vendredi 8 juin 2012

Parlez-vous provençal ? S'acò's pas vuei, sara deman...

La Provence, c'est aussi celle de la langue. Dans toute culture, la langue a son importance ; la disparition d'une langue, par exemple, prive un peuple de tout un pan de sa culture et de son identité. C'est pourquoi j'aimerais vous faire découvrir cet aspect de la région qui m'a accueilli à travers quelques ouvrages dans lesquels vous pourrez lire des textes provençaux doublés de leur traduction française. Je dois néanmoins préciser que je ne suis pas provençal de souche, mais provençal de cœur. Je ne parle la langue, bien sûr, mais dans une conversation, je sais de quoi on parle, quand même. Mes enfants ne sont guère plus doués que moi, je dois le dire, mais je peux vous assurer qu'ils disent " rose " avec ce "O " ouvert si typique des spots publicitaires vantant les mérites d'une lessive parfumée à la lavande !


Ici, les gens ont plaisir à pratiquer, à l'occasion, la « lengo nostro », tout autant que de pouvoir accéder à des textes anciens mêlant français et vieux provençal. Mais attention ! Il ne s'agit absolument pas d'un repli culturel, bien au contraire, et encore moins un repli identitaire. Sur les rives de Méditerranée, comme ailleurs, l'identité est souvent faite d'éléments multiples (costumes, chants, mobilier, etc…) qui sont une formidable richesse.


Le provençal est né du latin pratiqué dans la région à la fin de l'époque romaine, avec sans doute des éléments issus de ses origines autochtones et des apports successifs liés à son histoire. C'est une langue à part entière, qui a été au Moyen-Age, l'une des langues littéraires des pays d'oc. Les choses sont un peu plus confuses aujourd'hui, car certains étendent l'appellation d' « occitan » à toutes les langues et tous les dialectes de langue d'oc. Or, cette langue se subdivise en plusieurs dialectes : le Rhodanien dans la vallée du Rhône ; le Maritime dans la majeure partie des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse et dans le Var ; le Gavot dans les Alpes ; et le franco-provençal dans la Drôme.


Bien que le dialecte le plus répandu ait été historiquement le Maritime, c'est le Rhodanien qui a été choisi au XIXe siècle comme dialecte de référence par les Félibres. Réalisant que la langue était menacée de disparaître totalement, ces félibres réhabilitèrent le Provençal et de nombreuses œuvres furent éditées. L'expérience, du point de vue littéraire, connaîtra à vrai dire des hauts et des bas. Ce seront ensuite les armées d'instituteurs de la fin du XIXe siècle et du début du XXe, certes bien intentionnés, qui participeront, sans le réaliser, à l'éradication de la langue, comme dans de nombreuses régions de France.


Récemment, la conscience de la portée culturelle du provençal dans l'identité régionale a favorisé son retour en grâce et la levée de certaines interdictions. Le provençal renaît aujourd'hui à la fois dans l'oralité et dans l'écriture ; les associations félibréennes n'en sont plus le seul refuge, puisqu'il est à nouveau enseigné dans certaines écoles pour ceux qui le souhaitent.


Les libraires d'ouvrages anciens, gardiens du patrimoine, sont souvent associés à ce renouveau. J'apporte ici ma petite pierre à l'édifice avec, aujourd'hui, quelques ouvrages fort bien reliés dont la provenance, attestée par l'ex-libris, est un gage de qualité de l'édition. Pierre


PANSIER (Dr Pierre). Li memori de Tartarin. Avignoun, Enco de J. Roumanille, Libraire, 1920, format in-12. Reliure contemporaine demi-basane bleue, dos à 4 nerfs, titre en lettres dorées, page de garde en papier coloré, couverture conservée. xxv, 245 pp + table. Ex-libris. Pas de rousseurs. Edition originale rare. Tirage à 300 exemplaires numérotés, celui-ci N° 293. Texte en Provençal, traduction Française : Madame Fernande Pansier. Pierre PANSIER, né à Carpentras en 1864 est mort à Avignon en 1934. Docteur en médecine, membre de l'Académie de Vaucluse et administrateur de la fondation Calvet, il écrivit de nombreux ouvrages sur Avignon, Carpentras et le Vaucluse. Vendu

ROUMANILLE. J. Contes provençaux, texte provençal et traduction française. Sixième édition. Avignon, bibliothèque régionaliste, 1927. Format in-8. Reliure contemporaine demi-basane verte, dos à 4 nerfs, titre en lettres dorées, page de garde en papier coloré, couverture conservée. xi, 129 pp + table. Portrait frontispice. Vendu

GRAS (Félix). Toloza. Geste provençale avec la traduction française littérale. Paris, Fischbacher éditeur, 1882. Edition originale. Reliure contemporaine demi-basane verte, dos à 4 nerfs, titre en lettres dorées, page de garde en papier coloré, couverture conservée. 501pp. Vendu

COLLECTIF. Lou Cansounié de prouveço.Quatrenco édicioun. Saint Félicien en Vivarais, Edition de pigeonnier, 1941. Reliure contemporaine demi-basane bleue, dos à 4 nerfs, titre en lettres dorées, page de garde en papier coloré, couverture conservée. 125 pp avec partitions. 95 € + port

MISTRAL. Mireille. Poème provençal traduit en vers français par E. Rigaud avec le texte en regard. Deuxième édition revue et corrigée. Paris, librairie hachette 1881. Format in-12. Reliure demi-chagrin cerise à coins, dos à cinq nerfs avec lettres dorées, tranche supérieure dorée. Xi, 511pp. Des rousseurs. Edition française versifiée contrairement à la traduction de Mistral. Vendu

3 commentaires:

calamar a dit…

Pierre, le franco-provençal est (était...) un peu plus répandu que çà : tout le sud du Jura, tout l'Ain, la Bresse, sont encore dans son aire.
C'est d'ailleurs à cette influence du Sud qu'on attribue les toits plats, couverts de tuiles romaines, si présents dans le Revermont, alors que ce choix est fort discutable en ces contrées fréquemment enneigées.

pascalmarty a dit…

Je vais même aller un peu plus loin que calamar : le francoprovençal (en un seul mot…) forme le troisième groupe de langues autrefois parlées en France et ce n'est ni une langue d'oc ni une langue d'oïl. Il rentre en France un peu en dessous de Besançon et un peu au dessus de Briançon, laisse Valence un poil au sud-ouest et va mourir en pointe à Chateldon, une petite commune à quelques kilomètres au nord de chez moi (et donc au sud à peine est de Vichy). Ça fait quand même un peu loin pour profiter des cigales…
(Mais je me dois de préciser qu'en l'occurrence ma science linguistique doit tout à Henriette Walter…)

Pierre a dit…

A la fois surpris et enchanté de ces cousinages lointains, Calamar et Pascal. Les celtes ne se sont pas encore manifestés mais il y a toute chance pour que le breton ne soit qu'une variation locale de la langue d'Oc ;-)) Pierre