mercredi 22 janvier 2014

Un très bel exemplaire du Robinson suisse de Johann Wyss...


Qu'est-ce qu'un plagiaire ? Un individu qui s'approprie indûment ou frauduleusement tout ou partie d'une œuvre littéraire ; certains étendent même, par extension, celui qui s'approprie un style, des idées, ou des faits d'une œuvre originale. A ce compte, me direz-vous, les romanciers sont tous des plagiaires car toutes les histoires d'amour se ressemblent, n'est-ce pas ?


Aujourd'hui, le droit d'auteur protège une œuvre, mais non l'idée qui l'a inspirée et le style qui l'a mise en forme. Cependant, la limite entre l'inspiration et l'imitation est parfois très difficile à déterminer. Dans l'exemple que je présente, ici, le doute n'est même pas permis puisque le titre même de l’ouvrage que je propose aujourd’hui à la vente fait référence à l'œuvre originale : Robinson Crusoé de Daniel Defoe, publié pour la première fois en 1719.


Alors pourquoi écrire de telles œuvres quand on s'appelle Johann Wyss ? Le filon, bien évidemment, et la quasi-certitude d'être lu. A faire regretter à Daniel Defoe de ne pas avoir lui-même écrit : Robinson Crusoé, le retour


Voici donc un ouvrage qui retrace les aventures de naufragés involontaires. Si celles de Robinson Crusoé étaient empreintes de considérations philosophiques, le ton de ce succédané édulcoré est plus axé sur la morale.


Une famille de Suisses débarque sur une île inconnue, après que le navire qui la transporte s'est échoué sur un récif. L'auteur a, bien évidemment, mis beaucoup de lui dans le personnage du père, Pasteur comme son auteur.


La nature de l'île est donc mise en coupe réglée avec un idéalisme qui condamnerait nos suisses, à brève échéance, à mourir de faim dans n'importe quelle épreuve de Koh-lanta…. Heureusement, contrairement à l’œuvre originale, nos Robinsons suisses disposent de la totalité du matériel contenu à l'intérieur du navire ; leur dénuement est par conséquent très relatif.  Et c'est tant mieux, car l'île est très peuplée ! La faune est un mélange de tout ce qui se trouve d'un peu exotique aux quatre coins du globe : pingouins, ornithorynque, autruches, tigre, boa "venimeux" [c’est nouveau, ça vient de sortir…], sanglier, porc-épic, kangourous, poule du Canada, etc.


Les remarques de l'auteur-naturaliste prêtent cependant à rire. Voici par exemple la description d'une outarde : " Ernest reconnut alors que c'était une oie outarde... Comme cette outarde ne portait pas de moustache, on supposa que c'était une femelle " (sic). On note chez ce pasteur-auteur-pédagogue une morale tout aussi risible, du moins à notre époque. Les valeurs se perdent ! Les lectrices modernes éprouveront, par exemple, des sentiments mitigés à l'endroit de l’image de la femme du Pasteur. Évidemment conçue par l'auteur comme l'incarnation des vertus ménagères, Madame Arnold ne dispose que de deux attitudes : la crainte pour la sûreté des siens et l'attendrissement : " Les femmes ne sauraient rivaliser d'activité et d'énergie avec les hommes. Néanmoins, elles font ce qu'elles peuvent, et tout à l'heure, vous verrez que votre mère n'est pas restée les bras croisés pendant votre absence… ". La belle époque…



Il est cependant dommage qu'il n'y ait pas eu de naturels dans l'île. L'absence d’anthropophages se fait parfois cruellement sentir… Pierre


Wyss Johann. Le Robinson suisse ou histoire d’une famille suisse naufragée. Traduit de l’allemand par Frédéric Müller. Quatorzième édition illustrée de  24 gravures sur bois, d'après K. Girardet. Deux tomes in-12.  Tours,  Mame et Cie,  1862. Reliure demi-chagrin cerise à coins, plats encadrés d’un filet doré, dos lisse, lettres dorées, tranche supérieure dorée, gardes colorées. 281 et 299 pages. Très belles reliures dans un emboitage élégant, aucunes rousseurs. Exemplaire de luxe. 95 € + port

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Quand un auteur copie dans un livre, c'est du plagiat. Quand il copie dans plusieurs livres c'est de la recherche.

René

Pierre a dit…

La parole était à la défense ;-))

Bravo, René !

Anonyme a dit…

De la recherche... à condition de mettre des guillemets en fin et début des citations... sinon c'est aussi du plagiat :-)
Xavier (qui cherche)

Pierre a dit…

On remercie le ministère public (Xavier) pour ces précisions utiles ;-))

Si l'on faisait une brève recherche dans les billets de votre serviteur, on découvrirait, médusé, qu'il pourrait, parfois, les encadrer intégralement de guillemets... Pierre

Anonyme a dit…

Dans cette histoire de "Je te cite, tu me cites par la barbichette", le plus grand oublié est bien l'inventeur du guillemet, car qui penserait à guillemeter un guillemet ?

Jean-Michel

Pierre a dit…

C'est pas faux ;-)) Y a t-il vraiment un M. Guillemet me demandait dernièrement M. Point de Suspension ? Pierre