des planches et  biographie. Exemplaire n° 1329/2175. Très bon état. 180 € + port

lundi 28 septembre 2015

Raphael Freida. Mais encore ?


Je réalise que mon dernier billet a dû laisser quelques lecteurs sur leur faim. Qui est donc ce Raphaël Freida aux illustrations si fortes ? Raphaël Freida (1877-1942) est né à Digne et fut un élève de Jean-Paul Laurens. On perçoit à travers son œuvre l'influence des peintres symbolistes de cette époque. Les bibliophiles vous diront que son style ressemble à s'y méprendre à celui de Félicien Rops, son ainé... Nombre de ses compositions évoquent d'ailleurs la bande dessinée contemporaine : les Jim Burns et Melvyn Grant n'ont rien inventé !


Artiste entier - Artiste maudit, Raphaël Freida se voulait sans compromis, ce qui se traduisit entre autre par des rapports parfois tendus avec les éditeurs et les artisans qui imprimaient ses livres. Pour preuve certains de ses courriers :
" Je vois que les graveurs ne font pas attention aux filets ! "
" Je remarque que le graveur ne veut pas faire la mise en page que je demande ! "
" Faites attention ! Mettez la gravure droite… "


Ceci peut expliquer le nombre restreint d'ouvrages illustrés de 1914 à 1927. Cinq sont mentionnés dans les tous articles le concernant. On aurait pu ajouter Les histoires extraordinaires d'Edgar Poe dont les études ont été faites mais l'ouvrage jamais publié.


 On peut donc facilement en donner la liste :
- Leconte de Lisle, les Poèmes barbares, chez Romagnol, 1914, 300 exemplaires.
- Sophocle, Oedipe Roi, chez Romagnol, 1922,  300 exemplaires.
- Anatole France, Thaïs, chez Plicque, 1924, 748 exemplaires.
- Gustave Flaubert, Hérodias, chez Plicque, 1926, 475 exemplaires.
- Octave Mirbeau, le Jardin des Supplices, Chez Javal et Bourdeaux, 1927, 538 exemplaires.


Nous allons, avec un ami, essayer de vous présenter ses publications sur le blogue ! Pour cela, nous sommes preneurs de toutes informations un peu originales sur le bonhomme. Écrire au journal qui transmettra… Pierre

dimanche 27 septembre 2015

Octave Mirbeau illustré par Freida : qui exalte l'autre ?


Je ne suis pas un mordu de la bonne affaire sur Ebay mais, comme certains de mes lecteurs, j’ai quelques mots clés en tête que je pianote à l’occasion. Cela fait huit ans que je pianote à l’occasion… je finis par être un bon client ! C’est donc un pur hasard (sic) qui m’a fait tomber sur cette annonce proposant une œuvre d’Octave Mirbeau illustrée par Freida. La fiche me semble bien faite. Vous pourrez donc suivre cette vente avec moi  (on peut cliquer) ! On aime ou on n'aime pas - mais si on aime, on peut casser sa tirelire ?


Titre : Le Jardin des supplices [1899]. Auteur : Octave Mirbeau (Trévières, 1848 – Paris, 1917). Écrivain français originaire du Perche, journaliste, pamphlétaire et critique d’art ayant participé à faire connaître l’œuvre de Rodin, Camille Claudel, Van Gogh, Maillol, Monet et autres peintres impressionnistes dont il était un fervent défenseur. Il ne fut pas seulement un intellectuel influent de la Belle Époque, à la fois engagé, libertaire et individualiste, il en fut aussi une figure très populaire dont le succès dépassa largement les frontières de la France. Une figure subversive, pourfendeur des bien-pensants, souvent en guerre contre l’injustice sociale et l’hypocrisie des institutions. Ses principales cibles : le capitalisme, la bourgeoisie, et toute idéologie dominante. Une figure complexe aussi qui, avant de devenir un dreyfusard acharné, fut antisémite - comme il l’évoqua lui-même dans son article, « Palinodies » (1898) -, ou qui, par pacifisme chevronné, préconisait un rapprochement franco-allemand, ce qui lui valut une longue phase de purgatoire après sa mort en 1917. Singulière et multiple, son œuvre rejette les courants en vogue de l’époque, le réalisme, le naturalisme ou encore le symbolisme, lui préférant des voies plus tortueuses, comme celles de l’expressionnisme ou de l’impressionnisme. Son livre le plus connu est sans nul doute « Le Journal d’une femme de chambre » (1900), dans lequel il met en scène Célestine, une domestique en prise aux dessous peu ragoûtants de la bourgeoisie de l’époque. Symbole de la lutte des classes, ce roman inspira plusieurs cinéastes à l’instar de Renoir, Buñuel ou plus récemment Benoit Jacquot. Autre œuvre très connue et radicalement différente : « Le Jardin des supplices » (1899), dans lequel il regroupe différents textes sur les monstruosités humaines. On lui doit aussi quelques pièces de théâtre - dont l’immense succès, « Les affaires sont les affaires » (1903) ou encore la comédie, « Le Foyer » (1908), dans lequel il dénonce la charité business - ; un recueil de nouvelles « anti-Daudet », « Lettres de ma chaumières » (1885) et quelques autres romans dont certains étaient assez noirs comme « Le calvaire » (1886), « L’Abbé Jules » (1888), « Sébastien Roch » (1890) et d’autres plus légers, voire burlesques comme « Dingo » (1913).


Artiste / Illustrateur : Raphaël Freida (Digne, 1877 - 1942). Artiste-peintre français d’inspiration expressionniste, élève de Jean-Paul Laurens, aussi grand cartonnier pour vitraux. Il se fit rare dans l’édition, n’illustrant que cinq ouvrages : « Poèmes Barbares » de Leconte de Lisle (1914), « Œdipe Roi » de Sophocle (1922), « Thaïs » d’Anatole France (1924), « Hérodias » de Flaubert (1926), et « Le Jardin des Supplices » de Mirbeau (1927).


Éditeur : Paris, Javal et Bourdeaux, 1927 – Imprimeurs : Coulouma pour la typographie et Porcabeuf pour les eaux-fortes. Référence : Carteret, IV, 283. Édition : Exemplaire : ex. hors commerce (H.C.) sur japon, non annoncé sur le justificatif de tirage et comprenant 4 états des onze gravures et 1 planche refusée, ce qui semble similaire aux 60 ex. du 2ème tirage de tête. Tirage total : 538 exemplaires avec un tirage courant sur Arches de 360 ex (n°166-525). Avant cela, trois tirages de tête représentant 165 ex. (n°1-165) et se décomposant ainsi : 15 ex. sur japon ancien (n°1-15, avec 5 états, 1 original et 1 pl. refusée), 60 ex. sur japon impérial (n°16-75, avec 4 états et 1 pl. refusée) et 90 ex. sur annam (n°76-165, avec 3 états et 1 pl. refusée). En supplément, 13 ex. réservés à des bibliophiles, imprimés sur japon ancien et numérotés en chiffres romains (I à XIII). Iconographie / Illustrations : 45 gravures originales de FREIDA, protégées de serpentes volantes opaques et pour la plupart signées dans la planche. Détails : 11 eaux-fortes originales  hors-texte en 4 états (44 pl.) + 1 planche refusée. Détails des états : 1 état définitif en noir + 1 état au trait + 2 états avec de petites remarques – l’un en noir et l’autre en bistre. Dimensions des eaux-fortes (H x L) : environ 32,5 x 25 cm pour la planche ; 22 x 16,2 pour le dessin. Type de reliure : en feuilles – ni relié ni broché. Étui / Emboîtage : chemise et étui cartonnés à motifs gris argentés sur fond crème. Couverture : chemise rempliée, papier à relief couleur vert-bleu, titré en rouge et illustré d’une vignette. Dos : imprimé en rouge (titre) et vert foncé (auteur et date). Format (H x L x P) : in-4, environ 32,5 x 25 x 3 cm. Poids (sans emballage) : environ 3,4 kg. Nombre de pages : 204-[2] pp + (1 ff.).   
        

État général : très bon – d’autres photos possibles sur demande. Étui / Emboîtage : accidenté, à restaurer – une tranche est totalement détachée + par endroits, quelques frottements et le papier qui commence à se décoller.  Couverture : très bon, voire excellent. Intérieur / pages / gravures : non coupé (tranche supérieure fermée), très frais, très propre, rien de particulier à signaler. Rousseurs : aucune constatée. Suites : excellent état

samedi 26 septembre 2015

Le Roi des prairies. Les Aventures mexicaines de Lucien Biart...


Je présentais dernièrement quelques romans d'aventures publiés du milieu du XIXème siècle au début XXème. En France, les représentants les plus emblématiques du genre furent Jules Verne (bien évidemment), Paul d'Ivoi, le Capitaine Danrit ou André Laurie. Et j'ai oublié Lucien Biart ! Voilà qui est réparé… Je suis d'autant plus impardonnable que, comme lui, je m'apprête à vivre bientôt de grandes aventures au Mexique. Ma fille qui vit là-bas depuis cinq ans m'assure que les mexicains sont gens charmants (elle attend un petit franco-mexicain pour notre arrivée) et que pour notre faciliter notre accueil, c'est tout le pays qui a décidé d'apprendre le français à notre arrivée…


Lucien Biart, qui est mort е 18 mars 1897, à l'âge de soixante-huit ans, n'avait pas toujours été l'homme de lettres laborieux et paisible, que nous avons connu dans sa modeste retraite des Batignolles. Il avait vécu une partie de sa jeunesse au Mexique, où il était allé fonder une pharmacie à Orizaba, et s'était fait recevoir docteur en médecine de la faculté de Puebla.


Pendant l'occupation française, il rendit à nos colonnes des services inestimables, qui devaient tout naturellement le désigner aux représailles des juaristes (partisans de Benito Juárez) ; ses biens furent confisqués en 1867, et lui-même, proscrit, dut gagner la côte où rembarquaient nos derniers bataillons…


Il avait employé son séjour à étudier, en savant et en artiste, ces contrées alors encore si mal- connues chez nous, et commençait, dès 1862, cette merveilleuse série de petits tableaux (La Terre chaude, Paris, 1862, 1 vol. in-18; La Terre tempérée, Paris, 1866, 1 vol. in-8, etc., etc.), dans .lesquels il a si bien dépeint la nature et les mœurs mexicaines.


Lucien Biart était correspondant national de la Société d'anthropologie depuis 1862. Il avait été nommé membre correspondant de la Commission scientifique, créée au ministère de l'Instruction publique pour l'étude du Mexique en 1864. Il a pratiqué des fouilles dans la grotte d'Escamala et rassemblé divers morceaux d'antiquités, et en particulier plusieurs statues de pierre qui sont aujourd'hui déposées au Musée du Trocadéro. Lucien Biart a résumé, dans un livre spécial, intitulé Les Aztèques, paru en 1885 (Bibliothèque ethnologique de Hennuyer), ses études d'ethnographie et d'archéologie mexicaines. (E.-T. Hamy.) .


C'est cependant grâce à divers récits à l'usage de l'enfance et de la jeunesse, publiés en particulier dans le Magasin d'éducation et de récréation, la revue pour l'enfance éditée par Pierre-Jules Hetzel qu'il est connu aujourd'hui. Pierre


BIART, Lucien. Les Explorations inconnues. Le Roi des prairies. Voyages et aventures. Illustrations de F. Lix. Paris, A. Hennuyer, sans date (1880). Un volume grand in-8 (25/17cm).  Cartonnage illustré rouge et or de l'éditeur, plaque de Souze, toutes tranches dorées, gardes colorées.  [2ff titre], 291 pp, [2 ff tables], 4pp (catalogue). Illustré de 34 gravures sur bois, dont 14 hors-texte, dessins de Lix . Infimes rousseurs marginales, belle gouttière. petits défauts d'usure coiffes et coins. 60 € + port

vendredi 25 septembre 2015

Pierre Zlatoff. Histoire de Flogny-la-Chapelle. La chance de trouver un bel exemplaire...


La différence la plus évidente, pour moi, entre un libraire d'ouvrages modernes et un libraire d'ouvrages anciens tient à un facteur indépendant de leur volonté : La chance, le hasard, la bonne - ou la mauvaise - étoile qui peut mettre sous les yeux du deuxième un exemplaire original, ou dans tous les cas suffisamment remarquable pour le différencier des publications à valeur tarifée que commercialise le premier…


Hasard : Le hasard est étrange, il provoque les choses, nous dit Charles Aznavour dans une de ses chansons. Encore faut-il que les compétences du libraire lui permettent de reconnaitre ce livre remarquable. Pour l'ouvrage que je présente aujourd'hui à la vente, le mérite n'ést pas bien grand : il me suffisait de reconnaitre un maroquin d'exceptionnelle qualité et une provenance rendue possible grâce aux Armes prestigieuses présentes sur le premier plat. Par contre, je me suis toujours demandé par quel heureux "hasard" le libraire qui avait trouvé le cliché de Rimbaud adulte dans un lot avait pu déterminé qu'il avait dans ses mains un cliché exceptionnel… Le hasard ne fait pas tout.


Bonne étoile : La bonne étoile peut être, alors, un facteur prédisposant à cette réussite. On peut naitre sous une bonne étoile ou avec une cuillère en argent dans la bouche… Il est évident que si l'on reprend une affaire de famille, si on a eu très tôt l'habitude, grâce à ses parents, de "toucher" de la bonne marchandise, l'appréciation pertinente que l'on a d'un ouvrage tombé sous nos yeux peut être facilitée par l'expérience qu'on a acquise à leur contact.


Réussite : Il y a une prise de risque qui s'adosse à tout achat. Je lisais dernièrement que l'ouvrage Millénium édité par Actes Sud frôlait le million d'exemplaires vendus. Bonne affaire ! Je lisais aussi que cette même société se défaisait de son activité "librairie ancienne" avec la vente de la librairie Picard octroyée à un confrère renommé. Mauvaise affaire sûrement !


Sort : Le sort peut s'acharner sur vous pour vous faire concrétiser ou non un achat.  Combien de libraires d'ouvrages anciens ont vu leurs enchères annulées par une préemption de l’État ? La vente récente de la collection d’art d’André Breton et le nombre important d’œuvres préemptées à cette occasion ont mis en relief ce mode particulier d’acquisition d’œuvres d’art par l’État. Le droit de préemption – mis en place par la loi du 31 décembre 1921 – est un droit régalien permettant à l’État de se substituer de manière autoritaire au dernier enchérisseur d’un bien proposé dans le cadre d’une vente aux enchères. Ainsi l’État peut-il, en lieu et place de l’acheteur légitime et sans entrer dans le jeu des enchères, acquérir le bien au dernier prix annoncé par le commissaire-priseur…


Destin : Je ne sais pas si le destin avec son corollaire de prédestination existe vraiment. Il n'empêche que ce qui existe, ce n’est pas un destin fixe, mais des tendances, des influences profondes, liées à notre passé ou à notre milieu social. Certes, tout cela pèse sur le déroulement de nos existences, mais nous avons une importante marge de manœuvre, et nous pouvons très largement échapper à ce " destin ". Être fils ou fille de libraire d'ouvrages anciens ne vous empêche pas d'exercer, plus tard, un métier honnête, par exemple…


Chance : Tout le monde a de la chance – il faut cependant la saisir quand elle passe devant vous. Pour ce qui est du métier de libraire d'ouvrages anciens ou le bénéfice se fait à l'achat, cette chance est souvent liée aux liquidités que nous possédons au moment même de l'achat. Je ne compte plus les bonnes affaires que je n'ai pas faites par frilosité dans le meilleur des cas et pour de légitimes raisons financières dans tous les autres cas de figure.


Providence : Elle n'intervient que pour ceux qui y croient ! À ce propos, connaissez-vous cette célèbre prière de sérénité ? " Mon Dieu, donnez-moi la sérénité d'accepter ce que je ne peux changer, le courage de changer les choses que je peux changer, et la sagesse d’en connaître la différence"... Pierre

ZLATOFF (Pierre). Histoire de Flogny-La-Chapelle. Illustrations de l'auteur. Tonnerre, société archéologique, 1990. Un volume in-8. Reliure plein maroquin ébène, Armes dorées sur le premier plat, dos lisse, lettres et filets dorés, roulette sur le contre-plat, gardes colorées, tranche supérieure dorée. Envoi de l'auteur. Provenance prestigieuse. Très bel état. 50 € + port (réservé)

jeudi 24 septembre 2015

Discours de réception de Paul Bourget à l'Académie Française. Une réception périlleuse...


L’Académie Française vit depuis 1635 sur un corps de droit écrit, formé de textes ayant valeur de lois et règlements. S'y adosse, par surcroît, la tradition du discours de réception ! Passage obligé pour les uns, opportunité de briller pour les autres… Si vous voulez être admis dans ce cénacle des beaux esprits, chers lecteurs, sachez qu'il vous faudra cependant être candidat et rédiger une lettre de candidature – on dirait une lettre de motivation aujourd'hui ! Dans un deuxième temps vous aurez à faire quelques visites protocolaires et "complimentir" habilement vos futurs confrères sur la qualité de leurs œuvres pour attirer sur vous leurs suffrages. Vous serez peut-être comme Philippe Gandillet, élu au premier tour. C'est ce que je vous souhaite !


Quand viendra le résultat du vote, la tradition est de n'être ni déçu, ni surpris. A moins d'être résolument optimiste, il n'est pas correct de se présenter plus de deux ou trois fois ; c'est vous qui voyez ! Ensuite seulement, vous serez présenté au Président de la République qui authentifiera votre élection. Vous aurez alors réussi la partie la moins périlleuse de votre accession à l'Immortalité littéraire : reste à écrire votre discours de réception à l'Académie !


Je vous propose aujourd'hui le très beau texte lu par Paul Bourget lors de son intronisation. Le discours de réception, qualifié de remerciement ou d'éloge, est né par hasard, ou plutôt il est venu du talent de l'avocat au Parlement, Olivier Patru, élu en 1640 au dix neuvième fauteuil qu'avait occupé le poète oublié Porchère d'Arbaud, disciple de Malherbe. Pellisson raconte dans son Histoire de l'Académie, " Qu'à sa réception, l'éloquent avocat prononça un fort beau remerciement dont on demeura si satisfait qu'on a obligé tous ceux qui ont été reçus depuis d'en faire autant ". Il ne suffit cependant pas d'être élu à l'Académie, il faut encore être reçu ! C'est souvent un des plus grand jours de la vie du récipiendaire - avant son enterrement pourrait-on dire… Les auditeurs vous auraient dit du discours de Patru qu'il s'agissait d'un talentueux exercice de flagornerie porté à un sommet rarement atteint. On sait maintenant que les limites de l'exercice ont été maintes fois dépassées… Étrange coutume cependant : Huit jours avant la fameuse séance sous la Coupole, une commission de lecture se réunit pour prendre connaissance des deux discours qui seront lus publiquement, le discours du nouveau venu et le discours de l'Académicien qui le recevra. Une censure politique peut donc empêcher un élu de prononcer son discours d'éloge. Lamartine n'a jamais eu d'hommage public en raison de cela…


Philippe Gandillet m'a raconté que le moment le plus difficile pour lui ne fut pas sa réception mais son retour dans le petit appartement qu'il occupe, place des Vosges, quand il n'est pas à Tarascon, dans sa bastide provençale. Voici le héros du jour rentré chez lui : il lui faut retirer son costume qui, décidément, n'est pas bien ajusté et trouver une place à son foutue épée ! Avait-il été excellent comme à son habitue ou, par malheur, médiocre ? Il ne dormit pas bien, ce soir là, attendant de lire les commentaires des rares journaux qui relataient encore de ces intronisations...


Paul Bourget fut bon. Il fit appel à Alphonse Lemerre pour éditer son discours sur un beau papier et dans un format "grand papier". L'exemplaire que nous proposons aujourd'hui fut envoyé à son ami Georges  René-Saint-Taillandier dont le Papa, Académicien, appuya sa candidature… Pierre

 
BOURGET. Paul /  Académie Française. Discours de réception à l'Académie Française. Paris, Alphonse Lemerre, 1895. Reliure signée Paul Vié, pleine percaline verte, pièce de titre en maroquin cerise, lettres dorées, couvertures conserves. E.O. Grand papier sans justification (24,5/16cm). Cliché de Maxime du Camp en frontispice. Envoi de Paul Bourget à son confrère Georges Saint-René-Taillandier.120 € + port

mercredi 23 septembre 2015

Sainte Beuve : Critiques et portraits littéraires. Un exemplaire de bibliophile...


Charles-Augustin Sainte-Beuve ( 1804- 1869) est un critique littéraire et écrivain français bien connu sur ce blogue pour le plagiat approximatif qu'en fait Philippe Gandillet dans ses Causeries du lundi… À la différence de Hugo, son ami qu'il trahira dans un moment d'égarement conjugal, il se rallie au Second Empire en 1852. En 1854, il obtient la chaire de poésie latine au Collège de France, mais sa leçon inaugurale sur Virgile et L'Énéide étant perturbée par des étudiants qui veulent dénoncer son ralliement, Il envoie sa lettre de démission…


À partir d'octobre 1849, il publie, successivement dans Le Constitutionnel, Le Moniteur et Le Temps des feuilletons hebdomadaires regroupés en volumes sous le nom de Causeries du lundi, leur titre venant du fait que le feuilleton paraissait chaque lundi.


Par la suite, il sera nommé maître de Conférence à l'École normale supérieure où il donnera des cours de langue et de littérature françaises de 1858 à 1861. Parallèlement, il sera aussi nommé au Sénat où il siègera de 1865 jusqu'à sa mort en 1869. Une carrière exceptionnelle, donc, couronnée par un siège à l'Académie en 1845 ! Hasard ou clin d'œil de l'histoire, on retiendra que la réponse à son discours de réception fut prononcée par Victor Hugo…


S'il fallait n'avoir lu qu'un seul ouvrage dans sa vie - trois pour l'occasion - ne se souvenir que d'un seul pour étayer le tunnel qui nous mène à la lumière et briller en société, je vous inciterai à acquérir les lumineuse analyses qu'a fait Sainte Beuve pour les portraits que je propose aujourd'hui à la vente. Alliant l'érudition, la critique et le délassement, ils nous permettent de saisir au mieux les qualités de nos plus grands écrivains nationaux. Trente portraits sont proposés, ici. Les lecteurs seront comblés !


Les bibliophiles aussi ! Ces trois ouvrages sont remarquablement reliés. Il s'agit de reliures qu'on nomme "romantiques" ou "de style romantique".  Les grands relieurs de cette époque, les Thouvenin, Purgold, Simier, Ginain et Vogel enrichiront le dos et les plats de leurs demi-reliures ou de leurs reliures plein cuir à l’aide de mosaïques dorées et de motifs estampés du plus bel effet. Les reliures non signées comme celles que je présente ici, œuvres de relieurs moyens ou obscurs peuvent cependant rivaliser pour le goût, la finesse et la netteté d’exécution avec les productions des maîtres.


Si l'on ajoute à ce tableau flatteur que le papier utilisé a résisté aux attaques oxydo-réducrices de la combinaison acide-eau-air, caractéristique des impressions de l'époque, vous comprendrez que je considère l'exemplaire à la vente aujourd'hui comme une parfaite alliance de l'art, de la technique et de la connaissance… Pierre


SAINTE-BEUVE (Charles-Augustin). Critiques et Portraits littéraires. Paris, Raymond Bocquet, 1841. 3 volumes in-8 (21,5/14cm). Reliure pleine basane bleu nuit, plats finement estampés, filet d'encadrement des plats, dos lisses, caissons et titres dorés, roulette sur les coupes et les coiffes, toutes tranches jaspées, gardes colorées. Livres de prix, ex-libris. Parfait état. Vendu