samedi 1 août 2015

Les Contes Drolatiques de balzac illustrés par Robida : Fabliausement bien !


Les Cent Contes drolatiques d’Honoré de Balzac est une œuvre au texte méconnu pour beaucoup de lecteurs mais dont le titre est connu des bibliophiles grâce à Albert Robida et Gustave Doré qui en firent, en raison de leur talent d'illustrateurs, des succès d'édition. Sur les cent contes envisagés, Honoré de Balzac n’en écrivit que trente, répartis en trois "dizains".


Il s’agit de contes s’inscrivant dans la tradition des fabliaux du Moyen âge et rédigés dans une langue du XVIe siècle réinventée. Ils sont pour la plupart situés au sein d’une Touraine géographiquement extrêmement bien délimitée, mais à une époque médiévale aux contours flous. Les intrigues se déroulent au cours d'un Moyen âge qui s’étend des croisades du XIIIe siècle aux troubles religieux du XVIe siècle. Ils ont pour thème principal les aléas d’une sexualité grivoise : il y est question de jeunes filles que leur pucelage chatouille, de vieux châtelains impuissants et cocus, de jeunes « coquebins » entreprenants, de moines paillards, et de bâtards. Les frasques de D.S.K y auraient leur place…


Ils coïncident tout d’abord avec la résurrection littéraire de Rabelais. On compte, en effet, cinq éditions ou réimpressions des Cinq livres entre 1820 et 1830, au moment de la gestation du premier "dizain". Publiés initialement en 1832, les Contes drolatiques de Balzac forment un projet insolite d’écriture d’imitation qui fit un beau scandale à l’époque, autant par sa truculence que par les fantaisies de sa langue imaginée.


La facture archaïsante, anachronique de cette œuvre découragea souvent le public, la syntaxe médiévale étant réservée à une élite de lecteurs. Le deuxième problème auquel les Contes drolatiques s'affrontèrent fut d’ordre érotique. Beaucoup de lecteurs furent choqués par l’obscénité de certaines intrigues.


Certaines relèvent simplement de la tradition des fabliaux - la jeune fille mariée à un vieil impuissant, le noble qui débauche la bourgeoise maligne - mais d’autres proposent des issues moins comiques et mettent en œuvre de véritables violences envers les femmes. Dans La Belle Impéria, la courtisane doit subir les assauts et violences  psychologiques et physiques de deux évêques. Les femmes ou jeunes filles sont assez souvent victimes de viols dans les Contes drolatiques, la plupart du temps sur le mode comique. Dans Le Curé d’Azay-le-rideau, le curé éponyme prend en croupe, au cours d'une promenade à cheval, une jeune fille de Touraine et finit par s’arrêter dans un bois pour la catéchiser plus ou moins contre son gré. La jeune  lavandière de Portillon dans Comment La Jeune Fille de Portillon quinaulda son juge est elle aussi violée par un notable auquel elle apporte son linge et doit ensuite prouver le viol au juge qui remet sa parole en doute et la soupçonne de séduction. Dans le conte D’ung paouvre qui avoyt nom le Vieulx-par-chemins, une jeune vachère est violée pendant sa sieste par un vagabond de quatre-vingts ans. Mais le forfait est tourné en gageure par le duc de Rouen qui promet la grâce au violeur s’il parvient à prouver sa vitalité sexuelle au pied de l’échafaud.


On ne saurait cependant réduire les Contes drolatiques à de comiques fabliaux grivois, dans lesquels Balzac aurait déversé ses humeurs égrillardes et ses fantasmes érotiques. Derrière cet érotisme paré des couleurs de la féodalité se dessine un exercice de style qui met en valeur la palette des talents d'écrivain de Balzac et en font un des auteurs majeurs de la littérature française. Pierre


‎BALZAC (H. de) et A. ROBIDA. Les Contes Drolatiques. Illustrés de 600 dessins par A. Robida. Paris, Librairie Illustrée - J. Tallandier, sd (1890). 2 volumes grands in-8(25,5/17,5).III + 400 pages et 384 pages.‎ Reliure de type romantique, demi -veau brun, dos lisse orné de motifs dorés, couvertures conservées, gardes colorées. Les dessins sont en noir et blanc (1 seul colorisé par tome). Bel état général sans rousseurs. 145 € + port

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