lundi 28 septembre 2009

Causerie du lundi de Philippe Gandillet : Le mariage polygamique.


Chers amis,

Pierre est parti quelques jours dans sa famille. Il me confiait, il y a peu, qu’il regrettait d’avoir perdu ses racines. En avait-t-il vraiment ? Je crois que comme tout bon Malouin qui se respecte, poussé par le vent du large, il était plus apte à flotter qu’à s’enraciner. C’est tout ! Mais laissons là cette réflexion poétique réservée à d’émérites initiés à la sensibilité exacerbée et à quelques esprits étincelants pour revenir à des considérations plus terre à terre…

En partant, dans sa précipitation, Pierre a fermé le rideau de fer de sa librairie en oubliant à l’intérieur votre chroniqueur préféré. Quel étourdi ! Heureusement, ma bonne constitution me permet de me contenter de nourritures spirituelles et mon absence ne sera cruelle qu’à « Bayard » mon compagnon fidèle et « Anne-charlotte » mon épouse infidèle.

Vous-ai-je-dit que j’étais marié à une adorable pimprenelle de trente ans ma cadette ? Nous formons un couple parfaitement bien accordé et nous sommes très complémentaires. Elle possède, par exemple, un attrait certain pour tout ce qui touche à la bagatelle et à la gaudriole. Je suis de cet âge où ces questions perdent un intérêt direct. N’est-ce pas merveilleux ?


C’est pourquoi j’ai lu avec beaucoup d’attention un livre de Georges Anquetil, découvert sur les rayonnages de la librairie et que je me propose de vous faire partager aujourd’hui . « La Maitresse Légitime-Essai sur le mariage polygamique ». Tout un programme. Cet ouvrage édité au début du 20eme siècle serait surement censuré aujourd’hui pour son caractère subversif sauf à y voir une critique politiquement incorrecte de traditions communautaires et religieuses.


La première partie est avant tout éducative et technique. Elle est un constat alarmant de la situation démographique qui prévalait après la première guerre mondiale. Je vous en livre quelques extraits. « Il arrivera malheureusement, dans un quart de siècle, que les quarante millions de français soient réduits à vingt-cinq ». Ce chiffre a bien failli être atteint mais grâce à la deuxième guerre mondiale, il faut le reconnaitre…

L’auteur en arrive alors mathématiquement à la seule solution envisageable en temps de crise : La polygamie, et par voie de conséquence la polygynie, c'est-à-dire l’union d’un homme avec plusieurs femmes, seule réponse possible à ce problème tant il est reconnu que la polyandrie est contre-nature pour la femme qui est physiologiquement éloignée de toute chose qui touche au plaisir ! (je résume).

Le sujet est développé sur 286 pages. Le mot « nature » étant cité 163 fois, j’en déduis que cette pratique peut être considérée comme éco-citoyenne et qu’il est judicieux de laisser l’effet se faire… (pour Montag). A mots couverts, la « physiologie de l’amour moderne » chère à Paul Bourget est évoquée ici et l’auteur constate que le besoin qui est irrépressible chez l’homme s’oppose à la continence qui est naturelle chez la femme... (quelqu'un veut développer ?)


C’est la deuxième partie qui est la plus intéressante en ce qu’elle présente les commentaires pertinents des plus grands esprits de l’époque sur le sujet. Attardons-nous sur quelques pensées !
Prudent « Si je m’applique la polygamie, il va falloir que j’admette la polyandrie. Alors, un monsieur pourrait avoir, par exemple, trois femmes dont chacune aurait trois maris. A première vue, ça parait plutôt compliqué » JH Rosny aîné.
Légitimiste « Un jury vient d’acquitter un bonhomme qui avait résolu le problème de rendre deux femmes heureuses à la fois. Il a sans doute estimé qu’il valait mieux condamner celui qui rendait son unique femme malheureuse » La Fouchardière.
Défaitiste « Les hommes étant, par essence, polygames mais possédant un fort esprit de contradiction, le risque n’est-il pas qu’ils deviennent monogame ? » Henri Duvernois
Pragmatique « On a du mal à garder ses domestiques. Alors que serait-ce avec plusieurs femmes ? » René Fauchois
Compassionnel « Je crois qu’il est indispensable qu’un homme ait au moins deux femmes légitimes ; mais on ne forcerait personne, bien entendu » Monseigneur Pillon
Dubitatif « La polygamie me parait devoir entrainer bien des fatigues pour les hommes âgés et bien des déceptions pour les plus jeunes » Henri Kistemaeckers
Réaliste « Vous vous retrouverez arrêté, cher Monsieur, par un obstacle architectural. La conception des logements modernes s’oppose à toute organisation polygamique » Colette (De Jouvenel)
Meurtrier « Un enfer ! Landru ferait école… » Francis De Croisset
Econome « Ces vains ornements qui ne pèsent jamais aux femmes commenceraient à nous couter cher !» Maurice Prax

J’arrête car je ne voudrais pas écœurer les amateurs du concept. Je terminerai par cette pensée qui me fait tout pardonner à Anne-Charlotte « Je préfère la commodité du regard à l’incommodité du désir ». Je vous conseille d’acheter ce petit livre à Pierre. Il est approprié à une saine réflexion. Je précise néanmoins pour mes lectrices bibliophiles que je ne cautionne absolument pas un tel tissu d’âneries…

ANQUETIL (G). La maitresse légitime. Essai sur le mariage polygamique. Chez l’auteur, Paris, 1923. Broché, in-8, plats de couleur rouge et dos insolé, 480pp. Bon état. 24 € port compris.

Votre dévoué. Philippe Gandillet.

2 commentaires:

Jeanmichel a dit…

S'il faut en croire les biographes de Philippe Gandillet, Anne-Charlotte est donc une pimprenelle qui a l'âge de Pierre, et le mien par la même occasion (quand même!...)

Pierre a dit…

Dés les trois biographies qui sont parues sur Philippe Gandillet, aucune ne mentionne le fait qu'il soit marié. Il ne semble pas attiré par les hommes de son sexe, non plus...

Par moment, j'ai l'impression qu'il s'aime !

En tout cas, les femmes doivent être bienveillantes avec lui puisqu'aucune n'a répondu à ses provocations (ou bien, le blog n'a pas de lectrice féminine ce qui est plus vraisemblable). Pierre