mercredi 5 novembre 2014

La chartreuse de Parme. Paris, Delahays, 1854. Stendhal dans la bibliothèque idéale...


Existe-t-il un style de roman d'amour français  demandait-on à Jacques Laurent ? C'est vraisemblable. Une de ses caractéristiques est qu'il n'y a pas d'histoire d'amour heureuse en France : pour un Chardonne qui chante l'amour réussi, et même conjugal, combien de romanciers ont plongé leur héros dans les affres de la passion, du déchirement, de la mort, du suicide ou de la séparation ?


Depuis Tristan et Iseult, ces deux amants enchainés l'un à l'autre par un sort, le lecteur a pris l'habitude d'assister à plus de naufrages que d'embarquements pour Cythère… Peut-être faut-il y voir un trait qui nous vient de la tradition antique et du bassin méditerranéen ? Aussitôt que le héros rencontre l'être aimé, celui-ci est dérobé par le destin, personnifié par la mort, le couvent ou plus pathétique que tout… par le mari !


Henri Beyle – Stendhal – n'échappe pas à cette règle et dans l'ouvrage que je propose aujourd'hui à la vente, il la magnifie… C'est sous l'empire de l'amour que le héros est conduit, dans La chartreuse de Parme, à accomplir de grandes choses comme de traverser bêtement – c'est lui qui le dit - un champ de bataille.  Bien évidemment, tout ce qui entoure l'amour, favorise ou empêche sa réalisation est plus important que l'amour en lui-même. Ce roman est aussi une analyse sociologique de la société italienne de l'époque.  


Toutes les étapes de la stratégie amoureuse que l'auteur s'est attaché à définir dans De l'Amour – que j'ai présenté sur le blog il y a quelques temps (on peut cliquer ici) – sont réunies dans cette histoire. Entre Fabrice del Dongo, la duchesse de Sanseverina et Clélia Conti, amours, déchirements et intrigues politiques sur fond de guerre napoléonienne se mêlent pour nous décrire le héros romantique selon Stendhal.


L'édition que je vous propose ici est l'édition définitive de 1854. Semblable aux éditions suivantes de chez Michel Lévy, elle est précédée d'une lettre et d'une étude littéraire sur Beyle par Balzac et d'une lettre inédite de l'auteur en réponse à ce travail.


"M. Beyle a écrit un livre où le sublime éclate de chapitre en chapitre. Il a produit, à l'âge où les hommes trouvent rarement des sujets grandioses et après avoir écrit une vingtaine de volumes extrêmement spirituels, une œuvre qui ne peut-être appréciée que par les âmes et par les gens vraiment supérieurs. Enfin il a écrit Le prince moderne, le roman que Machiavel écrirait, s'il vivait banni de l'Italie au XIXème siècle. Aussi, le plus grand obstacle au renom mérité de M. Beyle vient-il de ce que la Chartreuse de Parme , ne peut trouver de lecteurs habiles à la goûter que parmi les diplomates, les ministres , les observateurs, les gens du monde les plus éminents, les artistes les plus distingués, enfin, parmi les douze ou quinze cents personnes qui sont la tête de l'Europe. Ne soyez donc pas étonnés que, depuis dix mois que cette œuvre surprenante a été publiée, il n'y ait pas un seul journaliste qui l'ait ni lue, ni comprise, ni étudiée, qui l'ait annoncée, analysée et louée , qui même y ait fait allusion. Moi, qui crois m'y connaître un peu, je l'ai lue pour la troisième fois, ces jours-ci : j'ai trouvé l'œuvre encore plus belle, et j'ai senti dans mon âme l'espèce de bonheur que cause une bonne action à faire. N'est ce pas faire une bonne action , que d'essayer de rendre justice à un homme d'un talent immense , qui n'aura de génie qu'aux yeux de quelques êtres privilégiés, et à qui la transcendance de ses idées ôte cette immédiate mais passagère popularité que recherchent les courtisans du peuple et que méprisent les grandes âmes ? ..."  Balzac


Cette Chartreuse de Parme fait partie, sans nul doute, de la bibliothèque idéale du bibliophile. Pierre


STENDHAL. La chartreuse de Parme. Paris, Delahays, 1854. Un volume in-12 (18/12cm). Reliure demi chagrin tabac, dos à nerfs et lettres de titre dorées, tranches mouchetées, gardes colorées. Nouvelle édition, précédée d'une lettre et d'une étude littéraire sur Beyle, par M. de Balzac, et d'une lettre inédite de l'auteur en réponse à ce travail.[1fbl], [2ff-titre], LIX, 479pp. Petite mouillure marginale en début et fin d'ouvrage, rousseurs claires, bel état général. 85 € + port

Aucun commentaire: