samedi 23 janvier 2010

J'aime bien lire dans le train.


Six heures de voyage laissent le temps de rêvasser à la fenêtre de l'étage supérieur du wagon de T.G.V. Entre ces moments d'introspection, face à la beauté de la nature qui défile, je lis… J'ai choisi de vous proposer deux ouvrages si vous êtes, comme moi, amenés à voyager par le train ou l'avion bientôt. Une sélection cohérente comme vous pourrez le constater.

1 - Introduction à la vie dévote par François de Sales. en deux tomes aux "Belles lettres", 1961
2 - Anthologie de la poésie érotique par Pierre Perret aux éditions du Nil, 1995.


Avant que de vous parler de ces livres, une anecdote que vous garderez secrète. J'avais en face de ma tablette, une jeune femme comme on en trouve beaucoup de nos jours lorsque voyage rime avec travail. Je n'ai pu apercevoir son visage qu'en de brefs moments où elle levait le nez au dessus de son ordinateur portable ; cheveux secs tirés en arrière, jeans élimé aux manches, tennis avachies, sweet-shirt ample et confortable, sans maquillage et sans charme réel. Et bien, elle n'a provoqué en moi aucun fantasme à la lecture de "La vie dévote", ce qui en soi est logique mais surtout elle m'a laissé absolument inébranlable (sic) même au moment de déguster les poèmes érotiques assemblés par notre chanteur populaire. C'est à désespérer des jeunes femmes de notre époque ou alors, c'est normal Docteur... et là je m'inquiète.


L'introduction à la vie dévote nécessite en préambule un éclaircissement. Le mot dévot ne doit pas être pris dans le sens péjoratif donné par Molière mais dans le sens étymologique d'une vie consacrée à Dieu. Avant François de Sales, cette vie ne pouvait être accordée que par une vie cloîtrée. Il nous explique ici, en termes simples, que cette perfection chrétienne peut être accordée à chacun de nous, dans notre vie de tous les jours, à condition de respecter certaines règles. Il suffit de se détacher du péché mais aussi de toute affection pour le péché.

Son âme s'élevant au-delà de ses yeux
Avait au créateur uni la créature,
Et marchant sur la terre, il était dans les cieux.


Vous comprendrez, avec ce que je vous ai dit précédemment, qu'un petit tour en purgatoire me sera vraisemblablement nécessaire… La langue et le style de François de Sales, de forte inspiration Donatienne, ont ceci de baroque qu'ils utilisent de nombreux archaïsmes ; à ce que pour afin que / accoiser pour calmer ; de nombreux latinismes ; bénéfice pour bienfait / impétrer pour obtenir ; sans alourdir une pensée toujours claire et vive et agrémentée d'images pédagogiques. La principale qualité de cet ouvrage, en dehors du son message novateur, est la grâce qui s'attache à ces propos et la réelle gentillesse de son auteur.

C'est donc dans un état de parfaite harmonie avec mon âme que je me suis attaqué, quelques temps plus tard, à l'anthologie de la poésie érotique de Pierre Perret afin d'être en parfaite harmonie avec mon corps.

D'abord il faut définir le concept : l'érotisme c'est ce qui est cochon, coquin, croustillant, débauché, dépravé, déréglé, dévergondé, gaillard, gaulois, gras, graveleux, grivois, impudique, inconvenant, indécent, leste, libertin, libidineux, malsain, obscène, polisson et salace. Tout le reste, c'est de la pornographie !

Source d'amour, fontaine de douceur
Petit ruisseau apaisant toute ardeur,
Mal et langueur ; ô lieu solacieux…


Puisqu'il s'agit d'un florilège chronologique, il est plus aisé de déterminer quelle période nous est agréable. Par exemple, mon diencéphale qui est de conception ancienne, a indiqué au reste de mon organisme que les poésies médiévales où l'on appelle un chat un chat, où les femmes sont actrices et le plaisir guilleret avaient ma préférence. Entre deux poèmes, une pensée de Woody Allen m'est revenue " Ma vie sexuelle est un tel échec que je me suis inscrit à un concours. Demain matin, je fais la demi finale avec le Pape ! ". Comme je souriais, la jeune femme en face de moi m'a souri aussi… Pierre

SALES (François de). Introduction à la vie dévote. 2tomes petit in-8. Paris "les belles lettres", texte établi par Charles Florisoone, deuxième édition, 1961, état neuf. 26 € + port

PERRET (Pierre). Anthologie de la poésie érotique. Nil édition. 1995. in-8, 672p. Comme neuf. 20 € + port

9 commentaires:

Anonyme a dit…

Aujourd'hui il est de bon ton d'avoir toujours l'air de sortir d'une poubelle, les jeunes se donnent beaucoup de mal pour ça.

René de BlC

Jeanmichel a dit…

Cette "jeune femme aux cheveux secs" a quand même suffisamment ébranlé le narrateur pour qu'il s'en souvienne au point d'en faire l'héroïne d'un incipit prometteur.
Il pourrait être intéressant de lire ce qu'elle-même a écrit dans son blog au sujet de cet homme plus très jeune qui la fixait avec tant d'insistance...

Anonyme a dit…

Et cette belle rousse flamboyante de l'île Saint Louis en ce bel été de 2007...

On s'éloigne de la bibliophilie mais ce n'est pas si mauvais...

Romantic M.

Pierre a dit…

On s'éloignerait de la bibliophilie si les livres n'étaient pas remplis d'abstractions, de mots, de phrases, d'idées et d'images.

La pensée est ainsi faite que le plaisir qu'on a, à regarder un livre, une reliure, une gravure est souvent lié à l'impression qu'a laissé sur nous le texte qui y est associé.

Je connais un bibliographe mesuré qui peut devenir prolixe en décrivant la disparition de l'imprimeur Cazin... La bibliophilie se nourrit de sentiments.

Pierre

Anonyme a dit…

Alors je continue à penser à ma belle rousse perchées sur les flots gris de la Seine...

Romantic M.

Jeanmichel a dit…

Sur un bateau porté par les "flots gris de la Seine" naquit de même, dans un éblouissement, l'amour indéfectible de Frédéric Moreau pour Madame Arnoux, tel que le relate Gustave Flaubert dans l'Education sentimentale.
Faut-il toujours ce contraste pour engendrer des amours acharnées ?

Anonyme a dit…

Mon amour, qui ne fut pas, ne peut donc être aussi célèbre que celui que vous dites Jean-Michel, pourtant l'image était belle et la damoiselle charmeuse... mais le rêve est resté et l'image s'est envolée...

Romantic M.

Pierre a dit…

L'exacerbation de l'imaginaire chère au poète romantique à ceci d'inachevée qu'elle oublie l'estocade. C'est pourquoi les poèmes médiévaux, dans des éditions illustrées et à petit tirage, sont recherchées des bibliophiles.

Je n'en possède pas, je le confesse...

Pierre

Pierre a dit…

Il y a un peu plus d'un an, j'avais été voir l'exposition "la bibliothèque de l'Enfer" à la BNF. Je me rappelle avoir noté un fossé entre la littérature érotique jusqu'au 20eme siècle et la pornographie avantageusement véhiculée par la pellicule ces dernières années. Et pourtant, on parlait de la même chose !

Le "curiosa" est vraiment un domaine qu'il va me falloir explorer. Pierre