vendredi 4 novembre 2011

Les "Gens singuliers" de Lorédan Larchey...

C'est parfois le titre d'un ouvrage qui en détermine son achat. Et quand, dans cet ouvrage, vous trouvez la biographie de Philippe Gandillet, votre causeur du lundi, vous hésitez encore moins ! On doit à Étienne Lorédan Larchey (1831-1902), archiviste et conservateur à la Bibliothèque de l'Arsenal, connu surtout pour son dictionnaire d'argot, cet ouvrage sur la biographie de quelques gens singuliers… L'épithète de "singuliers" qualifie, ici, des personnages qui, par goût ou par calcul, s'écartent habituellement des conventions sociales de leur époque. Voyons ce qu'il dit de Philippe Gandillet :


" Du quai Conti au musée du Panthéon, tout le monde se souvient d'avoir rencontré cet homme aux manières élégantes et à la tenue vestimentaire soignée. Ses petites lunettes rondes d'intellectuel de gauche étaient la seule concession qu'il fit à la noblesse de sa condition. Plus d'une passante se retournait sur son passage et attendaient un mot de ses lèvres sans se douter que derrière ce physique avantageux se cachait l'écrivain le plus lénifiant que l'Académie française eut jamais compté.

Philippe Gandillet
avait à Paris ce que l'aisance ne suffit pas à donner. Il y avait sa maison familiale, une maison toute entière pour lui et pour sa luxueuse bibliothèque. Sa mère absente, c'est chez sa tante provençale que Philippe Gandillet naît pourtant en 1894. Ecolier brillant, Enarque à 20 ans, il sera attiré par la politique mais son absence de mégalomanie et sa candeur extrême lui interdiront malheureusement tout avenir dans ce domaine.


Il se tournera alors vers l'aéronautique où il laissera surtout le souvenir d'avoir été le premier myope de l'histoire à avoir traversé la Manche en avion sans avoir pu localiser la piste d'atterrissage ! Au retour de cet exploit, il fuit la célébrité et découvre la musique dans un monastère Tibétain, près de Grenoble. Il fondera bientôt avec Miles Oward, Jesse Falton, Oscar Malbrow et Peter Brensson, un fameux quartet de musique noire qui donnera, quelques années plus tard, naissance au Jazz.


Il a quarante ans quand il écrit sa première causerie qui se verra attribuer, une fois n'est pas coutume, le prix Goncourt, le prix Fémina et le prix Interallié la même année. Élu à l'Académie Française, il choisira le fauteuil du pompier affecté au service d'entretien qui est beaucoup plus confortable que les autres. Il sera adulé par ses collègues mais malheureusement humilié par les critiques qui vont le lire. Un problème d'obsolescence du style et des idées, disait-on... On lui doit beaucoup de mots de la langue française qui s'orthographient avec deux "R" et un "H" successifs. C'était sa façon à lui de bousculer les conventions…


On ne peut dire, aujourd'hui, avec précision où se trouve Philippe Gandillet, et s'il est toujours vivant. Certains prétendent l'avoir vu faire un spectacle finissant en nu intégral dans une revue Parisienne. Cette conjecture, si elle est exacte, accréditerait la thèse communément admise que "Philippe Gandillet" est un pseudonyme. Il est en effet troublant de constater que le nom de l'artiste est la parfaite anagramme de Kevin Cordacier, le chippendale renommé. N'en déplaise à ses détracteurs, sa misogynie feinte et l'outrecuidance de ses causeries cachaient un vrai respect pour le beau sexe… "


Quelques autres biographies inédites sont contenues dans cet ouvrage. Ce sont les seules qu'il vaille la peine de citer : Castellane. Egerton. Malherbe. Lamothe, Brunoy, Guyard, Grimod, Danielo, Souworow, Doudeauville, Chodrux-Duclos, Pierre le Grand, Berbiguier, Berton, Condé, Marey-Monge, Santeuil, Journet, Saint-Cricq et Lutterbach. Pierre


LARCHEY Lorédan. Gens singuliers. Paris, F. Henry, sans date (1867). Exemplaire broché. Format in-12 de xj, 204 pages. Couverture avec petit manque. Intérieur parfait, quelques rousseurs marginales en début d'ouvrage. Édition originale peu fréquente à la vente. 42 € + port

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Pierre, vous progressez ! Je trouve qu’à force de fréquenter Philippe Gandillet, votre style est en passe de ressembler au sien, sans pouvoir l’égaler, évidemment, l’élève dépasse rarement le maitre.
Il arrive que certaine personne recherche l’intimité avec un personnage célèbre pour récupérer quelques miettes de son génie. C’est Kundera, je crois, qui a développé l’idée, je ne sais plus si c’est dans « l’identité » ou dans « l’Immortalité ».

Textor

Anonyme a dit…

Ce bon vieux Milan disait aussi : « Ne pouvoir vivre qu'une vie, c'est comme ne pas vivre du tout ». Vous le ressortirez quand vous croiserez Philippe Gandillet.

T

Pierre a dit…

Nous devons cette biographie sommaire à Lorédan Larchey mais si, d'aventure, elle manquait à un exemplaire que vous possédez, ce serait que l'éditeur a fait un tirage confidentiel de celui que je propose !

Vous avez raison de dire avec Kundera, Textor, que ne pouvoir vivre qu'une vie, c'est comme ne pas vivre du tout mais vivre deux vies à la fois, c'est quand même compliqué au niveau du style ;-)) Pierre

Nadia a dit…

Au lieu de les vivre en même temps, elles pourraient se succéder. Je dis toujours que notre passage sur terre est décidément trop bref, et qu'on n'a pas le temps de faire tout ce qu'on voudrait.

Anonyme a dit…

Surtout avec le temps qu'on perd sur internet !!
T