lundi 15 décembre 2014

Causerie du lundi de Philippe Gandillet : Pour entrer au Jockey-club...


Il est évident que si de nombreux bibliophiles ont la légitime impression d’appartenir à une communauté aux valeurs identiques, peu d’entre eux ont la chance, les moyens financiers ou le réseau nécessaire pour faire partie d’un club prestigieux. Il n’existe d’ailleurs plus, en France, de clubs bibliophiles dignes de ce nom. Ou plutôt, il n’en existe plus qu’un seul… mais au sein duquel vous n'imagineriez jamais rentrer, même en rêve : il s’agit du Jockey-Club.  Je serais enchanté de parrainer un des lecteurs de Pierre si l’occasion se présentait.


Modeste contribution à cette prestigieuse cooptation, il devra cependant acheter l’ouvrage que Pierre vous propose à la vente, aujourd’hui. Il s’agit de L’historique du Jockey-Club français depuis sa fondation jusqu'en 1871 inclusivement. Un de mes parrains me l’avait offert pour mon entrée. Je perpétuerai la tradition…


Bibliophiles, les membres du Jockey-Club ? Bien évidemment ! Et je peux même vous révéler que c’est Simier, lui-même, qui est à l’origine du fameux fer qui orne certains ouvrages de la maison ! Les clubs services – partenaires de nombreux salons du livre ancien - ne peuvent rivaliser… Ces cercles sont finalement bien plus sympathiques que les "Facebook" et autres réseaux sociaux dématérialisés qui peuplent la blogosphère. Je ne veux pas mépriser les excellents blogs de Pierre, Hugues et consort mais au Jockey-club, vous constaterez que l’usage du prénom, s’il est rare, n’empêche pas la vraie amitié ! Et la politesse veut que, même si l'on en doute, rien ne le laisse paraître… " C'est le seul endroit où on se fait des copains d'enfance à 60 ans" a coutume de dire, mon excellent ami R****, ancien Premier Ministre…


Il vous faudra, bien évidemment, passer la porte du cercle avec quelques beaux livres sous le bras, les maroquins ayant la préférence des vieux briscards de la politique et le cuir connolly celui des hommes d’industrie. Mais avant, il y aura l’épreuve de l’élection dans ce cercle que Marcel Proust décrivait comme le plus fermé au monde !


Debout, en jaquette, les parrains ont la mine des grands jours, grave, presque solennelle : si leur candidat est blackboulé par ceux qu'ils considèrent presque comme des membres de leur famille, ils le vivront comme un affront ! La tension, qui monte depuis quelques temps, est à son comble. Tout a commencé par la lettre que j’ai dû adresser à notre président - Le duc de B***, pour l’heure – afin de solliciter votre adhésion. Votre nom est désormais affiché dans l'enceinte très privée du Jockey-Club. C'est le point de départ de la campagne lancée par chaque parrain en faveur de son poulain. Moi, je dirais, par exemple : « C'est un garçon parfait, il a fait de brillantes études, il réussit très bien dans sa partie mais c’est en raison de sa passion pour les beaux livres que je l’ai choisi... et puis, vous le savez, c’est aussi pour faire plaisir à un petit libraire de Provence dont je vous ai déjà parlé… Ce sera un excellent membre ! ".


Ce n’est pas pour me vanter mais j’ai une grande influence sur mes collègues. Le respect qu’ils me portent et les nombreux signes d’amitiés qu’ils me témoignent font que les poulains que je parraine – il n’y a pas de candidat chez nous – ont toutes les chances d’être admis. Vous constaterez alors que "Le Jockey", c'est une grande famille. Ici, la règle est d’ailleurs de ne jamais se présenter entre membres. Tout le monde est supposé se connaître ; c’est plus facile, me direz-vous, quand on est un immortel comme moi. Je le concède…


De tous les cercles parisiens, le Jockey Club, créé en 1834 par la Société d'encouragement pour l'amélioration des races de chevaux, est donc l'un des plus sélects. Sans doute parce qu'il ne suffit pas, pour y entrer, d'avoir réussi dans les affaires ou d'occuper le devant de la scène médiatique. Ici, seuls le pedigree généalogique – quand on n’en a un - , la réputation ou la bienveillance d’un académicien suranné comptent. Votre amour des livres anciens et la passion pour la bibliophilie qui vous anime feront le reste. De plus, en entrant au Jockey, vous aurez accès à de nombreux cercles équivalents à l'étranger. Le Grolier Club vous ouvrira, alors, ses portes… Et tout ceci pour un seul ouvrage acheté à Pierre ? Quelle affaire ! Votre dévoué. Philippe Gandillet.


GIBERT (Charles-Camille-Alcée) et MASSA (Alexandre-Philippe Régnier, Marquis de). Historique du Jockey-Club français depuis sa fondation jusqu'en 1871 inclusivement. Paris, D. Jouaust, L. Cerf, Successeur, 1893. Un volume in-4 de 416-(3) pp. Reliure demi-maroquin lie de vin à coins, dos à nerfs, pièce de titre en maroquin havane, gardes colorées, tranche supérieure dorée. Edition originale. Tirée à 715 exemplaires. Un des 700 ex. sur vélin du Marais. Cet ouvrage, non mis dans le commerce et réservé aux seuls membres du Jockey-Club, contient des détails intéressants sur l'historique des courses et sur certaines écuries d'élevage ainsi que la liste des membres depuis la création du Jockey-Club. Ex-libris manuscrit avec les noms prestigieux des parrains de l’impétrant proprétaire (moitié du XXeme siècle). Une petite tâche sur le dos de la reliure, légèrement insolé. Très bel état général. Vendu

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