lundi 18 janvier 2010

Causerie du lundi de Philippe Gandillet : Le Mercure de France


L’itinéraire électronique qui mène cette chronique jusqu’à votre charmant foyer ne laisse pas de surprendre ma perplexité Académique. La connectique fonctionne même loin de son port. .. Pierre est en voyage pour quelques jours et c’est de la bibliothèque Mazarine, près de l’Institut, où je travaille (rêvasse) en admirant les rayonnages chargés d’histoire et de littérature le l’illustre maison que je vous envoie ma causerie hebdomadaire. L’ombre de Sainte Beuve, guidant ma plume, je m’apprête donc à noircir de mes propos dilettantes la page blanche d’un texte dont notre brave libraire va, encore une fois, tirer un juste bénéfice.


Écrivain curieux du commerce des livres
J’orne mes écrits des grâces de mon style
Des mots rares, il faut que je m’enivre
Car j’aime mêler partout, l’agréable et l’utile.
On me demande lequel des deux
Nous est le plus avantageux
D’être utile ou d’être agréable.
L’un et l’autre est très désirable
Et dans l’exacte vérité
Ce sont de justes buts pour vivre en société.
Heureux celui qui les rassemble
S’il ne peut les posséder ensemble…


Un détail… Pierre ne m’ayant confié aucun ouvrage à commenter, il me faudra donc en dérober un sur les étagères de la « Mazarine ». Arguant que je l’ai déjà rendu, mon aplomb, ma suffisance et la renommée attachée à ma personne suffiront à tromper l’accorte secrétaire. Une édition du Mercure de France, regroupant les mois d’octobre à décembre 1742, vous conviendra-t-elle ? Considérez qu’elle est à vous !

Le Mercure de France était à l'origine une revue, fondée sous le nom de Mercure Galant, et qui évolua pour devenir une maison d'édition au XXe siècle. Il fut fondé à la fin du XVIIe siècle par Donneau de Visé, tout d’abord sous la forme d’un hebdomadaire puis d’un mensuel. Le Mercure Galant, dont le but était d’informer le public sur les sujets les plus divers publia des poèmes ou des nouvelles. La première livraison date de 1672.


Le Mercure continuera à paraître au-delà de la mort de son fondateur en 1710. Sous Laroque, elle change de titre en 1724 et devient le Mercure de France. La Harpe en est le rédacteur pendant vingt ans. Chateaubriand en fut, un moment, l'unique propriétaire mais la revue cessera de paraître en 1825.

Notre ouvrage mentionne, entre autres, quelques erreurs dans le « Moréri », nous retrace les plaisirs de la campagne, joint des partitions guillerettes sur les mérites de la boisson, nous livre ses réflexions sur la bonne heure pour écrire, nous rappelle que l’usage du tabac dans les églises est sujet à excommunication par une bulle papale et nous informe d’une surprenante résurrection de Bibi , le chat de la favorite du Roi. Les bibliographes se régaleront du descriptif rigoureux des nouvelles parutions chez les libraires.

Rien que de très utile là dedans et de bien agréable… Philippe Gandillet


Collectif. Mercure de France. Paris chez Cavelier, Pissot et Jean de Nully. 1742. Trois tomes dans un seul volume plein veau in-12, dos à cinq nerfs, pièce de titre et tomaison en lettres dorées sur maroquin, motifs dorés. 900p, gravures HT. Quelques mouillures très claires en début d’ouvrage. Usures aux coiffes. Bon état. 48 € + frais d’envoi.

13 commentaires:

Jeanmichel a dit…

Friand de ces vieux articles je vais essayer cette fois de ne pas me faire griller. J'envoie illico à Pierre un hermès électronique.

Anonyme a dit…

Jean-Michel,

Vous voilà propriétaire d'un passé simple mais riche d'informations. Un régal.

Je demande à ma secrétaire sous couvert d'un envoi de nos services de vous poster cet ouvrage. De toute façon, nous l'avions en double...

Je vous laisse voir avec Pierre pour sa légitime rétribution.

Philippe Gandillet

jpp a dit…

Le futile est toujours indispensable, et plus encore de nos jours.

Pierre a dit…

Je me demandais si l’on pouvait opposer « utile et agréable » à « futile et désagréable » . En fait, et l’expérience nous l’a prouvé, le futile peut être agréable fut-il indispensable. ..

Pierre (qui joue avec les italiques)

Textor a dit…

Bravo Jean Michel, là ya pas photo, vous étes le premier, je dois m'incliner... dommage, j'aurais bien troqué ces nouvelles plus très fraiches contre les nouvelles pas très joyeuses que me donne le canard auquel je suis abonné.

T

Anonyme a dit…

Ca devient dur.

Faudrait presque réserver le prochain livre à l'avance.

Montag

Pierre a dit…

Il est à vous, Montag.

Vous saurez ce que vous avez acheté demain mais je vous assure qu'après cette acquisition, le Roi ne sera pas votre cousin... ;-))

Pierre

Textor a dit…

Peut-on surenchérir sur les livres réservés à l'avance ?? :))

Pierre a dit…

Bien sûr, et c'est même conseillé !

On pourrait aussi imaginer que j'ai un marteau dans les mains et que je détermine, à l'occasion d'une vente, quel est le gagnant de l'offre en assenant un coup bref mais viril du dit objet contondant, disons... sur une table !

Le concept est intéressant. A méditer. ;-))

Pierre

Jeanmichel a dit…

Il faut quand même que tout le monde sache que les envois de Pierre sont toujours très soignés. Parfaitement emballés, ils ne souffrent nullement du transport.
J'ai reçu nickel-chrome ce Mercure ce matin.
Bien avant les mots croisés, qui ne sont pas centenaires sous la forme qu'on leur connaît, ou le jeu des sept erreurs, ce mensuel avait déjà sa page des jeux présentant d'intéressantes énigmes ou de subtils logogriphes (écrits à l'époque avec un y) dont la solution était donnée dans le numéro suivant.

Textor a dit…

Oui, l'envoi est soignée, et mon acquisition est un exemplaire impeccable. (Rochefort - les petits mystères de l'hotel des ventes).

Malheureusement ce que j'apprends me fait tomber à la renverse ! Quoi, il y a des fraudes et des magouilles dans les ventes de livres? Le bibliophile que je suis est un gogo et le prix d'un ouvrage est multiplié par 5 entre le rez de chaussée et le premier étage de l'Hotel Drouot !

Ce livre devrait être interdit à la vente !
T

Pierre a dit…

Je n'ai pas cru un seul instant aux propos de notre polémiste, cher Textor, et ce jeune militaire désirant se défaire de sa bibliothèque et de ses meubles avant un changement de garnison (si mes souvenirs sont bons) qui se serait fait rouler dans la farine par un commissaire-priseur indélicat relèvent de la plus pure imagination.

Ah, ces écrivains !

Pierre a dit…

Si j'attache une grande importance à envoyer des livres bien protégés ; je parle pour les livres un peu lourds, bien sûr ; c'est parce que j'imagine mal que les employés des postes aient le temps de faire attention en manipulant les colis. Et puis, les vétérinaires savent ce qu'est la notion de la prévention des risques...

J'ai lu ce Mercure de France dans le train en allant vers la Bretagne. C'est un régal assuré, Jean-Michel ! Le vocabulaire est désuet mais tellement charmant ; on en oublierait la barbarie environnante.