vendredi 30 octobre 2009

Anthologie d'épigrammes funéraires, d'épigraphes mortuaires et d'épitaphes de la même couleur…


Il est des matins où l'on ne se sent pas très bien. ("faites-vous sentir par un autre" dirait Pierre Dac). Le hasard vous fait tomber, au réveil, sur le dernier chapitre des "Misérables"; tout le monde connaît l'intrigue du roman mais il faut attendre la dernière page de l'œuvre pour entendre souffler le vent du vrai génie romantique * ; et l'on découvre médusé que l'on n'a absolument pas pensé à mentionner dans son testament la phrase profonde qui, à la manière du frontispice d'un livre, devra orner notre pierre tombale, mettre en valeur notre absence et nous ouvrir les portes d'une postérité méritée.

* " Il y a, au cimetière du Père Lachaise, aux environs de la fosse commune, loin du quartier élégant de cette ville des sépulcres, loin de tous ces tombeaux de fantaisie qui étalent en présence de l'éternité les hideuses modes de la mort, dans un angle désert, le long d'un vieux mur, sous un grand if auquel grimpent les liserons, parmi les chiendents et les mousses, une pierre. Cette pierre (…) est toute nue. On n'y lit aucun nom. Seulement, voilà de cela quelques années déjà, une main y a écrit au crayon ces quatre vers."

Il dort. 
Quoique le sort lui fut bien étrange,
Il vivait. 
Il mourut quand il n'eut plus son ange… Victor Hugo


Passe encore d'oublier de prononcer une sentence mémorable juste avant de mourir ou pis est de prononcer, avant le grand saut, une sentence moyenne ou hors sujet que l'on regrettera ensuite ! Mais laisser un graveur latiniste, libre de toute contrainte, placer devant vos yeux ébahis un "De profundis" tronqué pour cause de rigueur budgétaire alors que vous aviez des choses beaucoup plus drôles à proposer, équivaut vraiment à une faute de goût impardonnable ! Je vous livre donc quelques idées dont les deux premières sont contenues dans le livre que je propose à la vente si vous êtes en mal d'inspiration. Mais d'où vient donc la dernière épitaphe proposée ? Et quelle serait celle que vous aimeriez voir au fronton de votre dernière demeure. A vos claviers !


Pour l'esclave : X, tel était l'homme que voici, jadis quand il vivait ; mais à présent qu'il est bien mort, il a même pouvoir que le puissant Darius.
Pour l'atrabilaire : Même mort, X est hargneux. Et toi, portier de Pluton, tremble, Cerbère, qu'il ne te morde !
Et pour nous tous : Ni meilleur, ni pire… Désolé d'avoir cassé l'ambiance. Pierre


ROQUES (D). Tombeaux grecs. Anthologie d'épigrammes. Ed Gallimard ; le promeneur. 1995, petit in-8 de 203pp à la couverture rempliée. 12 € +port
HUGO (V). Les Misérables. Reliure éditeur d'origine indéterminée. 2 gros tomes en demi-basane d'époque sous forme d'une édition complète d'un recueil de fascicules de feuilleton. Etat passable mais tous les mots du roman semblent y être. Quelques feuillets mobiles. Malgré tout, version attachante. 25 € + port

mercredi 28 octobre 2009

Histoire du costume d'Arles. Odile et Magali Pascal


Les étagères d'une librairie ancienne peuvent accueillir des ouvrages récents s'ils sont de grande qualité, s'ils abordent un thème qui a un rapport avec notre patrimoine, s'ils appartiennent à la catégorie des livres rares ou s'ils peuvent contribuer à fournir un chiffre d'affaire conséquent à son propriétaire.

La trilogie retraçant l'histoire du costume d'Arles par Mesdames Odile et Magali PASCAL fait partie de ces ouvrages qui regroupent, à la fois, ces quatre qualités essentielles. Je vais essayer de vous les présenter un par un, en sachant que je suis un peu étranger à ce domaine.

Commençons par le dernier tome qui retrace l'histoire du costume au temps des crinolines et abordons un peu d'histoire de France. La révolution passée, c'est le Romantisme – entre ouverture et repli nostalgique- qui va influencer les costumes et avec eux, ceux de l'ancien régime. Il vont alors donner les plus inventifs et les plus raffinés que l'on ait connu depuis leur création.


Le voyage à Arles de Napoléon III et de l'Impératrice Eugénie, le développement industriel et le progrès technique, seront comme le catalyseur de cette évolution. L'apparition de la machine à coudre, des grands magasins et des journaux de mode fera le reste en influençant, modifiant et faisant évoluer la tenue des Arlésiennes.

Coiffes et coiffures, rubans, jupes, fichus, châles et pèlerines vont être autant de témoins de ce 19eme siècle. Pour l'étude de cette période, malgré les débuts de la photographie, ce seront les peintres qui seront les meilleurs alliés de l'historienne.


Sous leur pinceau apparaîtront la jeune grisette aguichante des bords du Rhône (une grisette mignonne est une jeune personne…pareille à "Véronique" de Mr Messager !), la bourgeoise élégante, la jeune Arlésienne adoulentido aux Alyscamps, la femme du quartier de la Roquette ou la très jeune fille parée comme une châsse et portant diamants et bijoux somptueux.

Ils sont ici restitués, classés et catalogués par les auteurs qui possèdent la plus belle collection de costumes et d'ornements de la région. Il faut aussi mentionner que les photographies ont été prises par Mme Pascal elle-même et que les modèles (Ahrrr ! de toute beauté) sont les enfants et petits enfants de la famille.


Ce livre est vraiment exceptionnel, je vous l'assure. Il conviendra parfaitement pour un cadeau de Noël que vous vous ferez où que l'on vous offrira sans nul doute. Pierre

PASCAL (Odile et Magali). Histoire du costume d'Arles. Tome III. Le temps des Crinolines. 1840 – 1870. Ed CRC, grand In-4, 320 pp, percaline noire avec jaquette illustrée. 90€ + port

lundi 26 octobre 2009

Causerie du lundi de Philippe Gandillet : De l'intérêt de lire l'Ancien Testament pour aiguiser la Foi.


Ce matin, alors que je m'activais à ôter la poussière déposée sur les rayonnages de la librairie de Pierre, le facteur est entré avec un courrier qui m'était destiné. Quel heureux hasard ! Je vous le livre tel quel. Manifestement, ce brûlot a été écrit par une personne sortant d'une longue nuit de méditation et qui pense avoir trouvé en moi la personne la plus apte à répondre aux incertitudes de la Foi, aux dangereux flottements existant sur ses bases et ses principes et au scepticisme qui peut en découler. Plutôt que de répondre point par point aux doutes de JM (si j'avais écrit " Jean-Michel " tout le monde l'aurait reconnu et je ne le veux point), j'ai préféré vous proposer à la vente un ouvrage qui remplacera avantageusement mes commentaires et c'est toujours ça de moins à faire, n'est-ce pas ?


" Cher Monsieur Gandillet,

Faut-il mettre un livre Saint dans les mains d’un agnostique, ou la parole de Dieu supporte-t-elle l’ironie mondaine ? Dieu est un farceur. Pour ceux qui n’auraient pas réussi à puiser suffisamment d’éléments dans leur quotidien pour s’en persuader il existe ce livre, cette farce. Le Deuteronome est le cinquième livre du Pentateuque. Étymologiquement, c’est le livre de la deuxième loi, car il y est repris, résumé et précisé ce qui a déjà été exprimé dans les quatre précédents livres. Dieu s’était aperçu que ses premiers préceptes n’étaient pas aussi bien suivis qu’il l’eût désiré, et il a ressenti le besoin d’en rajouter une couche. Personnellement, mais cela n’engage que moi, chaque fois que je veux me payer une bonne tranche de sérénité joviale j’en parcours un chapitre.

D’abord, Il ne l’a pas écrit mais simplement dicté. Voilà un point important, car pour Lui cela aurait été beaucoup plus facile de l’écrire en lettres de feu dans le ciel ou en lettres de roc dans le sable, d’autant que ce jour-là, sa gorge lui faisant un peu mal, il peinait à articuler. Mais il voulait que ces mots fussent écrits par les hommes pour les hommes. On ne sait jamais, en cas de réclamation il pourrait toujours se retrancher derrière un « Mais non, je n’ai pas dit ça !... »

Il peut paraître bizarre que dans cette œuvre destinée à instruire universellement et intemporellement il fut ressenti le besoin d’user continûment d’apophtegmes en rapport avec des coutumes précises, fixées dans le temps et dans l’espace, laissant aux exégètes le soin d’en démêler la portée symbolique et permettant par là même toutes les interprétations. On peut trouver de nos jours tout et n’importe quoi dans ces phrases qui signifiaient alors réellement quelque chose : -« Lorsque vous bâtirez une maison neuve, vous ferez un petit mur tout autour du dôme », ou –« Vous mettrez des franges aux quatre coins du manteau que vous portez », ou encore –« Vous n’userez point d’un habillement qui soit tissu de laine & de lin ». Il y a danger à être si précis, danger d’être trop bien compris à une époque… pour l’être si mal à une autre. Ce genre d’incertitude conduisit lors de la découverte du Nouveau Monde à être persuadé qu’aucun homme ne pouvait y habiter puisque aucun apôtre n’avait pu matériellement s’y rendre.

Le rôle de la femme dans la société est la cerise sur le gâteau. On se délecte des contradictions, et on apprécie le chemin qu’elles ont parcouru depuis lors. La femme à l’époque se contaminait sans remède possible simplement en ayant été au contact des fautes des autres ; Elle était lapidée pour une faute qui pour l’homme se réparait en subissant le fouet et une amende de cent sicles d’argent.

Les commentaires parfois étonnent, mais vite rassurent : « On ne peut douter de la sagesse de cette ordonnance puisqu’elle est de Dieu ». Lapider est donc juste si l’homme estime que la femme a failli, « à condition toutefois que les maris aiment leurs femmes comme Jésus-Christ a aimé l’Eglise ». Elle doit aussi savoir se débattre : « Si après qu’un homme a été fiancé avec une fille vierge, un homme la trouve dans la ville & la corrompt, vous les ferez sortir tous deux à la porte de la ville, & ils seront tous deux lapidés ; la fille, parce qu’étant dans la ville, elle n’a pas crié ; & l’homme, parce qu’il a humilié la femme de son prochain ; & vous ôterez le mal du milieu de vous ». Non mais sans blague !

Ce livre m’a aussi appris qu’on abusait de l’esperluette au dix-septième siècle, jusqu’à écrire « &c. » Edité à Mons, chez Gaspard Miheot, à l’enseigne des trois Vertus en 1685, qui fut une année riche en évènements puisque, mise à part la révocation de l’Edit de Nantes, elle vit l’exclusion d’Antoine Furetière de l’Académie Française au prétexte de concurrence déloyale et la publication du Code Noir ou Ordonnance coloniale dans lequel l’esclave est officiellement considéré « bien meuble ». Quelque peu rousselé et rogné ainsi que marqué de taches d’humidité il n’en reste pas moins excellemment lisible, et j’y tiens en outre par ce qu’il appartient à la série de ce que mon père appelait « les livres du grand-père », sans que je me souvienne de quel grand-père il voulait précisément parler… " Merci.  JM.


Avoir Foi en Dieu ou ne pas l'avoir. Avoir foi aux écrits bibliques ou ne pas l'avoir. Peut-être les deux choses ne sont-elles pas antinomiques ? Philippe Gandillet


Maitre de SACY (LE). (Sieur de Royaumont, Prieur de Sombreval) L’histoire du vieux et du nouveau testament, représentée avec des figures et des explications édifiantes, tirées des Saints Pères, pour régler les moeurs dans toutes sortes de conditions. A Paris, chez Etienne Michel David, 1724. In/4, reliure plein veau marbré, dos à 5 nerfs à caissons dorés et pièce de titre noire indiquée " figures de la bible", 11 ff. avertissement, table et approbation, 552 p., Bandeaux, lettrines historiées et culs de lampes, larges planches in-texte sur chaque page. Mors supérieur restauré, petites usures aux coins. Quelques restaurations (anciennes) de page dans le premier tiers de l'ouvrage. L'ensemble est en bon état sans mouillures. Quelques annotations. Vendu

samedi 24 octobre 2009

Une nouvelle rubrique arrive sur le blogue ! VOS QUESTIONS :

Comme il existait, par le passé, un "Nicolas le jardinier" qui répondait aux demandes des auditeurs d'une chaîne de radio à propos de problèmes rencontrés en botanique, j'ai pensé qu'un "Pierre le bouquiniste" pourrait vous aider à résoudre les petits problèmes que vous abordez en bibliophilie.

Vous savez que je ne suis pas un puits de science et que mon approche commerciale de la librairie ancienne nécessite plus un vernis qu'une érudition sans faille, si, si… J'ai, par contre, eu la chance de croiser, dans et en marge de ma passion, des personnes habiles à résoudre les questions que vous vous poserez.

Sans établir, dès maintenant, une liste exhaustive des intervenants qui m'aideront dans vos questions, je peux vous indiquer que mes sapiteurs seront dévoués, fiables et désintéressés contrairement à moi qui cherche à vous vendre mes livres anciens par les moyens les plus éhontés.

Un exemple ? Alain, bibliophile amateur, a acheté un beau petit bouquin, 10 €, sur un vide-grenier de son village.


La page de titre étant établie dans une langue qui lui est étrangère [blondiflaviiforviviensisderomatrivmphantelibride/cem,priscorum scriptorum lectoribus utilissimi, adtotiusqueromanaeantiquitatiscognitionempernecessarii. ad nauseam… ] il voudrait savoir si cet opuscule est un "Chopin" d'autant qu'il est recouvert par un cuir blond dans lequel est intercalé une planche de bois…?

QUESTION : Que signifie la page de titre ? Alain a-t-il fait une bonne affaire ?

REPONSE : De Philippe Gandillet contacté pour l'occasion :

A brûle pourpoint, je vous traduirais le début de cette page de titre en latin par : " Les dix livres de Flavio Blondo au sujet de la Rome triomphante, très utiles et très nécessaires pour la connaissance de l'antiquité romaine. Sic…" Cet ouvrage du 16eme siècle semble recouvert, à la façon des reliures baloises, par une peau de truie estampée dans laquelle est intercalé un bois. En l'absence d'origine sur sa provenance, ce livre ne vaut rien et je vous propose de me l'envoyer illico en échange d'une de mes œuvres que je me ferai un plaisir de vous dédicacer. Votre dévoué. PG

Vous pouvez envoyer vos questions sur mon adresse mail. Une réponse vous sera présentée sous forme d'article. La maison ne reprend, ni n'échange ces articles si ils ont été utilisés par le lecteur. Pierre

vendredi 23 octobre 2009

Légendes et chants Esquimaux du Groenland.




Dans le commerce d'une librairie généraliste comme la mienne, les auteurs classiques français, le régionalisme local et les ouvrages illustrés (l'ensemble dans des éditions plus ou moins luxueuses) représentent l'essentiel de mon chiffre d'affaire moyen journalier (C.A.M.J). Si ce C.A.M.J est suffisant pour vivre modestement, il me faut quand même compter avec une ou deux "thématiques" pointues pour assurer le train de vie indécent que je mène…

Ces "niches thématiques" contiennent souvent des ouvrages tellement improbables que je ne les aurais jamais achetés si le monde n'était pas peuplé de monomaniaques…Une des spécialités de la boutique consiste, par exemple, à proposer tout ou partie des ouvrages parus entre 1928 et 1930 sur le continent Arctique.


Le livre que je vais vous présenter maintenant est l'exemple même d'une niche faite pour un bibliophile intéressé à la fois par les voyages et en particulier par les voyages au Groenland, passionné par l'ethnologie et en particulier par les Esquimaux, captivé par les légendes et en particulier les légendes polaires et ému par les chants et en particulier ceux qui sont présentés avec des paroles fournies sans partition, sans clef et sans indication qui puisse aider un mélomane!


Il doit vraisemblablement exister une petite dizaine d'exemplaires en France de ce type de bibliophile. Il n'empêche ! S'il rentre dans ma boutique, il sera comblé !

C'est pour cela que j'ai fait ce métier.

En fait, j'ai feuilleté ce livre et je l'ai trouvé émouvant. Il m'a semblé que les légendes se ressemblaient beaucoup d'un continent à l'autre. Ici la femme se transforme en phoque pour tromper la vigilance de son mari. Il est évident que la même légende bêtement transposée au Kenya donne peu de chance à un phoque de passer inaperçu sur les hauts plateaux du pays…


C'est un bon livre, bien documenté. Le Groenland n'était pas encore, en 1929, ce margouillis (nom masculin tiré du verbe margouiller / salir : lieu plein de boue et d'ordure et de l'oubli par JPP. Merci) que le monde moderne a conchié (souillé avec des excréments / sali, tiré de l'anonymat par Bertrand. Merci). Pierre

THALBITZER (W) Légendes et chants Esquimaux du Groenland. Ernest LEROUX éditeur. Paris 1929 broché 190 pp, coll. contes et chansons populaires .Broché petit in-8. Couverture usagée et traces d'annotations au crayon. Intérieur en bel état. Vendu ou perdu dans un carton...

mercredi 21 octobre 2009

Buffon : Son histoire et son "Histoire Naturelle"...


Philippe Gandillet a laissé mon "Buffon de la jeunesse" sans les attributs qui pourraient provoquer un achat impulsif. Je rappelle aux lecteurs qui l'auraient oublié que ce blogue est avant tout un "outil marchand". C'est pourquoi j'en profite pour vous proposer quelques autres "Buffon" dans des formats et des prix adaptés à toutes les bourses et vous présente maintenant l'auteur que je considère comme un des personnages qui ont le plus marqué le dix-huitième siècle.

Georges-Louis Leclerc de Buffon est né à Montbard, en Bourgogne, en 1707 et est décédé juste avant la révolution française. Pour le situer parmi les grands hommes de son temps, nous pouvons préciser qu'il était de cinq ans plus âgé que Jean-Jacques Rousseau, qu'il avait treize ans de moins que Voltaire et dix-huit de moins que Montesquieu. Naturaliste, Intendant du Jardin du Roi, Buffon reste célèbre par son œuvre marquante, " L'Histoire naturelle " qui traite de tout ce qui touche au monde, minéral et surtout animal. Il fit ses études au collège de Dijon. Sa jeunesse parait avoir été assez violente et fougueuse. La géométrie l'avait passionné dès le collège, c'est peut-être pourquoi le seul ornement qu'il n'acceptera jamais dans son bureau sera un portrait de Newton. Jeune, il se lia avec le gouverneur d'un jeune seigneur anglais qui séjournait à Dijon, et cette liaison lui fit faire un voyage en Italie, puis un autre voyage en Angleterre. Ce sont les seuls qu'il n'ait jamais faits ce qui en dit long sur sa capacité d'imagination qui sera développée et critiquée dans son "Histoire naturelle".


Nommé en 1739 intendant du Jardin-du-Roi, et associé de l'Académie des Sciences en cette même année, Buffon qui n'était pas encore connu à cette époque conçut le projet de tirer de sa position au Jardin-du-Roi un grand parti et de devenir l'historien de la nature. Il avait trente-deux ans. Il publia, en 1749, les trois premiers volumes in-4° de son "Histoire naturelle". Ce fut un des événements du siècle ! Depuis ce moment, les tomes de cette Histoire monumentale continuèrent de se publier régulièrement et successivement au nombre de trente-six, jusqu'à sa mort. Buffon qui fut admiré pour son travail de description fut quelquefois brocardé pour son style ampoulé. Voltaire et d'Alembert s'en donnaient à cœur joie. Ils n'aimaient ni sa personne ni ses talents et l'appelaient "le grand phrasier". C'est peut-être à cause de ceci qu'il fut reçu à l’Académie française en 1753 où il y prononça un "Discours sur le style" resté célèbre.


Buffon a embrassé toutes les facettes de l'histoire naturelle avec beaucoup de justesse. Il est le seul de son temps à oser évoquer la naissance de l’univers et de la terre, et ce à l'encontre les dogmes de l’Église. Il place aussi délibérément l’homme au cœur du règne animal, et même s’il convient qu’il ne faut pas s’arrêter à l’aspect extérieur, l’homme ayant une âme douée de raison qui le place au sommet de la création, il affirme que l’homme est semblable aux animaux par sa physiologie. S'il a, comme nous l'avons mentionné précédemment, peu voyagé et s'il n’a pas pu voir toutes les espèces dont il parle, il a disposé de comptes rendus de zoologistes et de voyageurs qui lui ont permis de développer pour chaque animal une fiche détaillée et de faire des remarques pertinentes sur son existence.


C'est pourquoi Buffon est très apprécié chez les vétérinaires et aussi chez les libraires qui leurs fournissent ses ouvrages... Je cherche d'ailleurs un client fortuné et compréhensif désirant s'offrir les œuvres complètes de "Buffon" en 36 volumes in-4 avec les oiseaux de "Martinet", dans une belle reliure. Je précise"compréhensif" car je souhaiterais garder l'ouvrage quelques temps dans ma boutique avant de le livrer à son propriétaire… Pierre
- BUFFON :Le Buffon des familles. Histoire et description des animaux extraites des oeuvres de Buffon et de Lacepède. Garnier, sd. (vers 1870) in-8 demi-chagrin, dos a nerfs, caissons ornes, filets dores, filets a froid sur les plats, tranches dorées, III- 645 pp. 450 gravures en noir dont 16 hors-texte d'après les dessins de Freeman & Massieu, etc. Rousseurs eparses. Bons exemplaires. Ou bien, le même sous une livrée de percaline rouge, or et noir. Entre 65 et 105 € port compris
- BUFFON. Oeuvres choisies. Précédées d'une notice sur sa vie et ses ouvrages par D. Saucie. Tours, Ad Mame et Cie, 1847. In-8, 392 pp. Frontispice et nombreuses illustrations dans le texte par M. Werner. Reliure d'époque en pleine toile vert olive ornée de motifs de végétaux et d'animaux dores, titre dore, tranches dorées. D'autres livrées sont présentées. Entre 35 et 45 € port compris

lundi 19 octobre 2009

Causerie du lundi de Philippe Gandillet : Les limites de l'ebook...


Il faut vivre avec son temps.

Ce matin, après avoir écouté la litanie des mauvaises nouvelles de "France-Infos", je suis parti tenir la boutique de Pierre en me promettant de numériser le livre qu'il avait, sans nul doute, préparé à mon intention pour en faire un objet moderne, flatteur et si possible vendeur. L'ebook devenant, aux dires des journalistes, incontournable à partir de demain, il me suffirait de copier l'ouvrage de Pierre pour que la vente se fasse. Quel coup de pub pour la librairie ! Par moment, je me demande comment tournerait la boutique sans moi !

Un petit rappel des faits : Le livre imprimé a cinq siècles et demi. Le livre numérique a bientôt quarante ans. Le livre numérisé de la librairie ancienne de Tarascon commence aujourd'hui. Vous n'aurez plus besoin de courir désespérément après le livre que vous désirez, il est enfin à votre portée, y compris pour ceux qui vivent en rase campagne, qui travaillent à domicile, qui sont cloués dans un lit ou qui font les trois choses à la fois. Voici un aperçu de la démarche que j'ai utilisée.

- Je me suis tout d'abord assuré que le livre était libre de droits. J'ai donc téléphoné à tous les ayant droits pour obtenir leur accord plus ou moins gracieux. Mon titre et ma réputation ont facilité la chose, je dois le reconnaître.

- Je suis ensuite allé acheter un scanner à "Intermarché, ainsi qu'un logiciel de reconnaissance optique et un correcteur analogique au format HTLM. Vous pouvez demander "Raymond" au rayon "poissonnerie" qui vous aiguillera sur le matériel le plus performant si la responsable de l'électroménager est absente.


- Il vous faut maintenant préparer le livre. Malheureusement, je n'ai eu de bons résultats qu'en coupant le dos du livre, ce qui sépare toutes les pages et permet de les placer bien à plat sur la platine de lecture de l'analyseur. Bien sûr, ne brisez pas le livre s'il ne vous appartient pas! Pierre avait la chance de posséder le "Buffon de la jeunesse" en deux exemplaires et il n'en proposait qu'un seul à la vente… Il fallait saisir cette opportunité.

- Le balayage numérique des feuilles ne pose pas de gros problèmes. Il vous faut appuyer sur la touche "on" du scanner. Contrairement aux apparences, c'est une des étapes les plus rapides et agréables, alors profitez-en! En gros, vous démarrez le logiciel et le balayeur, et vous placez les pages manuellement sur la platine de lecture, les unes après les autres. Arrêtez à toutes les 50 pages, et sauvegardez le fichier, au cas où votre logiciel «planterait» (ça m'est arrivé plusieurs fois). Nommez les fichiers selon les pages qu'ils contiennent, c'est plus sûr !

- A la fin de cette étape, certaines personnes crient victoire et prétendent que ce livre vient d'être «numérisé». Je trouve que c'est de l'inflation verbale ! Ce livre vient d'être photographié, pas vraiment numérisé. Un livre vraiment numérisé exige beaucoup plus de travail et c'est maintenant l'étape intermédiaire de la reconnaissance optique des caractères que nous allons aborder…


- C'est peut-être la partie la plus complexe de toute cette démarche, mais heureusement cette complexité est cachée à l'intérieur du logiciel de ROC. Vous n'avez qu'à pousser sur un bouton, et l'ordinateur fait (presque!) tout le reste. Le logiciel va vous poser des questions quand il sera incapable de reconnaître certains mots. Je n'ai jamais vu de logiciel de ROC qui évitait toutes les erreurs. D'ailleurs, c'est presque théoriquement impossible aussi je vous conseille, comme moi, d'utiliser la correction "monastique" qui consiste à lire tous les paragraphes à la suite, mots par mots.

- L'encodage vous paraîtra ensuite d'une facilité déconcertante. Le mieux est de le sauvegarder en tant que simple fichier texte ASCII, et encoder le HTML ensuite. Vous suivez ? Délimitez un paragraphe, rajoutez le formatage à ce paragraphe, ajoutez les notes de bas de page et les hyperliens au format JPG ou LPTE. Refaites ou récupérez les images, les photos et les dessins. Formatez le code HTML. Faites la correction «monastique» finale et le tour est joué ! On peut lancer une macro qui fait la justification. Ce formatage du code ne paraît pas lorsqu'on lit la page avec un fureteur web, mais c'est plus courtois pour les autres programmeurs qui pourront avoir à modifier votre HTML. Non seulement vous faites cette correction, mais idéalement, une autre personne doit vous faire une deuxième révision de votre travail. Je comptais bien sur Pierre pour m'aider mais vous savez comme moi qu'il est un peu hermétique au progrès…

Votre humble et dévoué. Philippe Gandillet


BLANCHARD P. Le Buffon de la jeunesse. Zoologie. Botanique. Minéralogie. Revu, corrigé et augmenté par M. CHENU. Illustré de plus de 400 sujets d'histoire naturelle dessinés par nos meilleurs artistes. Paris, Morizot, 1859. Grand in-8 demi-chagrin prune, dos à nerfs et à caissons, tranches dorées, VIII-592 pages, 90 planches hors-texte. Magnifique exemplaire en parfait état avec peu de rousseurs, une odeur de papier agréable et un touché velouté. 140 € port compris.

BLANCH%RD P. Le Bµffon de la jeusess z#ologie. Botanique. Minér$logie. Revu, corrig$ et augmen£é par M. CHENU. Illustré de plus de 400 sujets d'his%oire naturelle dessinos par nos meillàurs artistes. Paris, Morizot, 1859. Envoye exemp@ ire numérisé après prélè§ement en ligne de 229 € + lecteur Kindle de 179 € + abonnement 29 € + TVA 4,5%.

samedi 17 octobre 2009

Jean de la Fontaine – Psyché - Louis Jou. Une approche de la perfection dans l'édition…


Quatre amis dont la connaissance avait commencé par le parnasse (le mont Parnasse est, dans la mythologie grecque, le lieu de résidence d'Apollon et des neuf Muses ; l'usage est de désigner par ce mot une assemblée de poètes) lièrent une espèce de société que j'appellerais Académie si leur nombre avait été plus grand et qu'ils eussent autant regardé les muses que le plaisir (ceux-là étaient peut-être plus attirés par le plaisir ?). La première chose qu'ils firent fut de bannir d'entre eux les conversations réglées et tout ce qui sent la conférence académique (voilà, nous sommes fixés ; c'est bien une bande de potes !). Quand ils se trouvaient ensemble et qu'ils avaient bien parlé de leurs divertissements (le jeu, les femmes, les spectacles et la table), si le hasard les poussait sur quelque point de science ou de belles lettres, ils profitaient de l'occasion ; c'était toutefois sans s'arrêter trop longtemps à une même matière, voltigeant de propos en autre, comme des abeilles qui rencontreraient en leur chemin diverses sortes de fleurs.


L'envie, la malignité, ni la cabale n'avaient de voix parmi eux (à cette époque, il n'y avait pas de fossé entre les littéraires et les scientifiques ; l'esprit était un tout). Ils adoraient les ouvrages des anciens, ne refusaient point à ceux des modernes les louanges qui leur sont dues (comme à la boutique), parlaient des leurs avec modestie, et se donnaient des avis sincères lorsque quelqu'un d'eux tombait dans la maladie du siècle, et faisait un livre, ce qui arrivait rarement. Polyphile y était le plus sujet. Les aventures de Psyché lui avaient semblé fort propres pour être contées agréablement…


Voilà comment débute ce roman de Jean de La Fontaine (1621-1695) que les étudiants d'aujourd'hui imaginent plus en moraliste dilettante qu'en poète. Quatre amis, Acante, Ariste, Gélaste et Polyphile (Molière, Boileau et Racine et la Fontaine) se promènent dans le parc de Versailles, alors en plein aménagement, et l'auteur nous conte la vie aventureuse et coquine de Psyché. Ses amis ponctuent ce récit érotique tiré d'Apulée par des propos qui se résumeraient dans la bouche de quelques ados rebelles par "whaaa, la meuf !".

Pour l'histoire de Psyché, je vous renvoie à l'ouvrage mais s'il fallait résumer, nous pourrions dire que la beauté chez la femme engendre de légitimes jalousies chez ses congénères et que la vie d'un sexe-symbole n'est pas un long fleuve tranquille. La scène du baiser a été reprise plusieurs fois. Par Charles Perrault en 1697, par les Frères Grimm en 1812 et revisitée dans la "Belle au bois dormant" par Wald Disney avec succès dans les années 1960…




LA FONTAINE (Jean de). JOU (Louis). Les amours de Psyché et de Cupidon. Paris, Les Livres de Louis Jou, achevé d'imprimé le lundi 27 octobre 1930. Un volume in-4. Reliure parchemin à grands coins encadrant un joli papier façon métallisé, signée LL&RM en queue de l'étui et L. Lévêque en page de garde. Dos lisse avec pièce de titre dorée. Contreplat recouvert comme la page de garde d'un papier façon métallisé vieil or rappelant exactement la couverture de l'étui. Seule tranche supérieure rognée, livré avec étui bordé de parchemin. Couverture illustrée polychrome. Titre sur fond de riche composition dorée dans un double encadrement vermillon, numéro de l'exemplaire (147) sur fond décoratif vermillon, faux-titre décoré noir et vermillon, A Madame la Duchesse de Bouillon en caractères calligraphiés imprimé en noir sur fond de grand blason à ses armes vert amande or et argent entouré d'un grand décor de rinceaux vert, grand colophon décoratif gravé, imprimé en noir, vermillon, marron, noisette et or. Justification du tirage, marque de Louis Jou. [2ff bl], [7ff], xvii, 187, [7ff], [2ff bl]. Couverture et dos conservés. Exemplaire 147 des 160 sur vergé Montval écru à la forme. Très bel exemplaire dans une reliure signée. 2200 € + port


« Tout l'univers obéit à l'Amour ; Aimez, aimez, tout le reste n'est rien .» Psyché et Cupidon

Voici pourquoi de magnifiques ouvrages, comme celui-ci, ont été édités. Pierre

jeudi 15 octobre 2009

Vivre et penser comme… Pierre Brillard


Une table de nuit, des musiques, un frigo, une couleur… Parfois on voudrait en savoir un peu plus sur l'animateur d'un blogue.

Sur sa table de chevet :
Presque rien. Je n'ai plus de téléphone à portée de main depuis que je n'assure plus d'urgences, un radio-réveil, mes lunettes que je ne quitte que pour dormir et deux ou trois livres que je change en fonction de mes coups de cœur. Comme je ne m'endors jamais sans lire, j'affectionne particulièrement ceux qui peuvent tomber des mains sans nuire à ma curiosité…
Comment gère-t-il un cafard ?
J'ai tendance à faire le gros dos. Silence… Et j'attends que ça passe. J'aime aussi courir mais je dois reconnaître que je n'y trouve aucune satisfaction intellectuelle.
Chaussures :
Elles doivent être avant tout confortables et élégantes. Je possède des mocassins à glands ce qui désespère ma dernière fille. Comme je ne les use pas, je les garde assez longtemps pour être continuellement démodé. Pour les chaussures de sport, la couleur autant que la marque est prioritaire. Coloris sombres s'abstenir !
Rire :
Je ris de n'importe quoi, le comique visuel et le non-sens ayant ma préférence. Mais je ne rirais pas avec n'importe qui ! Par exemple, voici ce qui me rire…


Mots :
Ils sont pare-feux et refuges. Paravents de mes émotions, je ne sais pas ce que je deviendrais sans eux… Amateur de "bons mots", il m'arrive de m'en approprier. Collectionneur d'aphorismes approximatifs, je les distribue en punition à mes enfants lors de nos repas du soir.
Mauvais goût :
En matière vestimentaire, j'ai une inexplicable capacité visionnaire qui fait porter mon choix sur des affaires et des couleurs qui seront à la mode dans cinq ans. J'ai, par exemple, une veste western à franges que je n'ose mettre... Il me faudrait acheter une moto (sur la photo, moi, j'ai le vélo !) .
Qu'y a-t-il dans son frigo ?
Je suis un inconditionnel des laitages et de la confiture. Pour le reste, seul, je suis capable de ne jamais le remplir.
Usage des musiques :
Permanent. J'ai une grande admiration pour la voix des chanteurs lyriques et pour quelques interprétations de chanteurs de variété. A l'écoute d'un beau concerto, ma gorge se serre parfois.
Le meilleur somnifère ?
L'épuisement amoureux. En cas d'insomnie (fréquentes depuis ma reconversion hasardeuse), je n'hésite pas à me réfugier dans la cuisine en buvant des boissons chaudes. Il m'est arrivé de passer de très bons moments ainsi.
Cantines :
Je rentre toujours pour déjeuner mais sauter un repas ne m'ennuie pas. Je ne suis pas obnubilé par la gastronomie mais j'apprécie les tables accueillantes. De même, sans être un connaisseur, un grand vin (j'ai un faible pour le vieux pomerol) entre amis transcende mon palais et mon plaisir.
Parfums :
J'aurais aimé être un nez, cela aurait au moins justifié sa présence importante. Je les achète moi-même mais ne saurait dire, en ce moment, lequel j'utilise. Dior, je crois…
Grand écran, petit écran ?
Ni l'un ni l'autre. Des acteurs de planche comme Gérard Philippe et Philippe Noiret ont marqué ma mémoire. J'ai une grande sympathie pour Hugh Grant, ce qui peut me pousser à voir "Coup de foudre à Notting hill" plusieurs fois. Un scénario qui commence bien, qui finit bien et où l'intrigue se passe bien me convient parfaitement. De même, Je peux parfaitement regarder la télévision si l'on ne me confie pas la télécommande. Les autres aussi…
Un défaut qui vous pèse :
Je ne suis absolument pas physionomiste. Ce travers m'a rendu ridicule un nombre incalculable de fois. Jean Rochefort, que j'adore, rentre dans ma clinique alors que j'étais lieutenant vétérinaire à St Cyr-Coetquidan. " Tiens ? Bonjour ! " C'est exactement ce que j'ai dit à ce visage qui me disait quelque chose… Une heure après, j'étais mort de honte !
Un défaut qui pèse aux autres :
Obstiné ! Mais pas têtu…

Message personnel :
Merci d'être des lecteurs de ce blogue, et pour les plus téméraires, d'y apporter votre touche personnelle grâce aux commentaires.

mercredi 14 octobre 2009

Jules Lemaitre. Ecrivain bibliophile (1853-1914).


Jules Lemaitre nous reçoit dans son immense appartement dont les parois sont tapissées de beaux dessins d'anciennes reliures. Il porte un simple costume, la barbe courte en pointe. Les yeux sont vifs et malicieux et la voix fraîche rappelle les conférences données avec ardeur sur Chateaubriand, Jean-Jacques Rousseau et Racine tour à tour. On peut dire du maître qu'il a un esprit irrévérencieux plutôt que méchant et ses lecteurs apprécient l'élégance de son style. Il est aimé des libraires et particulièrement apprécié des bibliophiles qui reconnaissent en lui un acheteur avisé. Voilà pour l'homme !


Il nous montre avec fierté quelques livres qui portent son ex-libris latin "Inveni portum" - j’ai trouvé le port - qui laisse deviner les trésors que contiennent la bibliothèque. Est-ce déjà le jardin clos du paradis des livres ? Il caresse des yeux, puis de la main, un Montaigne de 1580, un sermon de Bossuet avec dédicace de la main de Mgr de Meaux à Mme Gilbert, une imitation de Jésus-Christ traduite par Pierre Corneille qui aurait appartenu à Molière… Ne lui aurait-elle pas inspiré l'humilité feinte de son Tartuffe ? Il nous le soumet et son regard pétille de plaisir en constatant notre désapprobation de façade. Voila pour le bibliophile !

Je vous propose à la vente – découverte, pourrait-on dire – un ouvrage paru au début du siècle dernier qui vous fera apprécier la plume de notre cher Immortel. Parmi les textes proposés, je vous retrace à grands coups de "stabylobosse", l'histoire de Sainte Marthe revue et corrigée par Jules Lemaitre.


" Marie (Madeleine), mal à son aise parmi les hommes, se retira dans une grotte sur une montagne. Là, vêtue seulement de ses cheveux qu'elle avait à la vérité fort longs et forts épais, elle passait sa vie dans la prière et la contemplation et des anges invisibles la soulevaient de deux coudées au dessus de la terre " et "Il y avait le long du Rhône un dragon venu par mer de Galatie, où il avait été engendré d'un serpent marin. Un jour les habitants résolurent d'aller combattre le monstre et de l'exterminer. Ils marchèrent bruyamment vers le bois sous la conduite d'un certain Tartarinus" Vous connaissez la suite…


Il existe en préface de ces contes un très joli texte donné à l'Académie sur la bibliophilie. " Une des choses qui me touche dans les beaux dessins des antiques reliures, c'est que jamais ils ne sont d'une géométrie irréprochable ; toujours quelques tremblements ou quelque hésitation des lignes nous rappelle et nous rend la main vivante et mobile de l'ouvrier qui les exécuta. Joignez que le temps assourdit délicieusement les ors et qu'il donne aux peaux, surtout aux rouges et aux vertes, des tons d'une douceur, d'une richesse, d'une somptuosité à demi éteinte, d'un fondu et, si je puis dire, d'une onction que nul artifice ne saurait imiter…"

Si ce n'est pas de l'amour, çà ! Pierre

LEMAITRE (Jules). En marge des vieux livres. Boivin & Cie. 1935. In-8. Broché.348 pages. Gravure en frontispice. Lettrines illustrées et motifs en noir et blanc. Bois originaux de Valentin Le Campion. En marge de l'Iliade, de l'Odyssée, des Evangiles, de la Légende Dorée.... Série de ce recueil de contes paru vers 1905. Avec une belle préface "Les vieux livres", apologie de la Bibliophilie et des Bibliophiles. Bel Etat. 35 € port compris

lundi 12 octobre 2009

Causerie du lundi de Philippe Gandillet. L'Académie Française


L'Académie Française, ou bien "l'Institut" comme nous l'appelons entre académiciens, va célébrer cette année son tri-cent-soixantequinzenaire et cette commémoration nous remet en mémoire les circonstances de son établissement. Elles sont trop connues des lecteurs du blog pour que j'insiste mais pas assez de Pierre, à qui je dédie ce billet, pour qu'il soit inutile de les lui rappeler.

Il est juste, en effet, que l'état actuel de l'illustre Compagnie ne fasse pas oublier la modestie de ses origines et l'obscurité de ses premiers membres (qui se souvient de leurs noms ?). Ce ne furent pas de bien grands personnages que les sieurs Godeau, Gombault, Desmarets, Habert, Cerisy, Malleville, et Giry, non plus que l'Abbé de Cérisay, le bonhomme Chapelain et le silencieux Conrart qui prirent l'habitude de se réunir chez l'un ou l'autre d'entre eux pour s'y entretenir de différents sujets. Qu'est-ce donc qu'un "blog" sinon qu'une réunion analogue d'esprits curieux ? Ces colloques attirèrent l'attention du Cardinal de Richelieu (le papa de Louis XIV) à qui rien n'échappait de ce qui pouvait profiter à l'état et l'idée lui vint de transformer cette société privée en un corps ayant ses statuts, ses devoirs et sa protection.


Un des buts de cette société savante serait d'élaborer un ouvrage de régulation de la langue française afin d'en surveiller sa pureté et d'en maintenir le bon usage. Après la querelle du "Cid" ils jugèrent plus diplomatique de ne plus donner leur avis sur le style littéraire, ce à quoi ils s'astreignent encore… Après avoir failli disparaître pendant la révolution, l'Académie Française fut reconstituée par l'ordonnance royale du 21 mars 1816 et, depuis lors, il ne fut plus guère apporté de modifications à son règlement et à ses usages. Sa séance publique annuelle, ses séances de réception, comportent le même cérémonial. Son mode d'élection n'a pas varié non plus. Il est malheureusement difficile de franchir les portes du Quai Conti si l'on n'est pas de la maison ! Je me serais fait un plaisir d'accueillir personnellement les lecteurs du blog pour une visite mais je suis très occupé en ce moment. Le mieux est encore d'entrer par effraction.


L'académie Française jouit d'un indéniable prestige à l'étranger. Chez nous, elle est plus populaire. Une élection à l'Académie est, dans beaucoup de milieux, un sujet de conversation sur lequel on débite bien des propos fantaisistes. En fait, et si j'en crois mon expérience personnelle, les intrigues consistent en bien peu de choses. Certes, les choix de l'Académie ne sont pas toujours parfaits mais certaines omissions sont explicables. Les premiers membres étaient souvent des gens de plume et la tradition se perpétue comme on le voit avec la dernière œuvre littéraire de Valéry-Giscard d'Estaing…

Ludovic Halevy me disait à l'oreille" On rencontre à l'Académie des gens qui ont du talent et d'autres qui n'en ont pas. Il faut avoir de la considération pour ces derniers ; ce sont les plus méritants puisqu'ils sont parvenus sans talent ". Pourquoi me le disait-il, à moi ? Votre dévoué. Philippe Gandillet

- ASSE (Eugène). L'Académie Française. Ed. Librairie de Firmin Didot et Cie 1890 Paris - 1 vol. in 8 , relié pleine percaline à motifs dorés et noirs, tranches dorées, 253 pp. Bon état, Illustré de 61 gravures dont une en frontispice. 40 €
- CASTRIES ( Duc de ). La vieille dame du Quai Conti - Une histoire de l'Académie Française. Paris, Librairie Académique Perrin, 1978 ; in-8 ( 20 / 13 cm ), broche, couverture illustrée, 478 pp., 16 planches h-t., annexes. Bon exemplaire, dédicace de l'auteur. 21 €
- COLLECTIF 1635-1935. Trois siècles de l'Académie Française par les Quarante. Paris, Firmin-Didot et Cie, 1935, grand in-8, 530 pp, photo-frontispice, broché couverture épaisse. Ouvrage commémoratif édité à l'occasion du tricentenaire de l'Académie Française et constitué de 40 textes dus aux 40 Académiciens en titre en 1935. 48 €

dimanche 11 octobre 2009

Traité de confiserie par Emile Duval. Recette de marrons glacés.


Comme beaucoup, lorsque vous sortez de l'office du dimanche matin, vous passez à la pâtisserie acheter un gâteau pour le dessert quand vous n'avez pas eu le temps de le préparer vous-même.

C'est donc les bras chargés d'un bouquet de fleur, d'un carton pâtissier tenu par sa ficelle coupante, du journal du dimanche et de la bouteille de vin que vous avez remontée de la cave que vous rentrez à la maison. Votre épouse qui va à l'office du samedi soir a, de son côté, préparé le poulet rôti dont l'odeur, s'échappant du four, inonde la maison. Vos enfants descendent l'escalier à grands pas et se pendent à votre cou pour vous couvrir de baiser comme à l'accoutumée. Votre femme épanouie par les traditionnelles effusions du samedi soir ne peut cacher ce sourire de gratitude qui remplit votre cœur d'une ineffable satisfaction. André Verchuren dont l'accordéon mélodieux a rythmé votre enfance égrène ses plus beaux succès sur le tourne disque offert par votre beau-père et vous allumeriez encore une cigarette si vous n'aviez pas arrêté de fumer par crainte des quintes de toux que cette manie provoquait sur votre scottish terrier…

Il arrive malheureusement des dimanches, comme ce matin, où votre pâtissier est en vacances et il vous faut donc improviser. Nous sommes début octobre, les châtaignes sont prêtes à être récoltées. Et si nous faisions des marrons glacés à midi ?


Procédons par ordre :

Tout d'abord, quand on parle de marrons, il s'agit d'une espèce particulière de châtaigne plus grosse. Il ne faut pas les confondre avec les fruits non comestibles du marronnier d'Inde. Une bogue de marronnier d'Inde ne contient qu'un seul marron d'Inde. Il ne faut pas les confondre, non plus, avec les noix et la taxe foncière qui tombent à la même époque ; c'est une question d'habitude !

Quand vous avez récolté les marrons, vous devez les immerger dans de l’eau pendant huit secondes afin que l’amande se rétracte légèrement, pour faciliter le décollement du tan (la deuxième peau adhérente).

L’épluchage commence par de multiples incisions sur l’écorce, suivi d’un passage de quelques secondes à la vapeur qui va permettre d’éliminer une bonne partie du péricarpe et du tan. Les fruits sont alors emmaillotés deux par deux dans un voile de tulle et rangés méthodiquement afin qu’ils restent entiers jusqu’à la fin des opérations. Les marrons ainsi protégés sont cuits à l’eau 12 secondes, avant d’être plongés dans un sirop qui va progressivement pénétrer jusqu’au cœur du fruit.


Durant les 48 secondes de cette opération de confisage, des fagots de gousses de vanille baignent dans le sirop et diffusent leur arôme. Une attention toute particulière est prêtée au respect de la concentration en sucre qui doit être suffisante pour assurer une bonne conservation mais pas excessive pour ne pas masquer la saveur du marron.

Les fruits sont alors débarrassés de leur voile de tulle, lors d’une opération de dépliage, qui permet également d’éliminer les marrons cassés. La dernière opération est le glaçage. Chaque marron est enrobé d’une fine couche d’un sirop réalisé avec du sucre glace, suivi d’un bref passage au four, qui lui donne un aspect brillant. Après un repos d’au moins 37 secondes pour fixer la glace sur les marrons, ils sont enfin présentés sur le plateau à dessert offert, pour votre mariage, par "tante Simone".


Le marron glacé est un produit frais qui perd progressivement ses qualités en se desséchant. Finissez tout à midi ou bien resservez le soir car il ne faut pas gâcher la nourriture… On peut remplacer le mot "secondes" indiqué dans la préparation culinaire par le mot "heures". Les marrons sont meilleurs mais vous terminerez trop tard pour faire la sieste après le repas. La recette a été prise dans un excellent ouvrage que je propose à la vente.

Bon dimanche. Pierre

DUVAL (Émile). Traité de confiserie moderne : Desserts, glaces, chocolats : Renfermant les meilleurs procédés pour la fabrication de la confiserie en gros et en détail et des chocolats. Meulan : En Vente Imprimerie Lambert, 1948. Broché in-8, non coupé. Vii-682 pp. Nombreuses illustrations. Très bon état, quelques petites taches au 1er plat. Vendu