Il s'agissait alors d'un voyage historique,
archéologique, descriptif et pittoresque… L'auteur ne pouvait pas prévoir que ces
quatre pays allaient devenir, deux siècles plus tard, le théâtre d'un conflit
politico-religieux à l'origine de la troisième guerre mondiale. Le baron Isidore, Séverin Justin Taylor (1789 –1879) fut un célèbre
voyageur en Orient. Issu d’une
famille d’origine irlandaise naturalisée française, il débute dans l’armée, se
rallie à Louis XVIII, voyage beaucoup en Europe et ne prend sa retraite de
l’armée qu’en 1843. Il est fait baron en 1825, lors du sacre de Charles X. C'est sa
carrière dans le monde de la culture qui le rendit célèbre.
Accueilli dans
le cénacle de Charles Nodier, foyer de
la vie romantique à la mode, il
s’essaye à la vie littéraire – il écrit notamment un Ismaël et Maryam ou
l’Arabe et la chrétienne (1821), pièce de théâtre proche du style de
Byron. Véritable touche-à-tout, il
conçoit en 1818 le projet d’un immense inventaire des monuments de la France
pour revaloriser un patrimoine architectural médiéval dont les romantiques
redécouvrent la splendeur. Il est l'artisan majeur de la publication des Voyages
pittoresques et romantiques de l’ancienne France (1820-1863) dont Adrien
Dauzats, illustrateur, fut l’un des
collaborateursles plus réguliers et fit intervenir notamment Géricault,
Ingres et le jeune Viollet-le-Duc.
Il est nommé en
1824 commissaire-royal du Théâtre-Français. En 1828, il est envoyé en mission à
ses frais pour quatre mois en Égypte, peut-être pour obtenir un obélisque, mais surtout dans le but de
publier un ouvrage sur ce pays. En janvier 1830, il est chargé officiellement
par le gouvernement français de faire transporter l’obélisque d’Alexandrie échu
à la France et d’obtenir ceux de Louxor. Il diffère un peu son départ en raison,
le 25 février 1830, de la première d’Hernani qu’il met en place au
Théâtre-Français et qui déchaine la célèbre bataille.
En Égypte, les
négociations qu’il faillit d’abord faire échouer sont menées par le consul
général de France, Mimaut, et Taylor ne reste que spectateur. D’une naïveté
trop coupable et inconscient des difficultés techniques soulevées par le
transport d’un monolithe de cette importance, il pense que l’opération peut se
faire en quelques mois et délègue sa tâche à l’ingénieur Linant de
Bellefonds, présent alors en Égypte.
Plus qu’à Louxor où se trouve l’objet de sa mission, ce voyage le conduit au
Sinaï en Palestine, en Syrie et au Liban. C’est à Baalbek qu’il apprend le
changement de régime en France, ce qui l’oblige à rentrer à Paris.
Son talent dans
cette affaire consista surtout à faire passer son échec comme une réussite
(Bonaparte avait fait de même 50 ans plus tôt !). Il présente sa mission comme peu onéreuse, alors que les sommes
conséquentes engagées dans son voyage quasiment personnel le furent en fait en
pure perte pour le budget national. Il appartint donc à un ingénieur moins
mondain mais tout entier investi dans sa mission, Lebas, d’organiser au prix de
plusieurs années de labeur le transfert de l’obélisque jusqu’à Paris. De ces voyages
naissent néanmoins en 1837 une
somptueuse publication : La Syrie, l’Égypte, la Palestine et la Judée
considérées sous leur aspect historique, archéologique, descriptif et
pittoresque (avec Louis Reybaud). C'est cet ouvrage que je vous propose
aujourd'hui à la vente… Et plus particulièrement le tome II consacré à L'Egypte
! De nombreuses gravures issues notamment
des dessins de Dauzats et de Mayer lors de la mission de 1830 illustrent cette œuvre.
En 1853, il
reprend son texte sous le pseudonyme de Laorty-Hadji (anagramme de Taylor),
dans un petit volume sans illustration sur La Syrie, la Palestine et la Judée.
Pèlerinage à Jérusalem et aux lieux saints ainsi qu’un second en 1856 sur
L’Égypte. Entre-temps, il
effectue une importante mission en Espagne pour acheter une collection de plus
de 400 chefs-d’œuvre de maîtres espagnols afin de compléter la collection du
Louvre. Nommé inspecteur des Beaux-Arts en 1838 (il finira membre de l’Institut
et sénateur), il s’attache à mettre en place de nombreuses associations
d’artistes protégeant les professions et les métiers d’art qui se développent
au cours de ce siècle. Ce sera là, avec l’immense inventaire monumental, la
grande œuvre de sa vie. A noter que la Fondation Taylor existe encore à Paris et assure toujours la promotion de jeunes artistes... Pierre
TAYLOR (Baron) & REYBAUD (Louis). La Syrie, L'Égypte,
La Palestine et la Judée, considérées sous leur aspect historique,
archéologique, descriptif et pittoresque par Le Baron Taylor et Louis Reybaud.
Paris, Au bureau central des dictionnaires, chez mame, 1837. Un volume in-4. Reliure contemporaine, demi basane glacée à
coins, dos à nerfs, filets dorés, titre en lettres dorées, gardes colorées. Tome
II de ce voyage qui relate le voyage en Egypte. Pages 201 à347. Mention de 100 gravures sur acier par
Dauzats, Mayer, Ciceri fils, et gravées par Finden. Brunissures et rousseurs. Bon
document de travail dans une belle reliure. 130 € + port
2 commentaires:
"il participe à la publication"... c'est un peu réducteur, le rôle de Nodier se limitant aux 2 premiers livres ; après la Franche-Comté Taylor est seul aux commandes, et pratiquement seul à l'écriture.
Je corrige, Calamar. Je pensais qu'il était essentiellement intervenu en tant qu’illustrateur dans cette œuvre. Pierre
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