mardi 30 juin 2015

Le Grand Meaulnes d'Alain Fournier aux éditions de Cluny, illustré par Pierre Gandon.


Il arriva chez nous un dimanche de novembre 189... Je continue à dire « chez nous », bien que la maison ne nous appartienne plus. Nous avons quitté le pays depuis bientôt quinze ans et nous n'y reviendrons certainement jamais. Nous habitions les bâtiments du Cours supérieur de Sainte-Agathe. Mon père, que j'appelais M. Seurel, comme les autres élèves, y dirigeait à la fois le Cours supérieur, où l'on préparait le brevet d'instituteur, et le Cours moyen. Ma mère faisait la petite classe...


Vous avez peut-être reconnu cette introduction à un célèbre roman du 20eme siècle qui a bercé plus d'une langueur adolescente. Alain n’est pas le prénom de l’auteur du Grand Meaulnes : il s’appelait Henri Alban Fournier. Ce n’est qu’en décembre 1907 qu’il choisit ce demi-pseudonyme littéraire, en faisant paraître dans La Grande Revue un article intitulé « Le corps de la femme », pour se distinguer d’un célèbre coureur automobile de l’époque.


Si l'on lit l'excellent site dédié à l'auteur on apprendra que Henri Fournier est né en 1886 à la Chapelle-d'Angillon, au nord du département du Cher, dans la petite maison de ses grands-parents maternels. Fils d'instituteurs, il passe son enfance en Berry. Après cinq années passées à Marçais, près de Saint-Amand-Monrond, il suit son père, nommé en 1891 directeur de l'école d'Epineuil-le-Fleuriel, le dernier village au sud du département, non loin de Montluçon.


L’enfant y sera son élève jusqu'en 1898, avant d'entrer en sixième, comme pensionnaire au lycée Voltaire à Paris, où il restera trois ans. En 1901, songeant à devenir marin, il rentre en seconde au lycée de Brest pour préparer l’École Navale. Mais il y renonce au bout d’un an et vient, en janvier 1903, passer son baccalauréat au lycée de Bourges. En octobre 1903, Henri Fournier va préparer l'Ecole normale supérieure au lycée Lakanal à Sceaux. C'est là qu'il rencontre Jacques Rivière, jeune bourgeois bordelais qui devient bientôt son meilleur ami puis Yvonne de Quiévrecourt qui sera sa muse inaccessible... A partir de 1905, ils échangeront jusqu'en 1914 une importante et passionnante correspondance. Jacques deviendra, en 1909, son beau-frère en épousant Isabelle Fournier, de trois ans plus jeune que son frère.


Après son service militaire, Alain-Fournier cherche un emploi, il trouve en avril 1910 un poste de rédacteur à Paris-Journal. Il rencontre Jeanne Bruneau, une jeune modiste, originaire de Bourges. Il se donne d’abord tout entier à elle, mais elle ne le comprend pas. Le 19 octobre 1910, il écrit à Jacques et sa sœur : « C'est fini ». Ils se reverront pourtant et la rupture définitive ne se produira qu'au mois d'avril 1912. Alain-Fournier confiera dans sa correspondance : « J'ai fait tout cela pour me prouver à moi-même que je n'avais pas trouvé l'amour. »


A partir de 1910, Alain-Fournier, installé rue Cassini, se met pour de bon à l'écriture du Grand Meaulnes. En 1912, il quitte la rédaction de Paris-Journal, devient le secrétaire de Claude Casimir-Perier avant d'entamer avec la femme de ce dernier, la célèbre actrice « Madame Simone », de son vrai nom Pauline Benda, une liaison passionnée. Achevé au début de 1913, Le Grand Meaulnes paraît d'abord dans La Nouvelle Revue Française (de juillet à novembre 1913), puis en volume chez Emile-Paul. Sélectionné pour le prix Goncourt, le roman obtient 5 voix au dixième tour de scrutin. Pourtant au onzième tour, c'est Le Peuple de la Mer de Marc Elder qui sera couronné. La presse est cependant très élogieuse.


Mobilisé dès la déclaration de guerre, le 1er août 1914, Alain Fournier, alors en vacances à Cambo-les-Bains avec Simone, rejoint Mirande, puis le front de Lorraine comme lieutenant d'infanterie, le 23 août ; il participe à trois batailles très meurtrières autour de Verdun. Fin septembre, il est porté disparu, au cours d’un combat dans le bois de Saint-Remy, sur la crête des Hauts-de-Meuse. On saura plus tard qu’il a été tué ainsi que son capitaine et plusieurs autres hommes de son régiment, dans l’après-midi du 22 septembre. Il n'avait pas encore vingt-huit ans… C'est comme cela que l'on devient un mythe. Pierre


FOURNIER (Alain). Le Grand Meaulnes. Paris, Éditions De Cluny, 1936. Un fort volume in-8. Broché, couverture illustrée, frontispice, 1 f de titre en rouge et noir à encadrement stylisé, 308 pp. Illustrations dans le texte. Tirage unique à 2000 exemplaires numérotés sur pur fil Lafuma et 80 ex. H.C. Bel exemplaire sans défaut. 130 € + port

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