Le demandeur : Fernand Fleuret de l'Académie Goncourt. |
C’est à
l’occasion d’un procès intenté par Fernand Fleuret contre un critique
littéraire que le célèbre avocat fut son défenseur, comme il le fut, d'ailleurs,
de tous les membres de l’Académie Goncourt dont Fleuret est un des membres
fondateurs.
Il nous livre
ici, sous forme d’un ouvrage publié à tirage limité, le contenu de sa
plaidoirie où l’on découvrira avec plaisir que l’éloquence est un art qui se
combine fort bien avec le bon sens. Si le critique fait métier de porter des
jugements sur autrui, il faut reconnaitre qu’il abuse souvent de la liberté
qu’on lui accorde pour aller jusqu’à l’injure, et qu’il oblige ceux qui sont
victimes de ses jugements à élever des protestations au nom de susceptibilités
légitimes.
« La
jurisprudence est confuse et trop de conflits naissent dont la solution est incertaine.
N’est-il point temps qu’un tribunal pose des règles précises et permettent aux
uns et aux autres de connaitre leurs
obligations et leurs devoirs ?
La critique est
l’art d’apprécier les mérites et les défauts des œuvres littéraires et artistiques,
et tout écrivain, qui soumet un ouvrage au public, s’expose aussi bien aux
louanges qu’au décri. C’est, a dit
Balzac, une taxe que le public prélève sur les hommes éminents.
Le droit de la
critique procède de celui qu’a chacun de manifester son opinion. Il est général
et appartient à tous ceux qui pensent ; il devient pourtant particulier
lorsqu’il est exercé, afin de simplifier la tâche du commun, par un certain
nombre d’augures qui se sont données pour mission d’étudier les œuvres
littéraires et artistiques et de publier leurs avis afin de guider le goût et
l’opinion générale. La foule est paresseuse […] Le critique tient toute son
autorité d’une forme de crédit qu’il a sû imposer au vulgaire, moins souvent
par sa science que par un habile stratagème […].
Trop souvent il
confond lui-même la critique et la satire. Soucieux surtout de blesser, il est
volontairement ironique, méchant, injuste et violent. Il n’est point un juge,
il est une partie. Le critique au contraire doit impartialement se livrer à une
étude attentive pour arriver à un jugement décisif. Il doit dépouiller ses
sympathies ou antipathies personnelles afin de dégager le vrai […].
Critiquer, en un
mot, c’est procéder à un examen raisonné pour comprendre l’esprit qui a animé
l’auteur afin d’en apprécier ensuite l’erreur ou la sagesse. A énumérer toutes
ces qualités, on pourrait conclure que seuls les philosophes sont dignes d’en
parfaire la somme. Pourtant les critiques demeurent des hommes et leur
recrutement se fait souvent sans discernement. Aussi doit-on les juger selon la
loi commune. La cour de Paris l’a dit en 1932 […].
Ainsi le critique
n’échappe pas aux rigueurs de la loi sur la presse s’il diffame et il répond de
ses fautes si, sans commettre à proprement parlé un délit, il a cependant causé
quelques préjudice… […]. »
Je passe sur
l’argumentation propre à défendre l’ouvrage de Fernand Fleuret sur la Henriade
et sur les fautes commises par le critique avec l’histoire de France. Les
errances religieuses de cette époque n’empêchent pas la véracité des faits.
L’ouvrage que je
propose, aujourd’hui, à la vente fait partie d’une collection de 9 procès
d’anthologie menés à bien par Maitre Maurice garçon publiés de 1923 à 1941.
Tous les volumes ont été tirés à 100 (le premier) ou 150 exemplaires numérotés
hors commerce et imprimés sur papier teinté de couleur différente pour chaque
volume. Notre exemplaire présente un très original envoi manuscrit de l'auteur
où l’on apprend avec amusement que notre avocat aimait magner le pistolet tout
autant que certains de ses clients… Pierre
GARÇON (Maurice).
En marge de la Henriade. Le Procès de la critique. Un volume in-12. Sans nom d’éditeur, mai
1937. Reliure demi-parchemin, plat de tissu imprimé, dos lisse, pièce de titre
en maroquin havane. Collection " Plaidoyer de Maurice Garçon ". Envoi
de Maurice Garçon à Fernand Fleuret.
Très bel état. Vendu
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