vendredi 28 février 2014

La Poupée de Leo Larguier remarquablement illustrée par Chas Laborde...


Les livres illustrés du 20eme siècle ? Bien illustrés, bien présentés, abordables mais peu prisés des bibliophiles. La raison ? Il semble que ce désamour des acheteurs s'explique par la méconnaissance des procédés d’impression utilisés par les illustrateurs et les éditeurs de l'époque, méconnaissance due en partie à l'évolution trop rapide des techniques…


Sachant que le rôle de l’illustrateur est de réaliser l'accord parfait entre le récit et les techniques de reproduction mises à sa disposition, le rôle de l'éditeur est de le laisser librement s'exprimer, suivant les moyens habituels, et ensuite de traduire son œuvre par un procédé adapté. Gravure sur bois, sur cuivre, eau-forte, lithographie, etc…


Pendant longtemps, les amateurs s’intéressèrent aux eaux-fortes, puis c'était au tour de la lithographie d'avoir la vogue, ensuite on vit, au début du 20eme siècle, remonter la cote du bois de bout. Ces retours alternatifs du goût nécessitaient l'intervention, dans bien des cas, d'habiles graveurs de reproduction qui répondaient alors au talent du dessinateur… Aujourd’hui, un artiste qui ne sait que dessiner a la possibilité de voir son trait strictement reproduit tel qu'il est, sans déformation.


Cependant, avec l'évolution des techniques modernes telles la phototypie, l'héliogravure, l'offset ou la photogravure, nous ne sommes plus en mesure, aujourd’hui, de déterminer quel procédé a été utilisé par l’éditeur. En fait, ces méthodes sont devenues parfaites comme vous pourrez le constater dans l’ouvrage de Larguier, présenté ici, et illustré par Chas Laborde.


Léo Larguier : Qui donc mieux que François Nourrissier pouvait le présenter? : De qui dirait-on « il fut fidèle pendant cinquante ans à son quartier de Paris ? » Lui-même titrait ainsi : «Saint Germain-des-Prés-mon-village», un de ses bons livres. Mélangez, humez, goûtez peut-être ? Aussitôt des mots un peu effrangés, jetés à la diable comme autour du cou une écharpe un peu bohème, des mots de fidélité, de nostalgie. Ils vont assurer une garantie de confort à un homme de la qualité de Léo Larguier. On était fidèle aux maîtres en ce temps-là et l’on vénérait Hugo. On ne disait pas, chinant entre rue Jacob et Pont-Neuf « Encore un fripier qui chasse un libraire... Quelle pitié! ». Ils résistaient très bien, les libraires...Imaginons une famille : j’y installe autour de la table quelques-uns de ces pieux et doux maniaques qui, à force de paperoles découvertes ici et là, de morceaux de correspondance, d’érudition, sont devenus des «hommes papier» - autant dire des puits de silence et de sagesse… Mais j’avais promis «une famille» ; en voici des bribes : La Varende, René Benjamin, SachaGuitry. Regroupés un peu plus loin, les partisans de Paul Fort. Et les fidèles de Carco, Ajalbert, MacOrlan, Dorgelès, Billy. Nous sommes en 1943-1944, période funeste, règlements de comptes. Sans doute cette petite société que j’évoque, savantasse, rancuneuse, bougonne, et réglant ses querelles dans une belle indifférence à tout ce qui y était étrangère.


Né dans les Cévennes d'une vieille famille de paysans huguenots, Léo Larguier vint à Paris vers l'âge de 20 ans. Lors de son service militaire à Aix-en-Provence, il se lie d’amitié avec Paul Cézanne, recueillant de précieux souvenirs qui seront la matière de deux ouvrages. Par la suite, il ne quittera plus guère Saint-Germain-des-Prés, dont il devait devenir l'historien. Il est le voisin et l’ami d’Apollinaire, qui lui écrit des poèmes du front. Larguier est l’auteur de nombreux ouvrages : romans, critique, essais, pièces de théâtre... Cette activité littéraire intense ne l’empêche pas de se livrer à son goût pour l’art et la collection, qui l’attire toute sa vie à l’Hôtel des ventes, chez les antiquaires, les libraires et aux Puces. Il mariera d’ailleurs ses passions en publiant des biographies de peintre et plusieurs ouvrages sur la bibliophilie


Un ami, donc… Ce livre piquant sur la condition des femmes, ses rêves et ses espoirs rejoindra d’autant plus facilement vos rayonnages qu’il est fort bien relié. Pierre

LARGUIER (Léo). La Poupée. Paris, chez Briffaut, 1925, collection "La Rose et le Laurier". Un volume in-8. Demi maroquin  tabac à coins, dos à quatre nerfs ornés d’un filet doré, caisson central orné de motifs géométriques estampés encadré d’un filet, titre et année d’édition en lettres dorés, tranche supérieure dorée, gardes colorées, couverture illustrée conservée. Dessins de Chas Laborde. Magnifique reliure de Yseux (non signée), successeur de Thierry-Simier. 100 pp. Tirage limité à 770 exemplaires ; un des 750 sur vélin (n°328). 155 € + port

jeudi 27 février 2014

L'histoire de Manon Lescaut dans une remarquable reliure signée par Belz-Niedrée.


Manon Lescaut ; ou plutôt Des Grieux et Manon Lescaut ; nous relate l’histoire d’une passion où le plaisir est la seule raison de vivre des héros.


Pourquoi et malgré son interdiction d’édition à sa sortie, l'œuvre d'Antoine François Prévost d'Exiles, a été saluée comme un chef-d'œuvre ? Montesquieu hasarde une réponse : " Je ne suis pas étonné que ce roman, dont le héros est un fripon et l'héroïne une catin [...] plaise, parce que toutes les mauvaises actions du héros [...] ont pour motif l'amour, qui est toujours un motif noble, quoique la conduite soit basse." (Mémoires). Peut-être. Mais les romans précédents de Prévost, l'Histoire de Cleveland par exemple, obéissaient à une inspiration similaire et n'ont pas, comme Manon Lescaut, traversé les époques…


Si Manon Lescaut est un joyau, cela tient peut-être au mélange des genres qui fait se côtoyer les tonalités de la tragédie classique, du roman de mœurs moderne et de la comédie de boulevard. Et cela tient aussi à la personnalité de l’auteur !


L'Abbé Prévost a eu une jeunesse tumultueuse. Il étudie chez les Jésuites puis chez les bénédictins, mais ses études sont souvent interrompues par de longues périodes d'errance. Malgré son ordination en 1726, il veut mener une vie libre et mondaine. Vers 1729, il quitte son monastère sans autorisation et s'exile en Angleterre où il se convertit au protestantisme. Il rencontre un important succès là-bas. Mais comme il a une histoire sentimentale avec la fille d'un huguenot, il doit s'enfuir vers la Hollande où il décide de se consacrer à la littérature par le biais des librairies d'Amsterdam. C'est là qu'il rédige Les aventures du Chevalier des Grieux et de Manon Lescaut. Pendant toute cette période, il vivra une passion amoureuse dissolue avec une femme surnommée Lenki… [le hasard est étrange ; j’écris, en ce moment ce billet de Bretagne où je suis invité au mariage de mon neveu qui épouse une jeune femme slovaque prénommée Lenka !]


L’ouvrage que je propose aujourd’hui à la vente a ceci de remarquable – outre ses qualités éditoriales et la finesse de ses gravures – que la reliure est signée d’un artisan connu des bibliophiles : Belz-Niedrée.


Relieur et doreur, né à Sarrebruck en 1803. Il prend la succession de Muller (lui-même successeur de Thouvenin) en 1836 et exerce jusqu'à sa mort en 1854. Installé passage Dauphine, à Paris, son atelier est continué par sa veuve jusqu'en 1861. Il est alors repris par son gendre Philippe Belz sous la signature Belz-Niedrée. Les lecteurs habitués du blog remarqueront que cette semaine est placée sous le signe de la bibliopégimanie… Pierre


PREVOST (Abbé). Histoire de Manon Lescaut et du Chevalier des Grieux. Paris, Librairie du XIXe, Glady Frères, 1875. Un fort volume In-8. Reliure demi-maroquin havane à coins, plats encadrés d’un double filet, dos à nerfs ornés d’un filet doré, caissons ornés de motifs dorés, pièce de titre en maroquin cerise, roulettes, tranche supérieure dorée, gardes colorées, couvertures conservées. Reliure signée de Belz-Niedrée. 372 pages, onze planches dessinées et gravées par L. Flameng. Précédé d'une préface par Alexandre Dumas Fils et accompagné de variantes et d'une notice par Anatole de Montaiglon. Un portrait de Alexandre Dumas Fils gravé à l'eau-forte par Jules Jacquemart. Les ornements du texte : fleurons, têtes de chapitres, culs-de-lampe, lettrines, ainsi que le frontispice ont été dessinés sur bois par Emile Reiber et gravés par Panneker. Vendu

mercredi 26 février 2014

Histoire de la République de Venise par Léon Galibert.


J’ai déjà eu l’honneur de présenter un ouvrage de Léon Galibert, ici (vous pouvez cliquer). En voici un second dont la renommée n'est plus à faire et qui s'arrachait, il y encore quelques temps à beau prix dans les salles de vente. L'histoire de la République de Venise...


Une situation exceptionnelle ! Un destin unique ! Une organisation originale ! "La Sérénissime" s'est toujours protégée des envahisseurs et le plus pénétrant d'aujourd'hui n'y a toujours pas droit de cité : c'est l'automobile ! Comme au temps de Cannaletto, marcher la nuit dans Venise, n’entendre que le clapotis de l’eau invisible et la résonance de ses propres pas, deviner la présence de prestigieux palais dans la lumière blafarde de simples ampoules placées çà et là, c’est s’assurer des sensations impérissables à jamais ancrées dans la mémoire… 



Dans l'Histoire de la République de Venise, vous découvrirez que cette cité n’est pas seulement la cité la plus saisissante qui soit, mais celle qui fut, bien avant la conquête normande, une République indépendante pendant plus d’un millénaire au cours duquel elle tint le rôle de maîtresse de la Méditerranée, de carrefour incontournable entre l’Orient et l’Occident, de centre commercial le plus riche et le plus prospère du monde civilisé. Ce n’est pas moi qui l’écris mais un éditeur incontournable du 20eme siècle (je vous laisse chercher…)


Son principal atout est sa position. La lagune la protège de ses ennemis et la rend difficile à atteindre. Sa situation entre l'orient et l'occident lui permet de servir de pont commercial entre ces deux régions, assurant la fortune de la ville. Les XII et XIIIème siècles voient le temps des croisades, dont Venise profite en monnayant ses services maritimes et en négociant des terres et avantages sur les conquêtes réalisées par les croisés. En 1204, Venise arrive à détourner la 4eme croisade à son profit en demandant aux croisés de conquérir Constantinople avant Jérusalem. Venise ramène du pillage de Constantinople des trésors en quantité phénoménale, qui serviront entre autre à enrichir et embellir la ville. Les célèbres chevaux situés sur la Basilique Saint Marc proviennent, par exemple, de ce pillage.


La suite que vous pourrez suivre dans ce livre est le chemin cahoteux d’une République tiraillée entre ses voisins de la terre et ses voisins de la mer, entre ses succès commerciaux et les malheurs sanitaires qu’ils provoquèrent (les épidémies de peste et de choléra en étant les plus meurtrières conséquences).  Il fallait une date à la fin de cette longue République. Ce sera 1866, date à laquelle Venise rejoint le Royaume d'Italie. J’ai trouvé peu de choses sur Léon Galibert. C’est assez surprenant car l’auteur eut quelques beaux succès d’édition. Vous serez peut-être plus chanceux dans vos recherches… Pierre


GALIBERT (Léon). Histoire de la République de Venise. Paris, Furne et Cie, 1847. Un volume in-4. Reliure demi-cuir aubergine, dos à 4 nerfs, caissons dorés, titre encadré en lettres dorées, toutes tranches dorées, gardes colorées, reliure signée de Quinet. 587 pages. Complet de ses 24 gravures par Rouargue Lalaisse. Des rousseurs irrégulières dans le texte mais pas sur les gravures. Vendu

mardi 25 février 2014

Xanthis d'Albert Samain illustré par Boizot et relié par Yseux. Ce qui se fait de mieux...


Puisque Philippe Gandillet a déjà eu la gentillesse de nous honorer d’une petite causerie sur Albert Samain, et puisque je n’ai guère de temps de faire un billet chiadé pendant mes congés, je vous propose en introduction un peu de sa prose. La notice est de moi…


«  Je vous dois d'abord une confession et une explication. Commençons par ce qui coûte le moins. Il pourrait sembler étrange de laisser quelque place dans mes causeries pour un genre littéraire aussi peu en vogue que la poésie. Les grands éditeurs s'en écartent aujourd'hui et je ne vois plus de grands poètes siéger dans l'illustre Académie où j'ai l'honneur et le privilège de présider. Les professeurs des écoles s'en désintéressent et les élèves la dédaignent, surtout les néogothiques à tendance anarchiquo-rebelle qui pissent dessus… La réponse à cette difficulté, la voici : Il y a trop de différence entre le style poétique empreint d'élégance ; de recherche musicale aussi ; et l'écrit utilisé maintenant par la jeunesse, écrit qui s'apparente pour l'heure à une suite d'interjections sans règle esthétique établie.


Une confession ai-je dit en outre ? Quitte à vous surprendre, je vous déclarerai sans ambages que je ne déteste pas, de temps à autre, noircir quelques feuilles blanches de vers de ma production. Et quand j'aurai dit, pour satisfaire un besoin morbide d'humiliation, que j'ai même édité à compte d'auteur quelques ouvrages en vers, j'aurais, je pense, le droit de ne pas chercher un autre exorde et d'aborder sans plus attendre cette causerie par une présentation flatteuse d'un grand poète du 19eme siècle : Albert Samain.


Albert Samain est né en 1858 et mort en 1900. Il fut le plus original, le plus charmant, le plus délicat et le plus suave des poètes. Sa popularité est malheureusement tellement faible aujourd'hui qu'une biographie récente est parue où un portrait est présenté en première page qui le montre en costume militaire alors qu'il n'a jamais été soldat…


Cofondateur de la revue Mercure de France avec Jules Renard, on garde de lui le souvenir du plus mauvais panégyrique qui fut commis dans ses pages quand on lui demanda de tracer le portrait de Catulle Mendès (qu'il n'aimait pas) : Ce qui est intolérable avec Mendes, quand on le lit avec fréquence, c'est la sensation d'artificiel absolu qui s'en dégage… »


Le livre que je présente aujourd’hui - un rare ouvrage en prose - est présenté dans une magnifique reliure signée dont le hasard m’a fait découvrir un exemplaire jumeau sur le site d’un confrère américain (à un prix plus élevé, cependant). La notice d'Yseux dans le dictionnaire de Fléty donne les renseignements suivants : "Yseux, Louis, ancien ouvrier de Durvand. En 1908 il s'associa avec Thierry, successeur de Petit, lui-même successeur de Simier fils, et reprit entièrement l'affaire en 1915. L'atelier était alors situé 5 quai de Conti. L'immeuble étant menacé de démolition, Yseux transféra l'atelier quelques années plus tard 18 rue Dauphine où il exerça jusqu'en 1951, année de son décès. Barbance lui succéda peu de temps après et transféra à son tour l'atelier près d'Avallon dans l'Yonne. Yseux eut une clientèle de bibliophiles et nombreux sont les ventes de bibliothèques où figure sa signature ". Il reste à espérer que mon exemplaire revienne enfin entre les mains d’un bibliophile… Pierre


SAMAIN Albert. Xanthis, ou la vitrine sentimentale. Paris éditions Carteret, 1917. Reliure demi maroquin à coins, dos à cinq nerfs ornés d’une roulette, caissons ornés de motifs encadrés d’un filet, titre et année d’édition en lettres dorés, tranche supérieure dorée, gardes colorées. Exemplaire sur vélin (120 ex) après 25 sur japon. Ces deux tirages, avec 22 bois en couleurs gravés par Boizot, reliés avec leur suite à part. Magnifique reliure signée Yseux, successeur de Thierry-Simier. Quelques rousseurs marginales. 225 € + port

lundi 24 février 2014

Causerie du lundi de Philippe Gandillet : Halte angevine...

Le château de Brissac sous le soleil...
Avez-vous quelquefois connu un homme navré ? Dans le cas de la négative, dites-vous bien qu’un spécimen de cette espèce est représenté par le signataire de ces lignes, et si vous voulez en savoir la cause, la voici…

Le salon où l'on reçoit ses amis intimes...
J’avais prévu de passer quelques jours dans ma bastide de Provence à l’occasion des congés que nous accorde l’Institut pour les vacances de ski. C’est, d’ailleurs, ce que font tous mes collègues de l’Académie – d’aller parcourir leurs terres à pied plutôt que celle des autres sur des spatules glissantes… Donc, je me faisais un plaisir de remplacer notre brave libraire, ce lundi matin, quand j’ai constaté que l’huis de la boutique était fermé. Un simple petit mot griffonné sur un bout de papier indiquait que le libraire était parti pour une semaine de congés, en Bretagne. Il aurait pu me prévenir, ce me semble !
La vrai bibliothèque est ailleurs...
Le tort est partagé ; je ne l’avais pas prévenu, moi non plus, de ma venue en Provence… Me voilà donc au comptoir de l'estaminet qui fait face à sa boutique, entrain de rédiger un petit billet que je lui enverrai par courriel tout à l’heure. De quoi voulez-vous que je vous cause ? Et oui ! Je pensais qu'il me laisserait un ouvrage à commenter de façon brillante... Du temps qu’il va faire demain ? Voyons donc :
La charmante Veuve Cliquot et la future Duchesse d'Uzes...
(je sors ma mine de plomb…) J’ai remarqué à plusieurs reprises que, par esprit de contradiction probablement, toutes les fois que dans la conversation, je parlais du temps qu’il allait faire, c’était toujours l’inverse qui se produisait le lendemain. Disais-je que la pluie allait tomber ; un soleil radieux brillait dans le ciel. Vantais-je les charmes d’un beau jour ; des averses successives transformaient nos rues en lagunes, nos ruelles en torrents et nous en piétons amphibies.  C’est à peine si j’ose vous rappeler que j’ai, l’année dernière, inconsidérément fait la promotion de notre automne provençal à l’occasion d’un de mes billets. Le résultat fut bien évidemment catastrophique. Il y en eu pour tous les goûts. A défaut d’autres corporations commerciales, celle des marchands de parapluie, venus tout exprès de Cherbourg, fit, cette saison, de fructueuses recettes…
En chambre d'hôte : 390 € la nuit...
Les chroniques météorologiques ne me conviennent donc guère…  Et si nous demandions plutôt à Pierre d'illustrer ce petit billet par quelques clichés pris, en ce jour, au pays des andegaves ? Il paraît que le douceur angevine n'est pas un vain mot...
Et pour finir le château du Plessis-Bourré, toujours sous le soleil...
Votre dévoué. Philippe Gandillet

samedi 22 février 2014

Recueil des pièces de M. Le Sage : Très rare édition ! La démonstration par l'exemple…


Il vous est peut-être arrivé, comme à moi, d'acheter un ouvrage dont l'acheteur avait collé, ou intercalé entre deux feuillets, la fiche de l'époque. Vous vous êtes alors aperçu que cet ouvrage qualifié de "très rare" dans le catalogue du libraire de l'époque ne l'est plus aujourd'hui, grâce à " la multiplication des petits livres " d'Internet !


Plus rare est la présence, dans l'ouvrage acquis, de la facture d'achat. Les bibliophiles n'aimaient pas – et n'aiment toujours pas -, que leurs chères et tendres épouses connaissent le prix de leurs petites " folies textuelles "…  Dans le cas qui nous intéresse, ici, j'ai eu la chance de posséder la facture détaillée de notre honoré confrère de la librairie Leconte, 73, rue des Saints-Pères à Paris dans le 6eme arrondissement ! Facture datant d'exactement 58 ans ! 


J'ai donc voulu savoir, grâce à l'irréprochable convertisseur monétaire de l'INSEE, si le propriétaire de l'époque avait fait une bonne affaire, ou bien si comme les oiseaux de mauvais augures le prétendent, nous assisterons à une baisse dramatique de la cote du livre ancien avec le temps. A vous de juger ! 


Les deux tomes de ce très rare recueil des pièces mises au théâtre françois par M. Le Sage en 1739 ont été achetées 9107 francs en 1956. La fiche du catalogue mentionne, pour sa part, 9500 francs, ce qui prouve qu'on savait déjà négocier les prix… 


Le convertisseur franc-euro fourni mesure conjointement l'érosion monétaire due à l'inflation. Il permet d'exprimer, sur la période 1956-2013, le pouvoir d'achat d'une somme en francs d’une année donnée en une somme équivalente en euros d’une autre année, corrigée de l’inflation observée entre les deux années. En plus de l'inflation, le convertisseur prend en compte le passage des « anciens » francs aux « nouveaux » francs en 1960 et le passage des francs aux euros en 2002 (1 € = 6,55957 FF). Résultat : 18692,51 euros ! Compte tenu de l'érosion monétaire due à l'inflation, le pouvoir d'achat de 9107 francs en 1956 est donc le même que celui de 18692,51 euros en 2013… Je ne sais que dire qui ne soit pas déprimant et c'est uniquement parce qu'aucun robinet du gaz n'est à portée de main à la boutique que je consens à survivre jusqu'à la fin de la soirée !


Il est évident que le prix que je vais demander aujourd'hui va vous paraitre une misère… Revenons à l'auteur : Bas du formulaireAlain-René Le Sage se fait connaître en 1707 comme romancier de premier ordre avec son Diable boiteux (sous titré : le regard indiscret) où le héros se fait transporter par le diable sur le toit de chaque maison, pour voir ce qui s’y passe et avoir l’occasion de nous conter des aventures sans liaison avec celles qui précèdent ni avec celles qui suivent. Simple divertissement, me direz-vous mais aussi un genre littéraire (le roman picaresque) venu d'Espagne qui va devenir très à la mode, alors ! On connait moins l'œuvre théâtrale de l'auteur. Voilà qui peut être réparé à vil prix ! Pierre 


LE SAGE (Alain René). Recueil des pièces mises au théâtre françois par M. Le Sage. Paris, chez Jacques Barois, 1739. 2 volumes in-12 (17/10,5). Reliure plein veau marbré, dos à nerfs ornés de motifs floraux dans les caissons bordés de filets dorés, pièces de titre maroquin, filet sur les coupes, gardes colorées, toutes tranches rouges. (3ff)-420 pp et (3ff)-389pp-(2ff). Tome I : Le Traître puni. Don Félix de Mendoce. Le Point d'honneur. La Tontine - Tome II : D. César Ursin, Crispin rival, Turcaret et Critique de la comédie de Turcaret, par le diable boiteux. L'ensemble en très bel état.  185 € + port

vendredi 21 février 2014

Alphonse Esquiros. Les vierges martyres d'un saint laïc…

Alphonse Esquiros en Marianne...
Il y a surement, dans votre ville, une place ou une rue "Esquiros". A Tarascon, c'est une esplanade qui fait face à l'ancien Tribunal de Grande Instance… J'ai déjà eu le plaisir, ici, (vous pouvez cliquer) de présenter un ouvrage illustré d'Alphonse Esquiros sur les martyres républicains. Je vous propose à la vente, aujourd'hui, l'édition originale d'un livre publié en 1842 sur les vierges martyres [les notices wikipédiennes indiquent à tort qu'elle est de 1846].


Ces vierges martyres doivent être, bien évidemment, classées dans cette classe de femmes, victimes de la misère et du travail, pour lesquelles l'absence de toute propriété constituait un supplice éternel, renouvelé chaque jour et chaque jour de façon, hélas, plus inexorable… Dans plusieurs cas, cette misère, inhérente à la femme prolétaire, lui imposait même certaines dégradations  contre lesquelles la nature se révolte, mais que la société ignorait ou regardait avec indifférence ; la prostitution n'en était qu'un reflet ! 


Alphonse Esquiros lève ici le voile sur l'état douloureux et immoral des femmes  dans les classes les plus pauvres. Il espérait alors que ce tableau puisse émouvoir la pitié rebelle des dirigeants de l'époque et les engager à chercher un remède à des maux dont les ravages menaçaient la société toute entière ! On doit pardonner à l'auteur la référence du titre à des valeurs d'églises qu'il combattait mais qu'il avait bien connu pendant ses études. Ces vierges martyres républicaines ne sont évidemment pas comparables  à des saintes ayant fait le choix de périr pour une cause ou une foi. Ici,  les  vierges martyres se seraient bien passées de mourir à la tache…


L'auteur nous précise que cet ouvrage a été écrit en prison, dans la solitude et le calme du cœur. Il faut dire que ses brulots anticléricaux lui valurent l'inimitié de nombres de chrétiens-démocrates. Comble de l'ironie, dans sa préface, il se compare lui-même à Jésus-Christ porteur de la vérité, en proie au mépris de ses contemporains… Un Saint laïc, en quelque sorte ! L'ouvrage que je propose ici, dans son édition originale, a été relié par Vermorel, relieur parisien élève de Pagnant, qui exerça de 1887 jusqu'à sa mort en 1925. Du travail de bon artisan de la république, sans nul doute… Pierre


ESQUIROS (Alphonse). Les vierges martyres. Paris, P. Delavigne, 1842. Un volume in 24. Reliure demi-maroquin noir signée Vermorel, dos lisse orné de motifs et de décors dorés encadrés de filets dorés, titre en lettres dorées, tranche supérieure dorée, couverture conservée. [2ff], 156 pp. Rare édition originale. Vendu

jeudi 20 février 2014

Les trois mousquetaires du beau livre : Alexandre Dumas, Maurice Leloir, et le libraire Le Vasseur...


C'est en 1844 que Alexandre Dumas écrit les trois mousquetaires en collaboration avec Maquet. L'action se déroule au XVIIème siècle sous le règne de Louis XIII. Pour cela, le livre doit-il être considéré comme un roman historique ?


En fait, dans Les trois mousquetaires, l'histoire ne tient, en réalité, qu'à la famille royale. Le roman est historique à la manière où l'entend l'auteur : en effet, Dumas interprète librement l'histoire de cette époque. Il emploie beaucoup de son imagination...


Ceux qui aiment Les trois mousquetaires n'y cherchent d'ailleurs pas une adéquation historique parfaite. Il y a du vraisemblable, mais en échange l'auteur nous présente des descriptions vives et amusantes, des dialogues rapides, des personnages pittoresques entrainés dans un tourbillon d'aventures.


L'aventure se déroule sur quatre ans, sous le règne de Louis XIII. Dumas a emprunté à l'histoire des personnages tels que Anne d'Autriche, ou encore Buckingham et également des événements tels que le siège de La Rochelle ou bien la mort de Buckingham. Une grande partie des évènements et des actions des personnages ne sont pourtant que pure fiction. 


Dumas reste assez près de la réalité pour le Roi, au caractère bilieux, quelque peu gauche et timide. Le désintérêt du roi pour la reine est fortement précisé par Dumas. Par contre, il insiste un peu trop sur le cliché bien connu de Louis XIII en souverain fantoche dominé par son tout puissant ministre. Le lecteur, grâce au roman , peut très bien imaginer la solitude du roi entre une femme qu'il haïssait et un ministre pour lequel il n'éprouvait aucune sympathie. 


La représentation d'Anne d'Autriche est également assez fidèle à la réalité . Elle est présentée dans le roman comme une femme victime du désintérêt de son mari, et soucieuse de la sauvegarde de son honneur et de la monarchie. Il est vrai que la mésentente du couple fut profonde et durable et que Richelieu fit tout pour aggraver cette situation. D'un autre côté, un seul aspect du personnage de Georges Villiers, duc de Buckingham, est présenté dans le roman de Dumas : celui de l'amoureux transis qui poursuit Anne d'Autriche de sa passion.


Le roman de Dumas est tiré des Mémoires de Mr d'Artagnan rédigées, de façon très romancées, par Gatien Courtilz de Sandras dont on trouve facilement et pour un prix raisonnable une réédition connue chez Jean de Bonnot – je me demande d'ailleurs si cette édition, en trois tomes, n'a pas été mon marchepied vers la bibliophilie.... Les trois mousquetaires Athos , Porthos et Aramis , sont respectivement identifiés à Armand de Sillègue d'Athos d'Autevielle, Isaac de Portau, et Henri d'Aramitz. Peu de points communs unissent ces trois hommes et les personnages du roman .Mais le fait est qu'ils appartenaient tous trois à la compagnie de Tréville. 


Le personnage de d'Artagnan est Charles de Batz. Tout comme le célèbre personnage d'Alexandre Dumas, il est originaire du Gers et appartint d'abord à la compagnie du roi avant d'être admis dans le camp des mousquetaires. Dumas brosse un portrait assez exact de Richelieu dans son roman. Tout comme il est communément admis, le cardinal était un homme froid et cynique. Pour finir, d'autres personnages historiques comme Mr de Tréville, Mme de Chevreuse ont réellement existé et sont dépeints assez fidèlement par Dumas . Par contre, la célèbre Milady est un personnage fictif ! Je vous propose, aujourd'hui, une remarquable édition de ces Trois mousquetaires, illustrée par Maurice Leloir (présenté ici), en publication de luxe. Pour que vos enfants apprennent l'histoire dans de beaux livres… Pierre


DUMAS (Alexandre). Les trois mousquetaires avec une lettre d’Alexandre Dumas Fils, compositions de Maurice Leloir.  Paris, Calmann-Levy, 1894. 2 volumes grand In-4 (30/21). Demi-chagrin fauve, plat de papier coloré, dos à cinq nerfs, titre, auteur et tomaison en lettres dorées dans encadrement de filet doré, gardes colorées, tranche supérieure dorée. Edition de grand luxe. XX + 461 et 462 pp. Nombreuses illustrations in texte en noir et blanc de Maurice Leloir et gravés sur bois par Huyot. Rares brunissures. Bel exemplaire recherché. Vendu