mardi 18 mars 2014

Le procès de la critique littéraire par Maitre Maurice Garçon…

Le demandeur : Fernand Fleuret de l'Académie Goncourt.
Évidemment, qui mieux qu’un poète pouvait défendre un poète ? Maitre Maurice Garçon, s’il fut un des plus brillants avocats de sa génération, n’en fut pas moins un des plus esprits les plus heureux du Parnasse…


C’est à l’occasion d’un procès intenté par Fernand Fleuret contre un critique littéraire que le célèbre avocat fut son défenseur, comme il le fut, d'ailleurs, de tous les membres de l’Académie Goncourt dont Fleuret est un des membres fondateurs.


Il nous livre ici, sous forme d’un ouvrage publié à tirage limité, le contenu de sa plaidoirie où l’on découvrira avec plaisir que l’éloquence est un art qui se combine fort bien avec le bon sens. Si le critique fait métier de porter des jugements sur autrui, il faut reconnaitre qu’il abuse souvent de la liberté qu’on lui accorde pour aller jusqu’à l’injure, et qu’il oblige ceux qui sont victimes de ses jugements à élever des protestations au nom de susceptibilités légitimes.


« La jurisprudence est confuse et trop de conflits naissent dont la solution est incertaine. N’est-il point temps qu’un tribunal pose des règles précises et permettent aux uns et aux autres  de connaitre leurs obligations et leurs devoirs ?

La critique est l’art d’apprécier les mérites et les défauts des œuvres littéraires et artistiques, et tout écrivain, qui soumet un ouvrage au public, s’expose aussi bien aux louanges  qu’au décri. C’est, a dit Balzac, une taxe que le public prélève sur les hommes éminents.

Le droit de la critique procède de celui qu’a chacun de manifester son opinion. Il est général et appartient à tous ceux qui pensent ; il devient pourtant particulier lorsqu’il est exercé, afin de simplifier la tâche du commun, par un certain nombre d’augures qui se sont données pour mission d’étudier les œuvres littéraires et artistiques et de publier leurs avis afin de guider le goût et l’opinion générale. La foule est paresseuse […] Le critique tient toute son autorité d’une forme de crédit qu’il a sû imposer au vulgaire, moins souvent par sa science que par un habile stratagème […].

Trop souvent il confond lui-même la critique et la satire. Soucieux surtout de blesser, il est volontairement ironique, méchant, injuste et violent. Il n’est point un juge, il est une partie. Le critique au contraire doit impartialement se livrer à une étude attentive pour arriver à un jugement décisif. Il doit dépouiller ses sympathies ou antipathies personnelles afin de dégager le vrai […].

Critiquer, en un mot, c’est procéder à un examen raisonné pour comprendre l’esprit qui a animé l’auteur afin d’en apprécier ensuite l’erreur ou la sagesse. A énumérer toutes ces qualités, on pourrait conclure que seuls les philosophes sont dignes d’en parfaire la somme. Pourtant les critiques demeurent des hommes et leur recrutement se fait souvent sans discernement. Aussi doit-on les juger selon la loi commune. La cour de Paris l’a dit en 1932 […].

Ainsi le critique n’échappe pas aux rigueurs de la loi sur la presse s’il diffame et il répond de ses fautes si, sans commettre à proprement parlé un délit, il a cependant causé quelques préjudice… […]. »


Je passe sur l’argumentation propre à défendre l’ouvrage de Fernand Fleuret sur la Henriade et sur les fautes commises par le critique avec l’histoire de France. Les errances religieuses de cette époque n’empêchent pas la véracité des faits.


L’ouvrage que je propose, aujourd’hui, à la vente fait partie d’une collection de 9 procès d’anthologie menés à bien par Maitre Maurice garçon publiés de 1923 à 1941. Tous les volumes ont été tirés à 100 (le premier) ou 150 exemplaires numérotés hors commerce et imprimés sur papier teinté de couleur différente pour chaque volume. Notre exemplaire présente un très original envoi manuscrit de l'auteur où l’on apprend avec amusement que notre avocat aimait magner le pistolet tout autant que certains de ses clients… Pierre


GARÇON (Maurice). En marge de la Henriade. Le Procès de la critique. Un volume in-12. Sans nom d’éditeur, mai 1937. Reliure demi-parchemin, plat de tissu imprimé, dos lisse, pièce de titre en maroquin havane. Collection " Plaidoyer de Maurice Garçon ". Envoi de Maurice Garçon à Fernand Fleuret.  Très bel état. Vendu

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