Il existait des "maladies à la mode", tout du moins au XVIIIe siècle… Je vous en présente aujourd'hui un exemple avec Les affections vaporeuses du sexe de Raulin, éditées, pour cet exemplaire, en 1759.
Les vapeurs étaient des "humeurs" qui déséquilibraient le système sympathique-vagal en donnant, chez les hypocondriaques et les hystériques, des symptômes de toutes sortes. Mais l’hystérie n'était plus, comme dans l’Antiquité, attachée aux mouvements de l’utérus qui voguait dans le corps de la femme (sic), ni, a fortiori, à quelque possession démoniaque.
L’art des vapeurs, c'était apprendre à défaillir, à bâiller quand il faut, médire, soupirer de façon langoureuse, émettre de petits cris, hoquets et roucoulements, "jouer la migraine", feindre l’ennui, l’infélicité, l’insomnie : Tout ceci afin de séduire, d’être insaisissable et se rendre maîtresse de tout. Car ces vapeurs sont le moyen de découvrir "l’effervescence de la sensibilité, l’égarement des passions, la confusion des sentiments" et de s’adonner à une vie raffinée et intense en plaisirs. La femme, seule selon la tradition, avait le pouvoir d'être hystérique [Raulin l'étudie cependant chez l'homme]. Nous sommes heureux de constater que la femme a changé au XXIe siècle et que le recours aux éventails de dentelle et aux sels d’Angleterre a disparu…
La définition puis la classification des troubles qu’on appelle d’abord "vapeurs" et qui prendront une si grande extension au XVIIIe siècle sous le nom de "maladies de nerfs" est abordée de façon méthodique par Raulin dans cet ouvrage. La Dissertation sur les vapeurs et les pertes de sang de Hunauld, précédant de quelques années le Traité des affections vaporeuses du sexe de Joseph Raulin ou le Traité des affections vaporeuses des deux sexes de Pierre Pomme, s’inscrivent dans cette même logique.
Ce traité pourrait, à tort, nous faire penser que la femme est folie, qu'elle est ange ou démon ! Si ce thème ne domine pas exclusivement, au moins se fait-il entendre partout avec insistance à cette époque : dans la presse féminine, les innombrables traités de morale ou d'éducation, les encyclopédies et la littérature même…
La raison ? Une sensibilité plus vive, dans une constitution plus faible l'expose aux ravages des maladies nerveuses. La vie de la matrice et les cycles féminins inquiètent si fort que l'époque est incapable d'un discours objectif. Virey parle encore des règles comme d'une " infirmité". L'auteur procède méthodiquement en donnant, tout d'abord, les causes prochaines, éloignées ou immédiates des vapeurs, puis propose différentes cures et, enfin, dispense les ""moyens de se préserver des effets des causes éloignés". Joseph Raulin (1708-1784), fut le médecin ordinaire de Louis XV. Pierre
RAULIN (Joseph). Traité des affections vaporeuses du sexe, Avec l'exposition de leurs symptômes, de leurs différentes causes, & de la méthode de les guérir. On y trouve aussi des connaissances relatives aux affections vaporeuses des Hommes. Paris, Jean-Thomas Hérissant, 1759. Format in-12. Seconde édition, la première ayant paru l'année précédente. Reliure plein veau marbré de l'époque, dos à 5 nerfs orné de caissons ornés, pièce de titre en maroquin cerise et lettres dorées. Tranches jaspées. [1f bl]- cxx- 440pp- [3ff]. Une mouillure ancienne sur le cuir du quatrième plat sans atteinte sur l'intérieur de l'ouvrage. Menus défauts de reliure. Bel exemplaire peu fréquent. 170 € + port
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10 commentaires:
Les femmes à vapeurs comme les machines à vapeur ont disparu de notre paysage, aujourd'hui.
On peut affirmer que grâce aux progrès pour l'égalité des sexes, la femme détient les mêmes avantages que les hommes.
De très beau avantages, parfois ;-)) Pierre
Je préfère les femmes à voiles... affaire de goût ;-)
B.
je pouffe ...
Ce petit exposé m'a rappelé à la grande période des sels (du carbonate d'ammoniaque) qu'on proposait aux femmes qui se pâmaient...
Et puis, il y a ces chaufferettes que l'on mettait sous les vertugadins qui devaient exciter les sens ;-)) Pierre
Il est loin le temps où les femmes se pâmaient, dommage.... la faute aux Chiennes de Garde sans doute ...
Le féminisme n’a jamais tué personne, disent-elles... Sauf le désir de plaire ! Pierre
Je ne suis pas sure que le sexe dit faible le soit tant que cela...
Bien à vous, Sandrine.
Nous sommes bien d'accord, Sandrine. A mesure que notre taux de testostérone diminue avec le temps, celui des femmes augmente parallèlement pour atteindre son équilibre quand nous le perdons.
Avec l'accroissement de l'espérance de vie, la proportion de femmes fortes qui nous entourent augmentera avec le temps. Cela tombe bien parce que nous ne demandons qu'à être protégés... Pierre
"Il est loin le temps où les femmes se pâmaient" écrit Textor.
Je ne suis pas d'accord ! :-) Les temps changent mais rien ne change finalement. Je ne préoccupe pas ici des droits des femmes qui bien évidemment doivent être à l'égal de ceux des hommes. Je vous parle des affaires d'hormones et de sentiments, pour ne pas dire de sexe. Et là...
"Le féminisme n’a jamais tué personne, disent-elles... Sauf le désir de plaire !" écrit Pierre. J'en ai bien peur. A confondre sexisme et gynéphilie on n'arrivera à rien de bon.
Enfin moi ce que je vous en dis...
J'invite les hommes modernes et les femmes pas frileuses à aller visiter le Temple de la Grande Femelle. C'est un site très sérieux. http://femelletemple.wordpress.com/
Bonne visite !
B.
Je suis allé faire un petit tour. Site à l'esprit pénétrant mais non dénué d’intérêt pour un anatomiste...
Cela m'a donné des vapeurs ;-)) Pierre
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