samedi 26 mai 2012

Expert ! Une autre approche du métier de libraire d'ouvrages anciens…

Vendeur de vieux livres : Voici une activité aux facettes nombreuses et variées ! Il y a le vendeur immobile qui officie en boutique ou en chambre, le vendeur horizontal qui court de marché en marché et de salon en salon, le vendeur vertical qui touche à la haute bibliophilie et celui qui fait un peu de tout ça, avec plus ou moins de bonheur… J'appartiens à la dernière catégorie, vous le savez ! Après avoir exploré, pour vous, le monde inconnu du syndicat du livre ancien, la semaine dernière, voici le fruit de mon expérience de non-expert auprès des Salles des Ventes . Comme pour le S.L.A.M, je compte sur vos impressions et vos commentaires éventuels.

Je rappelle que le rôle de l’expert en livres anciens est d’estimer et d’authentifier des œuvres ou des collections afin que le commissaire-priseur qui le rémunère comme consultant puisse effectuer ses enchères dans les meilleurs conditions pour le vendeur (c'est rarement lui qui cause problème) et l'acheteur. Estimer, c’est donner une valeur financière en accord avec le marché du livre ancien. Et comme ce dernier est soumis à des fluctuations économiques et culturelles, vous imaginer que le rôle de l'expert est délicat ! Authentifier, c’est reconnaître ou confirmer l’auteur ou l'édition d’une œuvre à partir d'éléments bibliographiques ou historiques. Et comme les bibliophiles sont exigeants (internet vous dit tout), vous imaginez que le rôle de l'expert est difficile !

Ce double rôle d'estimation et d’authentification se traduit par la fourniture d'un catalogue destiné aux futurs acquéreurs. Un rôle double donc, qui, au-delà des qualités et du sérieux de l’expert, requiert un aspect essentiel qui est l’expérience, le savoir et la compétence. En effet, l’œil doit apprendre à se former et voir beaucoup d’œuvres pour parvenir à un jugement le plus juste possible sur la valeur de l’objet...

L’expert intervient alors pour les commissaires priseurs qui organisent des ventes aux enchères de tous types. Ces derniers doivent donc s'entourer de spécialistes. Pour le livre ancien, on reconnaît un bon spécialiste à ce qu'il a des cheveux poivre et sel, des lunettes, de l'aplomb, un peu d'humour et une veste pied de poule. Cela tombe bien pour moi, vous me direz ;-))

L'expert peut aussi intervenir auprès des compagnies d’assurances, soit dans l’expertise préalable qui permet d’assurer les œuvres à leur juste valeur, soit après un sinistre. Je l'ai déjà fait une fois en tant que libraire. Je vous raconte ? Il faut différencier ce titre de Consultant de celui d'Expert Judiciaire qui est octroyée sur dossier et par cooptation (ça va encore en énerver certains). Un minimum de compétence en droit est néanmoins nécessaire pour se lancer, je dois vous le préciser, car toute erreur dans la procédure est interdite…Les particuliers peuvent également recourir aux services d’un expert pour estimer leurs biens ou collections ou encore à l’occasion de successions.

La préparation d’une vente aux enchères publiques est de 3 ou 4 mois environ avant la vente en elle-même. Il y a un travail en amont très important, qui conditionne la réussite de la vente. Les lots peuvent être proposés par le commissaire-priseur ou par le libraire expert. Les premières choses à déterminer sont les conditions de la vente, c’est à dire : Les frais de vente, le lieu, la date de cette vente, les horaires et la date de l’exposition qui la précède ainsi que la conception du catalogue.

Après accord de mise en vente des lots, les ouvrages peuvent être entreposés chez le libraire ou le commissaire-priseur avec désignation du prix de réserve. Un double est remis au déposant. Voici comment je préparerais une vente si j'en préparais une, mi octobre… Elle se composerait de 300 lots numérotés dont 50 lots majeurs et 50 lots mineurs sous forme de manettes. Le reste se présenterait sous forme de lots abordant trois thèmes. Les financiers vous demanderont une traduction chiffrée : Disons 30.000 de masse pour 50.000 de catalogue. Cela vous parle ?

La réalisation d'un catalogue expédié 10 à 15 jours avant la vente est aujourd'hui inenvisageable pour une petite salle et un expert débutant. C'est la publicité pour l’annonce de la vente, faite dans les journaux et revues et sur Internet, qui va conditionner sa réussite. Ou pas... Quand une vente ne fonctionne pas en province - que les ouvrages sont ravalés - c'est toujours la faute à un manque de publicité. Parfois, c'est que la marchandise n'était simplement pas intéressante ou proposée à un prix de réserve trop cher ! On voit quelque fois des lots flottants qui le restent…

Je ne vous parlerai pas du déroulement de la vente. Ceux qui assistent aux enchères pourraient vous en parler mieux que moi. De tempérament impatient, je n'y assiste pas. Je donne mes ordres lors de l'exposition, c'est tout ! Cela me permet de ne pas dépasser mon budget initial mais je l'ai regretté un nombre incalculable de fois ;-))

Parlez-nous donc de votre expérience d'expert, d'acheteur, de vendeur ou de commissaire-priseur ! Les lecteurs vous en seront reconnaissants. Aujourd'hui, " Fête cubaine " devant la boutique. Pour faire rêver les bibliophiles qui passent à la boutique, on ne pouvait faire mieux… Pierre

2 commentaires:

sebV a dit…

questions complémentaires :
- est ce que les termes d'expert et d'expertise sont réglementés?
- Quels sont les us pour le paiement de l'expert, en pourcentage de la vente réalisée ? ou au forfait (comme les estimations que l'on peut faire par ailleurs) ?

Pierre a dit…

Je parle sous le sceau de l’incompétence, SebV, mais je crois que je terme d'expert judiciaire est réglementé alors que le terme d'expert de salle de vente est une fonction donnée par le commissaire-priseur. Si ce dernier n'exerce pas sous sa responsabilité juridique propre, il n'est alors que consultant. Il faudrait qu'on me le confirme...

Pour ce qui est des émoluments de l'expert, ils dépendent de sa renommée, de son carnet d'adresse et de l'accord établi entre le commissaire-priseur et lui. Pierre