mardi 24 novembre 2015

L'Année Terrible : Paris, chez Michel Lévy frères, première édition illustrée de 1873 peu référencée.


On nous annonce la guerre,  le chaos, et moi, je pense ce matin à une autre époque aussi troublée. C'était il y a un siècle et demi et c'était déjà une guerre qui n'avait pas de nom… On l'appelait "La commune" : L'homme, quand il est plein de haine, n'a jamais raison - L'homme quand il est endoctriné n'a plus sa raison - L'homme, quand il s''attaque à la culture d'un pays, à sa culture en général, n'a jamais raison - Hier, le but était de faire bruler une bibliothèque ; aujourd'hui, on prend pour cible le sport ou le spectacle !


Tu viens d'incendier la bibliothèque ?
Oui. J'ai mis le feu, là.

Mais c'est un crime inouï !
Crime commis par toi contre toi-même, infâme !
Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !
C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler !
Ce que ta rage impie et folle ose brûler,
C'est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage
Le livre, hostile au maître, est à ton avantage.
Le livre a toujours pris fait et cause pour toi.
Une bibliothèque est un acte de foi […]
Tu jettes, misérable, une torche enflammée !
De tout l'esprit humain tu fais de la fumée !
As-tu donc oublié que ton libérateur,
C'est le livre ? Le livre est là sur la hauteur ;
Il luit ; parce qu'il brille et qu'il les illumine,
Il détruit l'échafaud, la guerre, la famine […]
Il est ton médecin, ton guide, ton gardien.
Ta haine, il la guérit ; ta démence, il te l'ôte.
Voilà ce que tu perds, hélas, et par ta faute !
Le livre est ta richesse à toi ! C'est le savoir,
Le droit, la vérité, la vertu, le devoir,
Le progrès, la raison dissipant tout délire.
Et tu détruis cela, toi !

Je ne sais pas lire !


Lorsqu’il écrit son poème, L’Année terrible (août 1870 à juillet 1871) en 1871, Victor Hugo n’est plus exactement l’écrivain romantique qu’il fut par le passé. Certes, il revendique toujours le droit à l’expression libre de ses sentiments mais ces derniers semblent cernés par la raison. En effet, l’incendie de la bibliothèque de l’Arsenal par un jeune analphabète lors de la Commune de Paris montre que le poète est dépassé par le déferlement d’une violence anarchique. La diatribe qui s’ensuit contre les brûleurs de livres semble révéler, de toute évidence, à la fois un combat perdu d’avance mais aussi et surtout une passion intacte de la part de l’auteur. Voici un hommage vibrant au livre malgré l’incompréhension finale !


Je vous propose de découvrir aujourd'hui un exemplaire peu fréquent à la vente – et dans tous les cas, absent des rayonnages de mes confrères : une édition de 1873 illustrée par Léopold Flameng avec un frontispice original de Victor Hugo. On connait bien les éditions de 1874 ; on sait que l'édition originale de L'Année Terrible est de 1872, mais cette publication datée de 1873 m'était inconnue. L'exemplaire est frais bien que marqué de rousseurs, les marges sont grandes mais celles du libraire restent raisonnables… Pierre


HUGO (Victor). L'Année Terrible. Paris, chez Michel Lévy frères, 1873. Un volume grand in-8 (16cm/24cm). Reliure demi-chagrin cerise, dos à nerfs, caissons fleuronnés, titre en lettres dorées, papier de garde coloré, tranches mouchetées. 1 portrait frontispice, illustrations hors textes de Léopold Flameng. La dernière gravure signée VH (Victor Hugo ?). [1f bl], [5ff titre, frontispice, avis], 427 pages, [1f bl]. Rousseurs. Bel état d'ensemble. 90 € + port

2 commentaires:

Pierre a dit…

Précision d’orfèvre en la matière : C'est bien la première édition illustrée. Elle est répertoriée par Vicaire T4 345. Elle comporte un portrait et 14 gravures. 4 gravures ont été supprimées par la censure à savoir p40 a prince prince et demi, P41 digne l'un de l'autre, p200 a ceux qui reparlent de fraternité et pages 309 juin chap IX. Il faudrait quand même vérifier car si elles y sont c'est un merle blanc ! Ces 4 gravures ont été rétablies ensuite dans l'édition Eugene Hugues.

Merci Daniel ! Pierre ;-))

Daniel a dit…

Plutôt merci Vicaire, il connait bien le chapitre, ce qui aide souvent les candides bibliophiles.

Daniel ;))

PS juste un peu frustré ne pas avoir vu la reliure, la guirlande du contreplat laisse esperer un joli maroquin XIXe ?