jeudi 30 juin 2011

Le petit chose de Daudet dans une édition lyonnaise d'après-guerre.


Je suis né le 13 mai 18..., dans une ville du Languedoc où l'on trouve, comme dans toutes les villes du Midi, beaucoup de soleil, pas mal de poussière, un couvent de carmélites et deux ou trois monuments romains. Mon père, M. Eyssette, qui faisait à cette époque le commerce des foulards, avait, aux portes de la ville, une grande fabrique dans un pan de laquelle il s'était taillé une habitation commode, tout ombragée de platanes, et séparée des ateliers par un vaste jardin. C'est là que je suis venu au monde et que j'ai passé les premières, les seules bonnes années de ma vie. Aussi ma mémoire reconnaissante a-t-elle gardé du jardin, de la fabrique et des platanes un impérissable souvenir, et lorsque à la ruine de mes parents, il m'a fallu me séparer de ces choses, je les ai positivement regrettées comme des êtres…


Voici donc le début de ce roman autobiographique d'Alphonse Daudet ancré dans nos mémoires. Ruinés, les membres de la famille Eyssette sont contraints de se séparer. Daniel, dit " Le petit chose ", endure de nombreuses souffrances avant de devenir pion dans un collège de Province. A lui, la solitude et la liberté ! Mais sa quête du bonheur se révélera bien difficile dans un monde sans pitié pour les pauvres...

Depuis, le monde a-t-il vraiment changé, en fait ?


En vérité, Alphonse Daudet fut maître d'étude au collège d'Alès. Cette expérience pénible lui inspirera ce premier roman, Le Petit Chose (1868). Dans ce roman, se trouvent des faits réels et inventés, comme la mort de son frère ! Un peu de pathos est toujours bénéfique pour une sortie en kiosque. Cela n'a pas changé non plus, je crois.

L'édition que je vous propose est une édition lyonnaise numérotée de très belle facture. Bien présentée, j'ai eu néanmoins de grosses difficultés à trouver quelques renseignements sur l'illustrateur. Paul Janin (1890-1973) est de la génération de ces peintres et aquarelliste du début du XXe siècle tels Louis Bouquet, Pierre Combet-Descombes, Jean Chieze ou Louis Touchagues. Je suis preneur d'informations pour compléter mon billet et légitimer le prix exorbitant de cet ouvrage ;-)) Pierre


DAUDET (Alphonse), JANIN (Paul). Le petit chose. Histoire d'un enfant. Lyon, J. Cuzin éditeur, 1946. Exemplaire broché à couverture rempliée illustrée, grand in n-8, 306 pp. Un frontispice, sept hors-texte en couleurs, trente dessins en noir de Paul Janin. Exemplaire n° 829. Bel état. Vendu


Pour Jean-Michel : Les yeux noirs illustrés par André Collot dans une autre édition (La bonne étoile, 1935).

mercredi 29 juin 2011

Maurice Maeterlinck illustré par André Édouard Marty .


"Biographiquement parlant, il n'y a rien à dire, sinon que je suis né le 29 août 1862. Bibliographiquement parlant, vous trouverez la liste de mes volumes avec la date de leur publication. N'est-ce pas à ceci que doit se réduire l'histoire d'un homme de lettres ?" Maurice Maeterlinck.

Auteur belge d’expression française, poète, auteur dramatique, essayiste, Maeterlinck pourrait, à travers cette auto-définition, vous paraître inintéressant au possible si je ne vous disais pas qu'il fut aussi le principal chef de fil du mouvement symboliste au théâtre, mouvement représenté en poésie par Baudelaire et Verlaine. Né en 1862 à Gand, d’une famille de juristes, il abandonne le barreau pour s’installer à Paris en 1886. Il prend parti contre le Naturalisme qui prédominait à l’époque dans la littérature française (Emile Zola en est le représentant emblématique).


C'est son théâtre qui le fit connaître d'un public élitiste (La Princesse Maleine en 1889, Pelleas et Melisande en1892) et qui lui valut son Prix Nobel de littérature en 1911. De caractère mélancolique (on s'en doutait un peu !), hanté par la mort, il illustra l’esprit fin de siècle qui chantait les mystères de l’au-delà. Les entomologistes le célébrèrent pour sa Vie des Abeilles en1901, qui eut un succès considérable continué par la Vie des Fourmis en 1930 et l’Araignée de verre en 1932.


Pendant une vingtaine d’années, la comédienne et chanteuse lyrique Georgette Leblanc fut aussi sa muse. Puis ce fut Renée Dahon qu’il épouse en 1919. En 1924, ils firent l’acquisition du château qu’ils ne quitteront qu’en 1939 pour s’exiler aux Etats-Unis pendant toute la période de la guerre. Le poète s’éteint à Nice en 1949 dans son palais Orlamonde, après avoir été comblé d’honneurs. Il avait été anobli par le roi Albert 1er et avait été reçu membre associé de l’Académie Française.


"Je ne sais rien de Maurice Maeterlinck disait Octave Mirbeau à qui cet ouvrage est dédié. Je ne sais d’où il est, ni comment il est. S’il est vieux ou jeune, riche ou pauvre, je ne le sais. Je sais seulement qu’aucun homme n’est plus inconnu que lui ; et je sais aussi qu’il a fait des chefs-d’œuvre, non pas des chefs-d'œuvre étiquetés chefs-d’œuvre à l’avance, comme en publient tous les jours nos jeunes maîtres , chantés sur tous les tons de la glapissante lyre – ou plutôt de la glapissante flûte contemporaine –, mais des admirables, et purs, et éternels chefs-d’œuvre qui suffisent à immortaliser un nom et à faire bénir ce nom par tous les affamés du beau et du grand ; des chefs-d’œuvre comme les artistes honnêtes et tourmentés, parfois, aux heures d’enthousiasme, ont rêvé d’en écrire, et comme ils n’en ont écrit aucun jusqu’ici."


Pelléas et Mélisande est une pièce à l'intrigue classique. C'est une transposition du mythe de Tristan et Yseult : Deux jeunes gens sont irrésistiblement amoureux ; leur amour est interdit par la présence d'un mari âgé et violemment jaloux et ne peut s'accomplir que dans la mort. Voilà qui est résumé ;-)) Claude Debussy en fit un opéra en cinq actes aujourd'hui plus renommé que la pièce. La première eut lieu le 30 avril 1902 à l'Opéra-Comique à Paris sous la direction d'André Messager (L'escarpolette).


L'ouvrage que je vous présente va ravir les amateurs de livres illustrés du début du XXe siècle. Élève de Cormon aux Beaux-Arts, André Édouard Marty (1882-1974) fut un graveur et illustrateur formé à l'école de Georges Lepape (Satiricon), Charles Martin et André Brissaud. Les gravures de cet ouvrage sont particulièrement réussies et font de cet exemplaire un ouvrage recherché par les bibliophiles…


En 1912, Il expose chez Georges Petit et, régulièrement ensuite, figure au Salon des Humoristes. Collaborant à diverses revues telles que Femina, Comœdia illustré, le Sourire, Vogue, l'Illustration des modes, ou encore Harper's Bazaar, il signe des affiches, parmi lesquelles celle des Ballets à l'Opéra (1910) et celle pour l'inauguration du Théâtre des Champs-Élysées (1913). Il dessine des décors et des costumes pour le Théâtre des Arts ou pour la Comédie Française. On lui doit également nombre d'illustrations pour des ouvrages classiques ou de la littérature moderne (Ovide, Shakespeare, La Fontaine, Musset, Daudet, Pierre Louÿs et Maeterlinck, comme ici…). Pierre


MAETERLINCK (Maurice). Pelléas et Mélisande. Editions de la Mappemonde, 1944. In/8 carré broché couverture rempliée illustrée, 206 p., frontispice, magnifiques illustrations aquarellées hors-texte, bandeaux, culs de lampes de Andrée E. Marty. Exemplaire numéroté sur vélin pur fil. État parfait. Vendu

mardi 28 juin 2011

Maria Chapdelaine, célèbre roman de Louis Hémon.

Une maison isolée, au nord du Canada, dans la province du Québec. Là vit la douce et belle Maria Chapdelaine. La ville la plus proche est Peribonka où, un jour de printemps, Maria et son père Samuel rencontrent François Paradis, le trappeur. A l'évidence, François éprouve les sentiments les plus tendres pour la jeune fille, que courtisent également un brave bûcheron, Eutrope Gagnon, et Lorenzo, un citadin aux belles manières qui vient régulièrement commercer dans la région. Mais c'est le trappeur que Maria préfère ! Il s'est d'ailleurs déclaré le premier, promettant de l'épouser à son retour du chantier où il passera l'hiver. La mauvaise saison est revenue, Les "Chapdelaine" ne pourront même pas assister à la messe de minuit car les chutes de neige ont coupé les chemins. Au long des jours et des nuits, Maria prie en silence pour que François lui revienne. Celui-ci, impatient s'est imprudemment mis en route, en pleine tempête, rêvant de passer Noël avec sa bien-aimée... Mais c'est son cadavre qui est ramené au village en ce jour de la nouvelle année..."Au pays de Québec, rien ne doit mourir et rien ne doit changer."



Voilà ! C'est une belle histoire que n'aurait pas relié Zola. Mais l'intrigue se passe chez les "canadziens" et plus précisément au Québec où la forêt remplace les corons… Louis Hemon (1880-1913) est un aventurier des temps modernes. Il naît dans une famille aisée, aux idées laïques et républicaines affirmées. Sportif accompli, il n'apprécie malheureusement pas la scolarité. A la sortie du lycée, le jeune homme entame des études de Droit à La Sorbonne. Mais il caresse l'espoir secret de partir pour l'Extrême-Orient. Après sa licence, il liquide son service militaire puis passe le concours de l'Administration coloniale. Reçu, il est affecté en Algérie. Mais la chose lui déplaît et il renonce à son poste.



C'est à Londres que Louis Hémon entre en littérature. Il commence en effet par écrire des billets pour la presse sportive française, notamment pour "Le Vélo" qui publie, le 1er janvier 1904, sa nouvelle "La Rivière", arrivée première au concours organisé par le quotidien. Dans la foulée, le journal propose au jeune homme un poste de correspondant dans la capitale anglaise et, à partir de là, Hémon envoie très régulièrement chroniques mais aussi récits et contes où perce déjà la patte de l'écrivain. Son premier essai en 1908 est suivi de deux autres romans : "Battling Malone", consacré à la boxe et "Monsieur Ripois et la Némésis", où l'on perçoit l'influence très nette du "Bel-Ami" de Maupassant. Ce dernier livre est sans doute fortement autobiographique et a pour thème majeur les déboires amoureux d'un jeune homme qui ressemble beaucoup à l'auteur. C'est que le Breton s'est mis en ménage avec une Irlandaise, Lydia O'Kelly, dont il vient d'avoir une fille.


Hélas ! Son épouse manifeste de graves troubles mentaux et elle est internée. La petite Lydia Kathleen est confiée par son père à Mrs Phillipps, sa tante maternelle. Quant à Hémon, il prend un billet pour le Canada. Nous sommes en 1911 et il ne sait pas qu'il n'a plus que deux ans à vivre... Après un séjour à Québec, Hémon s'installe à Montréal et prend un poste de commis d'assurances. Il écrit toujours des articles pour son journal, mais cette fois-ci, prend son inspiration dans la culture québécoise. Le 15 juin 1912, il part pour la région des pionniers.


Aux yeux des autochtones, Hémon semble un être bizarre, parlant peu, écrivant beaucoup dans le carnet qu'il promène partout, n'allant enfin jamais à la messe… Finalement, il s'installe de l'autre côté du lac Saint-Jean, et c'est là qu'il rédige la première version du livre qui lui assurera la célébrité : "Maria Chapdelaine."


Au printemps 1913, le manuscrit est fin prêt et expédié au "Temps", à Paris. Louis Hémon part alors pour l'Ouest canadien. Il s'arrête au village de Chapleau, en compagnie d'un camarade de route d'origine australienne et, le 8 juillet 1913, les deux hommes sont happés par un train ? L'accident demeure toujours inexplicable. Mystère…Les nombreux mythes entourant Louis Hémon nous l’ont fait connaître tout en cachant sa véritable nature. On s’entend pour lui attribuer une personnalité rebelle et mystérieuse. Il a donc tout pour passer à la postérité ;-)) L'ouvrage que je vous présente est une petite édition numérotée en grand format et sur beau papier. Il est illustré par Alexandre Alexeieff qui deviendra, plus tard, renommé en tant que réalisateur de films d'animation. Pierre
HEMON Louis. Maria Chapdelaine. Récit du Canada Français. Paris, Editions du Polygone, 1927. In-4° broché, couverture rempliée illustrée. Frontispice et 25 lithographies originales et 16 lettrines d'Alexeieff. Tiré à 650 exemplaires, celui-ci est l'un des exemplaires sur vélin des manufactures Mongolfier d'Annonay (173/600). Quelques rares rousseurs. Bel état. 115 €

lundi 27 juin 2011

Causerie du lundi de Philippe Gandillet : Rire du livre de Simon Debré, mais pas avec n'importe qui…


Pierre, qui vient d'acheter un petit ouvrage original en salle des ventes, me demande de le présenter à sa place tant il craint que la présentation de cette petite rareté soit néfaste à sa réputation. Certains savent déjà qu'il aime Charles Maurras (l'écrivain) et qu'il possède l'intégralité de l'œuvre de Léon Daudet (régionalisme oblige). Il n'en faudrait pas plus pour qu'on le taxe d'antisémitisme !

C'est que le temps de l'antisémitisme de circonstance du début du XXe siècle ne s'est pas évanoui insensiblement et par une altération imperceptible. Il a péri de mort violente à l'évocation des horreurs de la shoah. Il ne peut plus s'apercevoir, de nos jours, qu'au travers d'immenses bouleversements de frontières ou d'événements religieux dans certains pays. Le monde au sein duquel nous nous sommes formés à la vie est un monde foudroyé. Nous vivons comme nous pouvons dans le désordre de ces ruines, ruines elles-mêmes inachevées, ruines qui menacent et qui nous entourent de circonstances pesantes, au milieu desquelles le visage palissant du passé nous apparaît avec ses bassesses…

Au sortir d'une crise si violente, après un si grand bouleversement et une tension si prolongée des esprits, l'humour s'est fait bien différent de ce qu'il fut. On trouvait alors autour de soi, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, une disposition tout autre et des ambitions bien cachées. Ce groupe d'écrivains et d'illustrateurs qui avait dressé devant nous quantité de miroirs convergents a disparu avec ses anathèmes.


Assis sur les degrés de l'amphithéâtre intellectuel qui s'élève de cette obscurité nauséabonde jusqu'à la gloire de la pensée éblouissante (sic), nous pouvons aujourd'hui choisir le côté de nos préférences. Il serait démodé de chercher des rives à notre pensée quand les bords ennemis sont maintenant unis sous le drapeau de la tolérance. La diversité est dans l'air intellectuel, qu'on se le dise, et ce sont les exceptions à la règle qui en deviennent les porte-paroles…

Voilà pourquoi un ouvrage sur l'humour judéo-alsacien doit être considéré aujourd'hui comme un document à diffuser sans complexe. De plus, cet ouvrage a été écrit par un rabbin, ce qui en légitime l'édition. L'auteur : Simon Debré (1854-1939). Son nom vous dit sûrement quelque chose ?


La famille de Simon Debré est originaire de Bavière. En 1808 les deux frères Moyses choisirent simultanément le nom de Déprés qui se fixera sous la forme de Debré. Ils ont tous deux assumé les fonctions de chantre (hazzan). A titre de curiosité, on notera qu'au recensement de 1848, les frères Jacques et Simon Dépré sont tous deux inscrits comme courtiers en conscrits ?

Né à Westhoffen dans le Bas-Rhin en 1854, Simon Debré suit les leçons de Talmud du rabbin Salomon Lévy de Brumath, puis celles des maîtres de la Yeshiva de Wurtzbourg, en Allemagne, et c'est là, sans doute, qu'il se perfectionne aussi dans la langue allemande, qu'il enseignera plus tard aux officiers de la garnison et, à un certain moment, au collège municipal de Sedan. Après des études à l’École Rabbinique de 1873 à 1879, il est nommé rabbin de la cité ardennaise et occupe ce poste de 1880 à 1888.

En 1888, il est nommé rabbin de Neuilly-sur-Seine. Il est aussi professeur de Talmud au Séminaire Israélite, aumônier du Lycée Janson de Sailly à Paris et enfin promu grand rabbin à titre personnel. Ses principales œuvres sont des traductions à l'attention des fidèles mais vers la fin de sa vie, il écrit L'humour judéo-alsacien , un délicieux petit livre, tout imprégné des saveurs du terroir et de cette tendre et hilarante ironie dont l'âme alsacienne ne se départit jamais, contribuant ainsi à sauver de l'oubli un nombre considérable de dictons et de sentences alsaciens. C'est cet ouvrage que je vous propose aujourd'hui à la vente. Bien relié, il est en très bon état de conservation.


Je reprends quelques expressions qui m'ont bien fait rire et qui sont fort bien expliquées.

- Heureux ceux qui sont assis
- Il va à reculons
- Chez celui-là, l'usage consiste à ne pas donner
- Certains jours de demi-jeûne
- Libertin, dépensier
- Il doit tout ce qu'il possède
- Celui qui permet les choses défendues
- Il est lent à la colère


J'en profite pour vous conter une petite blague qui fait beaucoup rire les catholiques :

Un vieux Juif meurt et rencontre Dieu en arrivant au paradis. Il fait le bilan de sa vie :
- La pire chose qui me soit arrivée, c'est quand mon fils s'est converti au christianisme..., dit-il.
- Moi aussi, lui répond Dieu.
- Et qu'est-ce que vous avez fait? demande le Juif.
- Un nouveau testament...

Votre dévoué. Philippe Gandillet


DEBRE (Simon). L'humour Judéo-Alsacien. Paris, éditions Rieder, 1933. Petit in-8 de 307pages. Reliure demi basane cerise, dos lisse orné de filets et pièce de titre en lettres dorées. Bel état. Cachet de bibliothèque. Très rare à la vente. Vendu

samedi 25 juin 2011

Le blog du chien qui boite, vous connaissez ?


Lui est allemand ; il parle sans accent ou si peu…
Elle est québécoise ; elle parle sans accent ou si peu…

Ils ont poussé la porte de la boutique et une conversation sur le livre ancien s'est engagée. Si ce n'était le petit dans les bras de sa maman qui s'impatientait, nous serions encore à deviser entre amis. Car les amoureux des livres sont des amis sans le savoir…

Ils animent un blog bibliophile axé sur la reliure qui est leur passe-temps. L'originalité de leur blog tient au fait que les articles sont proposés en version bilingue (allemand et français). Vous pouvez donc faire un petit clic sur votre clavier pour leur rendre visite ou simplement les soutenir dans cette téméraire aventure qu'est l'animation régulière d'un blog.

Ils m'ont donné l'explication sur le fait que Martin soit incollable en bibliographie… La référence allemande de recherche, le KVK, meta-moteur de l'université de Karlsruhe est très efficace ! Voici le lien :


http://www.ubka.uni-karlsruhe.de/kvk_en.html

Bon dimanche ensoleillé. Pierre

vendredi 24 juin 2011

Alfred de Vigny face à sa destinée...

C'est une des caractéristiques du métier de libraire que de faire le grand écart, en fonction du souhait supposé des clients, entre différents genres littéraires que tout oppose. Hier la géographie, aujourd'hui la poésie et pas n'importe laquelle ! Les esprits les plus crédules pourraient penser que nous sommes des puits de sciences. Les lecteurs avertis savent qu'il n'en est rien, en tout cas pour moi…


Je propose aujourd'hui une œuvre posthume de Alfred de Vigny (1797-1863) qui fut officier, poète et romancier. Il fit partie du premier "Cénacle" de Victor Hugo et fut l'un des chefs de l'école romantique avec Lamartine et Théophile Gautier. Détail qui me le rend sympathique, il échoua quatre fois à l'Académie, en 1842 contre Pasquier et Patin, en 1844 contre Saint-Marc Girardin et Mérimée. Il fut élu le 8 mai 1845 à l'épuisement du jury en remplacement d’Étienne, et reçu le 29 janvier 1846 par le comte Molé. Irrité sans doute de ses échecs antérieurs, Alfred de Vigny insista lourdement sur son élection en célébrant dans son discours la victoire romantique qu'il venait de remporter. À la suite de cet incident, tous les académiciens marquèrent une grande froideur à leur nouveau confrère qui fut tenu en quarantaine, ce qui est normal pour cette assemblée (sic).


Seul, Victor Hugo lui resta fidèle et refusa d'être nommé directeur tant que les dispositions de l'Académie ne changeraient pas. Cinq-Mars (1826) est son chef-d'œuvre. Il a laissé Stello, Chatterton, 1835, La Maréchale d'Ancre, les Poèmes antiques et modernes 1822, Eloa, 1824, et les Destinées, œuvres posthumes que je vous propose à la vente aujourd'hui. Indifférence du public ; lorsqu'il mourut le vide se fit autour de son cercueil qui ne fut accompagné que de quelques romantiques de la première heure. Sur un blog ami, il pourrait être un bon candidat pour l’Académie des oubliés !


En 1864, après la mort du poète, son exécuteur testamentaire, respectant sans doute ses intentions définitives, réunit onze de ses pièces sous le titre Les Destinées et avec le sous-titre "Poèmes philosophiques". Cette double désignation est heureuse. Le problème de la destinée demeure posé d'un bout à l'autre du recueil, et Vigny l'aborde à la fois en poète et en philosophe.

Le recueil que je propose, édité en 1898 à petit nombre et richement illustré, est précédé de Moïse, écrit en 1822 et publié en 1826. Vigny s'inspire ici de la Bible. A travers ce personnage, le poète exprime l'angoisse de sa solitude morale, et ses premiers doutes devant le mystère de la justice divine. Les Destinées qui donne son nom au recueil vient ensuite et porte en épigraphe "C'était écrit". On sent tout de suite que l'auteur est un joyeux drille…


La condition humaine avec son fardeau de misère, est-elle inéluctablement soumise à une fatalité qui interdit toute espérance et rend vain nos efforts ? Vient ensuite une série de poèmes tout aussi déprimants. Les acheteurs dépressifs sont amenés à s'éloigner du gaz pendant la lecture de cet ouvrage. Enfin, malgré la résistance des tyrannies et des préjugés de Wanda, poème dénonçant la cruauté des tyrans, l'avenir radieux de l'humanité verra le triomphe de L’Esprit pur, poème qui couronne le recueil et apparaît comme le testament spirituel du poète glorieux et triomphant… Ouf !


Les bibliophiles intéressés par cet ouvrage apprécieront que l'exemplaire présenté soit nominatif et tiré à petit nombre par un professionnel renommé pour la qualité de ses éditions (Edouard Pelletan). Pierre

Destinée,
Inutile de fuir ou de lutter
C'est écrit dans notre destinée
Tu ne pourras pas y échapper
C'est gravé !


VIGNY. (Alfred De). Les Destinées précédées De Moïse. A Paris chez Édouard Pelletan, Paris 1898. Un volume broché à couverture rempliée. Format in 8 raisins de 196 pages, enrichi de gravures de G. Bellenger, gravées par Froment. Bandeaux, culs de lampes et vignettes. Tirage total à 350 ex. numérotés en chiffres arabes, et 50 ex. de présent, numérotés en chiffres romains. Exemplaire n° 101, un des 250 sur vélin des papeteries du Marais. Exemplaire nominatif imprimé pour M. Henri Dechelette. Un portrait de Vigny en frontispice. Très bel état dans son papier cristal d'origine. Vendu

jeudi 23 juin 2011

1739. Géographie universelle par le Père Buffier. Encore des approximations, mais on pense que la terre tourne autour du soleil…


J'aurai sûrement quelques difficultés à vous faire aimer l'ouvrage présenté aujourd'hui car il n'est ni dans une belle reliure, ni dans un état de conservation impeccable. Qu'importe en fait car, pour cette fois, c'est le contenu de ce livre d'éducation à l'attention de la jeunesse qui en fait l'intérêt !


Je dois vous avouer que j'avais, à l'époque, acheté cet ouvrage pour son titre : Géographie "avec le secours de vers artificiels…". Qu'est-ce que cela voulait dire ? En fait, l'auteur, nous propose d'apprendre quelques alexandrins qui forment l'ensemble des connaissances à savoir sur un territoire donné. Un moyen mnémotechnique, en somme…

Exemple : Les cinq gouvernemens au midi de la France.

1 La Provence au midi, tient Aix, Arles, Marseille
Et Toulon dont le port du siècle est la merveille
Orange est séquestré ; le Comtat d'Avignon,
Est au Pape, & comprend Carpentras & Vaison
Toulouse au 2 Languedoc, Narbonne avec Bezières
Montpellier, Nime, Uzes ; au Vivarès, Viviers
Le Pui dans le Velai, Mende, est du Guévaudan
Lodeve, Albi, Privat ; l'intendant, Montauban
L'écarté 3 Roussillon, pour ville à Perpignan
4 Foix, Pamiers ; 5 Le Bearn à Pau son parlement.


Cet ouvrage de géographie est un vrai régal à la lecture et la présentation sous forme de questions/réponses, qui oblige l'auteur à de la concision, est très pédagogique même si certaines affirmations sont amusantes à lire avec le recul ou bien restent quelquefois pertinentes.


- Les habitants de Munster sont naturellement laborieux et guerriers (sic).
- La ville de Berne est petite mais propre (sic).
- De quelle invention les habitants de Maiënce prétendent-ils qu'on leur est redevable ?
- L'Italie a un terroir bon & fertile mais il seroit meilleur si les habitants étoient plus laborieux (sic).
- Quelle pratique singulière observe t-on pour avoir le consentement unanime de tous en Pologne ? On massacre souvent le contredisant afin que tous restent du même avis.
- Thorn est le lieu de naissance du fameux Copernic ; qui a introduit le système de la terre ; laquelle tourne, selon lui, autour du soleil (sic).
- Les polonois, gens d'ordinaire grands, ont une facilité pour apprendre les langues étrangères.
- En Géorgie, les femmes montent à cheval comme des hommes & portent un poignard au côté comme les amazones.
- Les habitants de l'ile de la sonde vont nuds, sont cruels & inhumains mangeant leurs énemis quand ils les prenent à la guerre (sic).


Cette dernière phrase nous montre d'ailleurs à quel point, et pour des raisons d'étymologie, nous avons compliqué l'orthographe de certains mots courants. La troisième raison qui m'a fait aimer cet ouvrage est sa richesse en cartes dépliantes. Comme moi, vous constaterez que la Californie est une île et que le centre de l'Afrique est vide… Cet exemplaire est complet de ses 18 cartes.


Un ouvrage indispensable, donc pour le géographe amateur de livres anciens, même si l'état n'est que passable. Cet ouvrage, dans une belle livrée, est proposé par un confrère à un prix très élevé. C'est un choix. Je resterai très en deçà de son estimation personnelle en raison des défauts du mien. Pierre


BUFFIER (Claude). Géographie universelle, exposée dans les différentes métodes qui peuvent abréger l'étude & faciliter l'usage de cette sience. Avec le secours des vers artificiels. Sixième édition. Revue, corrigée & augmentée des changemens de domination arivés récemment dans les Etats de l'Europe : 2. d'une préface sur la méthode d'aprendre la Géographie . 3. d'une table des noms de pays en françois & en latin. Paris, chez Pierre-François Giffart. 1739. Format in-12. Pleine basane, dos à 5 nerfs. Pièce de titre en lettres dorées sur maroquin cerise. 18 cartes dépliantes, dont 12 sont signés par Desbruslins et trois sont datés 1744 (?) : Monde, Europe, France, Pays-Bas, la Suisse, l'Empire allemand, le Rhin, Italie, Espagne, Angleterre, Scandinavie, Pologne, Empire turc, la Grèce, Asie, Moyen Orient, l'Afrique et l'Amérique. XXIV, 413pp. Sixième édition par Claude Buffier (1661-1737), philosophe et géographe, né en Pologne de parents français. Buffier entra dans la Compagnie de Jésus en 1679. Après avoir enseigné la littérature à Paris, il retourne à Rouen pour prendre une chaire de théologie. De retour à Paris en 1700, il participe de 1701 à 1731 à l'élaboration du Dictionnaire de Trévoux. Défauts de reliure, quelques petites mouillures clairsemées, restaurations amateur. Vendu

mercredi 22 juin 2011

Les confessions de J.J Rousseau dans une édition de grand luxe illustrée par Maurice Leloir..


Est-ce que l'on "offre" encore des livres ? Je ne dis pas "Est-ce que l'on achète encore des livres ? ". Que l'on soit bien d'accord ! Il suffit de voir le nombre de personnes qui lisent dans les transports en commun pour se rendre compte que le commerce du livre n'est pas mort. Je me suis posé cette question car j'ai comparé mon chiffre d'affaire à l'occasion de la fête de pères, que l'on peut considérer comme un événement propice aux cadeaux, à celui de mes deux garçons [l'un travaille à Décathlon et l'autre chez Jules]. Et bien je vais vous dire : C'est vraiment pas brillant de mon côté ;-)). Les papas auraient plus besoin de chemises et d'appareils de musculation que de livres, si vous voulez connaître le résultat de ma pertinente enquête…

C'est pourquoi je vous propose de vous offrir vous-même le magnifique ouvrage en deux volumes in-quarto que je vous présente aujourd'hui ! Il s'agit des Confessions de Jean-Jacques Rousseau dans une édition de luxe. Plutôt que de m'étendre (encore une fois) sur l'auteur, voyons donc si ce n'est pas l'illustrateur, Maurice Leloir, qui est ici à l'origine de la renommée de cette belle édition.


Maurice Leloir (1853 –1940) est issu d’une famille de peintres et d’illustrateurs. Élève de sa mère Héloïse née Colin (1820-1873), dessinatrice pour gravures de mode, puis de son frère Louis (1843-1884) qui fut deuxième prix de Rome en 1861, Maurice eut une carrière calquée sur celle de son frère aîné. La guerre de 1870 l’ayant empêché de poursuivre ses études aux Beaux-Arts, il se tourna vers l’illustration d’ouvrages classiques, ce qui accrut son goût pour le costume ancien et particulièrement celui du XVIIIe siècle. Cet intérêt particulier le poussa à devenir érudit en ce domaine peu étudié pour lui-même à cette époque, sauf par les costumiers de théâtre ou les peintres de genre historique.


C’est justement dans ce milieu artistique qu’évoluaient les Leloir. Ils se lièrent avec des peintres tels qu’Édouard Detaille, Gustave Jacquet, François Flameng, Robert de Cuvillon, Jules Worms, portraitistes et spécialistes du genre historique, et qui avaient rassemblé des costumes anciens dans leur atelier. La carrière de Maurice Leloir se confond avec celle de son frère jusqu’à la mort de ce dernier, que ce soit pour des travaux d’illustrations ou les activités de la Société des aquarellistes français fondée en 1878 dont ils furent membres tous deux, ainsi que leur cousin germain le peintre officiel Édouard Toudouze, auteur des tapisseries du parlement de Bretagne à Rennes.


À cette époque, Leloir est considéré comme le spécialiste infaillible des scènes historiques, et à ce titre il est sollicité par les imprimeurs de travaux publicitaires pour les maisons de nouveautés, épiceries fines et hôtelleries. Jusque dans les années 1920, on trouve sa signature sur les images du Bon Marché, les étiquettes et éventails de La Bénédictine, du vin Calvet, du champagne Clicquot ou du chocolat du Planteur. Par ailleurs, on lui commande alors des ensembles décoratifs, tels que le salon de la villa Tijuca d’Antonin Bordes à Saint-Jean Cap-Ferrat en 1903 avec des scènes de Trianon et Versailles au XVIIIe siècle et, en 1923, des scènes époque Louis XIV au plafond et sur les frises du salon de thé de la marquise de Sévigné boulevard de la Madeleine ; enfin, il est appelé à Hollywood par Douglas Fairbanks en 1928 pour créer les costumes et décors du film Le Masque de fer.


Dans les années 1930, comme ses collections de costume étaient présentées partiellement dans les salles du musée Carnavalet, Maurice Leloir, qui en avait le soin, poursuivait inlassablement sa quête d’un lieu pour son musée, mais sans succès. Celui-ci ne fut d’ailleurs véritablement créé qu’en 1956. Déçu dans son grand projet, Leloir décida de se consacrer à la publication de son Histoire générale du costume illustrée dont seuls les volumes VIII à XII ont paru à partir de 1933 chez Henri Ernst, éditeur d’ouvrages de référence d’art décoratif.


Leloir, qui les voulait avant tout d’un maniement clair, avait choisi un descriptif succinct des pièces de vêtements d’hommes, de femmes, d’enfants et d’accessoires expliqués par des extraits de textes anciens et illustrés de dessins de sa main d’après des documents graphiques ou de véritables costumes, des planches hors-texte complètent le volume. Enfin, il passa les toutes dernières années et même ses derniers jours à terminer les croquis et les textes de son grand Dictionnaire du costume et de ses accessoires, des armes et des étoffes, des origines à nos jours paru après sa mort en 1951 et qui est une référence en la matière.


Mais, je ne vous ai pas parlé d'Auguste Racinet, me direz-vous ! Lui aussi, et un peu avant Leloir, s'est particulièrement intéressé au costumes et aux ornements polychromes. Nous en parlerons demain. Pierre


ROUSSEAU (Jean-Jacques). Les confessions. Paris, Librairie artistique H. Launette et Cie éditeurs, 1889. Deux volumes grand in-4, XXIV-273 pp. et 383 pp, 1782 (livres I-VI), 1789 (livres VII-XII). Reliure demi-chagrin havane à coins, dos à nerfs, titre doré, caissons entourés de filets dorés, tranche supérieure dorée, couverture illustrée conservée. Préface de Jules Claretie. Edition de grand luxe sur papier vélin du Marais. Les dessins de Maurice Leloir ont été gravés à l'eau-forte par Boulard, Ruet, Abot, Champollion, Milius, Mordant et Teyssonnières, le tirage a été réalisé par Ch. Chardon. Des rousseurs clairsemées. Le texte publié par H. Launette a été fidèlement reproduit, à l'exception de quelques erreurs manifestes. Afin de respecter le texte de cette édition, les lacunes n'ont pas été complétées. L'orthographe a été partiellement modernisée, à l'exception de celle des noms propres (ex.: Chambéri, Yverdun, etc.).Vignettes de titre et de chapitre. 96 planches hors texte gravées à l'eau-forte par les premiers artistes (Champollion, Bouillard, Huet). Très belle reliure. Vendu