mercredi 4 novembre 2009
Contribution à l'étude des "Fous Littéraires".
Il y a quelques temps, je vous avais présenté l'Archéomètre de Saint-Yves d'Alveydre, ouvrage présentant un outil de mesure synthétique de tous les arts contemporains. Un bibliophile lecteur (et dans ce cas précis, le mérite est d'autant plus grand) de Belgique propose à votre sagacité un autre appareil de mesure original ; l'Harmonimètre, appareil de transposition musico-colorimetrique. René se pose légitimement la question de savoir si nous avons affaire à un "Fou littéraire" ou bien si cet ouvrage est à classer dans le rayon "Sciences", voir dans le rayon "Bricolage".
Ne voulant pas rester en manque, je vous présente deux ouvrages à la vente dont on pourrait se demander pour le premier si, mais nous sommes larges d'esprit, l'auteur ne serait pas à classer dans cette catégorie. Charles Nodier, dans une édition présentée par Jean-Luc Steinmetz nous donnera quelques réponses à ces questions et abordera l'étroite frontière qui existe entre la folie des auteurs et la folie des acheteurs de livres dans le deuxième ouvrage.
Je passe le clavier à René de Braine le Comte.
"Dans son ouvrage "Les Fous Littéraires" (page 778), André Blavier décrit en détail cette sorte d'abaque permettant de relier "harmonieusement" les sons et les couleurs.
J'ai eu la chance d'acquérir, chez un bouquiniste de Bruxelles, un ensemble de manuscrits de Henri Poutet décrivant, en autres choses, la genèse de son Harmonimètre. Le lot comportait plusieurs exemplaires de l'objet, édités ACA ainsi que divers nuanciers réalisés par collage de minuscules éléments coloriés aux crayons, témoignant de la part de l'auteur, d'une patience, d'une méticulosité et d'un soin inouïs.
Il semble que ce "Quadrateur" ait eu une activité constante dans le domaine des sciences occultes et pseudo-sciences, à en juger par des carnets relatant des séances de spiritisme et des recueils de théories aussi variées que l'"Harmonie Universelle", le "Ternaire Sacré" et la "Trisection de l'Angle".
Comme le dit André Blavier, l'expression "Fou littéraire" n'a rien de péjoratif. Fou ne veut pas dire stupide, d'ailleurs qui est fou et qui ne l'est pas, de quel côté des grilles sommes-nous ?
Les bibliomanes - bibliophiles compris - sont-ils fous, je crains fort que la réponse soit positive et pour les non-bibliophiles cela ne fait aucun doute ! Mais que serait la vie sans un grain de folie ? "
Mais au fait, qu'est-ce donc pour vous qu'un "Fou littéraire" ? Faut-il y adjoindre ceux qui sont devenus, pour différentes raisons, des "Littérateurs fous" (Thomas de Quincey, Gérard de Nerval) ? Pierre
GUYOTAT (Pierre). Le Livre. Ed Gallimard, 1984, in-8 broché, 210pp mais je vous mets au défi d'aller jusqu'au bout ! 15€ port compris
NODIER (Charles). L'amateur de livres précédé du Bibliomane, de Bibliographie des fous et de la Monomanie réflective. Edition présentée par JL Steinmetz. Le Castor Astral. 1993. Broché petit in-8, 140pp, imp 2007.12€ port compris
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7 commentaires:
Très intéressant Pierre !
J'allais justement m'atteler à vous présenter sur le Bibliomane moderne un fou de chez fou, bourguignon qui plus est, aujourd'hui comme hier, totalement inconnu ou presque. Il rentrera sans aucune difficulté à l'Académie des oubliés (à juste titre...).
A bientôt sur les ondes.
B.
La relation entre les couleurs et la musique doit être réelle pour les autistes, les surdoués, ceux qui ont "quelque chose" en plus ou différent.
Caryl Chessman vivait réellement cette relation et il la raconte dans son livre "Cellule 2455". Bon, Caryl Chessman était quand même un petit peu fou aussi.
"… La mère d’Annabell aimait beaucoup ce petit garçon timide aux grands yeux rêveurs. Elle lui demanda pourquoi la musique exerçait une telle fascination sur lui.
- C’est parce que j’aime les couleurs, répondit Whit doucement.
Cette réponse stupéfia la mère d’Annabell.
- Tu… quoi ?
Soudain, Whit se sentit mal à l’aise.
Pour lui, c’était un phénomène normal. Il entendait la musique et il voyait les couleurs, mais il y avait une grande ressemblance entre les deux, une espèce d’unité. Il ne pouvait l’expliquer clairement, mais, pour lui, la musique, c’était de la couleur !
La mère de la petite camarade paraissant ne pas comprendre, il se mit au piano et, avec deux doigts, joua le thème d’un air qui l’avait particulièrement frappé.
- Vous ne voyez pas les couleurs ? demanda-t-il plein d’espoir. Vous ne les voyez toujours pas ?
La mère d’Annabell ne voyait rien, mais cela n’avait soudain plus d’importance. Car Whit venait de réaliser quelque chose de surprenant : il avait joué du piano sans avoir appris."
Merci René,
Cela me remet en mémoire Louis-Bertrand Castel (1688-1757) qui mêlait aussi couleurs et musiques
http://www.musicologie.org/Biographies/c/castel.html
Castel propose de réaliser un clavecin fait pour les yeux qui « rende les sons sensibles et présents aux yeux, comme ils le sont aux oreilles, de manière qu'un sourd puisse jouir et juger de la beauté d'une musique aussi bien que celui qui entend ».
Y'a-t-il relation, filiation, mise en parallèle possible ?
Raphael
Jean-Michel,
Ce passage du livre est très beau et cautionne l'idée qu'il existe des êtres, sinon supérieurs, du moins différents mais j'ai du mal, légitimiste comme je suis, à avoir de la compassion pour le personnage.
Monsieur Caryl Chessman est mort,
Mais le doute subsiste encore.
Avait-il raison ou bien tort ?
So far away ! Pierre
Nul doute que l'on associe fréquemment sons et couleurs : pour briller en société il faut parler de musique en termes de peinture et vice-versa.
Albert Cozanet qui publiait sous le pseudonyme de Jean d'Udine a écrit plusieurs ouvrages sur le sujet, notamment "L'orchestration des couleurs" et "Rythmes et couleurs".
René
Le hasard est étrange, il provoque les choses.
J'ai été contacté par l'IIREFL (association de bibliophiles intéressés par les auteurs "doux-dingues") qui m'a fait découvrir son blogue.
Excentrique, certes, mais avec de belles plumes !
http://fous-litteraires.over-blog.com/
Pierre
Pierre Guyotat fait parler.
Ce qui me paraît étonnant n'est pas tant le livre lui-même que ce qui a pu pousser l'écrivain à le faire éditer, lui qui se voulait non-écrivain, affirmant que pour qu'il accepte que ses écrits soient proposés à la vente il faudrait qu'ils fussent rendus muets, c'est-à-dire incompréhensibles.
Mais quitte à être incompréhensible, pourquoi ne rien dire du tout ?
C'est un charcutier qui vendrait des robinets en forçant ceux qui les achètent à les consommer comme des chorizos.
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