samedi 12 novembre 2011

Paul-Jean Toulet, Carlègle et Léon Pichon. Pour l'amour du beau et bon livre...

Paul-Jean Toulet (1867 / 1920) fut un écrivain et poète français, célèbre par ses contrerimes, une forme poétique qu'il avait créée [trois "e" d'affilée, ça ne se refuse pas…] ; "célèbre" selon wikipédia, il faut quand même le mentionner !


Comme ses livres ne se vendaient pas, il devint l'un des nègres de Willy, l'ex-mari de Colette. L'auteur de l'ouvrage que je vous propose aujourd'hui – Mon ami Nane – prit vers 1911 la décision de vivre au lit et de ne recevoir qu'après 10heures du soir ses amis Curnonsky, Charles Maurras, Henri de Régnier, Emile Henriot et Edmond Jaloux. Il se levait deux fois par semaine, vers six heures de l'après-midi : Le mardi pour dîner chez Claude Debussy, le Jeudi pour se rendre au Bar de la Paix. Henriot écrivait dans son courrier littéraire : Juché sur un haut tabouret, la bouche ironique et de biais, comme si de mâcher ses mots, il en conservait longtemps un goût d'amertume…


Sa fréquentation des salons mondains et les boudoirs demi-mondains de la belle époque (1905) qu'il évoque dans Mon Amie Nane lui valurent bien des chagrins. Il travailla beaucoup et se livra, par professionnalisme dirons-nous, à divers excès dont l'alcool et l'opium. Mon Amie Nane est un roman à la première personne empreint d'érotisme, d'humour et de mélancolie. Un narrateur y fait le récit de ses relations avec Nane (de nom de guerre Hannaïs Dunois), depuis leur rencontre jusqu'à leur séparation. La figure centrale du roman est le miroir. Il existe deux versions de la rencontre, et deux versions de la séparation (la mort et le mariage, dans cet ordre). Après sa mort, un comité voulu lui ériger une statue à l'île Maurice, où il avait vécu. C'est Bernardin de Saint-Pierre qui le coiffa sur le socle. Ce sera donc à vous, chers lecteurs de lui construire sa postérité…


Charles Émile Egli dit Carlègle (1877 /1937) est un illustrateur et peintre d'origine suisse contemporain de Toulet. Il a illustré des journaux satiriques tel que L'Assiette au beurre, Le Rire ou La Vie Parisienne, mais aussi L'Illustration, et de nombreux livres et textes de La Fontaine, Ronsard, Verlaine, Henri de Régnier, etc… Bertrand qui l'a brillamment présenté sur le bibliomane moderne nous dit de lui qu'il n'aimait que "peindre des nus". Plutôt de sexe féminin, alors !


Comme dans l'exemplaire proposé, il travailla dans l'édition de livres de luxe, notamment avec l'imprimeur Léon Pichon qui fut un fervent soutien de la gravure sur bois. La collaboration entre Pichon et Carlègle se fera jusqu’en 1928, donnant au total 13 ouvrages, dont Mon amie Nane de Toulet, en 1925. L'ouvrage que je propose à la vente aujourd'hui est le fruit du travail et du talent de ces trois passionnés.


Il s'agit d'une édition numérotée à 585 exemplaires dont cinq cents sur vélin à la forme des papeteries d'Arches dans un joli format petit in quarto. Un ouvrage pour bibliophile exigeant, sans nul doute ! Pierre


TOULET (Paul-Jean). Mon ami Nane. Paris. Pichon. 1925.1 volume petit in-4, broché, couverture rempliée illustrée.[1 f. bl], 199 pp,[4 ff dont table], plaquette publicitaire pour "Travaux …"de J. de Pesqudoux.. Un des 500 numérotés sur vélin d'Arches. Celui-ci n° 496. L'ouvrage est orné de 18 compositions originales gravées en noir et jaune d'après Carlègle. Cristal d'origine. Bel exemplaire en parfait état. Vendu

13 commentaires:

calamar a dit…

bel ouvrage, d'un bon éditeur, bon auteur, et bon illustrateur. Que des qualités ! à acheter tout de suite, à ce prix, c'est donné !

Pierre a dit…

L'ouvrage est dans un bel état de conservation. Il me semble être une cote raisonnable.

Si je ne le vendais pas, ce qui est tout a fait envisageable, cela ne signifierait pas que je me suis trompé dans mon estimation mais qu'il n'y a plus d'acheteur pour ce type d'ouvrage de semi-luxe. Je pourrais alors le proposer à 25 euros que cela ne changerait pas les choses pour cela ;-))

Comme beaucoup d'entre-nous je me pose la question de savoir si la période actuelle de rigueur budgétaire va avoir une influence sur mon petit commerce. Je vends des produits dont le besoin est superflu, c'est évident ! Mais est-ce des produits dont l'intérêt n'est pas devenu superflu, aussi ?

J'ai deux enfants qui travaillent dans la grande distribution (sport & mode). Ils devront s'adapter sur l'offre et les prix. Moi, mon défi, c'est de trouver la demande ;-))

Vous pouvez me donner votre avis. Pierre

calamar a dit…

le superflu est nécessaire.

pascalmarty a dit…

Le Télérama de la semaine dernière faisait sa couve (signée Sempé) sur l'éventuelle disparition des librairies. J'espère qu'on n'en arrivera jamais là. La vie perdrait une bonne part de volupté si l'on devait renoncer à se plonger dans les rayons comme dans un bain chaud et parfumé. Je n'ai jamais voulu croire que iPad ou Kindle remplaceraient jamais les livres papier. Mais finalement, est-ce que je sais ? Je ne suis pas de la génération qui n'aura jamais rien connu d'autre. Peut-être les libraires seront-ils un jour aussi anachroniques que les relieurs ou les raccommodeurs de porcelaine.
Mais si cela peut rassurer du côté de Tarascon, le libraire d'ancien s'adressant de toutes façons à ce que les marketeurs appellent un public de niche, il est probable que son avenir soit finalement moins menacé que celui de son confrère qui essaiera de fourguer le Goncourt imprimé sur des pages qui se déchirent.

Anonyme a dit…

Décidément Pierre n'en sort pas ! Sa reconversion qu'on pensait totale ne l'empêche pas de toujours avoir à se préoccuper d'un public de niche. :-)

Les livres anciens ont un jour été neufs. Sans livre neuf, pas de livre ancien.

Jean-Michel

Anonyme a dit…

J'ai trouvé un nouveau nom pour mon nouveau magasin: Au relieur anachronique.
(Le premier qui dit: (Dominique)-nique-nique a un gage!)
Il faut tenir. Pendant que certains s'essouflent, au bout de 15 ans, d'autres se relancent.
Qui va montrer aux enfants que le livre dont ils tournent les pages virtuellement , est issu d'une technologie qui le copie. C'est un rêve de penser que nous pourrons nous passer de matériel.
Certains livres auxquels je pense, intéressent peu de personnes, et ne seront jamais numérisés, pourtant ce sont des indispensables pour moi et ma curiosité.(ex: dictionnaire du surréalisme) les informations que je trouve sur le net ne sont pas à la hauteur de ce que je trouve dans ce livre et que je compulse depuis 15 ans, sans m'en lasser.
Sandrine.

pascalmarty a dit…

Ah, excellent, le public de niche, Jean-Michel ! Ça ne m'avait même pas effleuré.
Sinon, bien sûr que s'il n'y avait jamais eu de livres neufs il n'y aurait pas aujourd'hui de livres anciens. Mais aujourd'hui, même s'il n'y a plus de livres neufs, il restera toujours des livres anciens. Sauf bien sûr s'il prenait à des inconditionnels des liseuses électroniques l'idée de les brûler dans un grand élan vers le progrès… (Ciel, quelle pensée horrifiante !…)

pascalmarty a dit…

Ceci dit, l'idée horrifiante c'est le pitch de Farenheit 451. Alors on ne sait jamais, restons quand même vigilants (et exerçons notre mémoire…).

Anonyme a dit…

Oui, je suis d'accord. On ne sait jamais quand une société bascule dans l'absurde... le fait est que nous vivons dans une drôle d'ambiance quand même. = Quelques géants qui choisissent de numériser en entier ou pas, voir pas du tout! ce que nous devons lire. La librairie ou une bibliothèque ne nous imposent rien. A nous de choisir en face d'un mur pleins de livres.

Pierre a dit…

Chers amis lecteurs, vos commentaires me rassurent. Je suis parfois enclin au doute. Et puis cet après-midi, soleil généreux, du monde aux terrasses des cafés, un marché des santons bondé, un marché de Noël qui s'y adossait où les étals regorgeaient de victuailles appétissantes... Non! Je vous le dis : La crise est derrière nous ;-)) Pierre

Anonyme a dit…

… Puisque Télérama annonce la fin des librairies, j’étais en train d’essayer d’imaginer un monde sans livre, sans librairie, sans relieur.... Difficile … Pourtant si. La France a déjà connu le phénomène dans le passé. Par exemple, du temps d’Attila, roi des Huns (434 à 453). La littérature et la transmission du savoir des Huns étaient uniquement orales, à travers les épopées et les poèmes chantés se transmettaient de génération en génération.
Pas besoin de monter une bibliothèque portative sur son cheval !

Textor

Anonyme a dit…

Le livre est néanmoins fragile, beaucoup moins il est vrai qu'un DVD ou qu'un disque dur, mais la seule transmission écrite restant valable à l'échelle humaine c'est la littérature rupestre, qu'on pourrait imaginer portative sous forme de pièces de monnaie dans les exergues desquelles s'inscriraient, écrites en tout petit, des sagas entières. Ray Bradbury devrait alors faire appel aux chaleurs vraiment infernales pour écrire un "Farenheit 1652".
Alors, toujours pas de preneur à 25 euros dans ces enchères descendantes ? Quand je disais que Pierre avait la fibre du bonimenteur... :-)

Jean-Michel

Pierre a dit…

25 €, c'est un concept, Jean-Michel ! Un concept ;-)) Pierre