vendredi 26 mars 2010

Prassinos ou Péguy ?


C'est en ces termes qu'il faudrait définir la bibliophilie. Choix d'un auteur pour le lecteur, choix d'une collection pour l'amateur, les deux pour l'amoureux du livre. Et je ne parle même pas des bibliographes pour lesquels il faudrait ajouter l'éditeur, l'année de parution, le typographe et l'illustrateur. Charles Péguy fait, pour moi, partie de ces mystiques de la fin du 19eme siècle emportés dans une rafle… Je le dis en souriant car j'ai beaucoup d'empathie pour ces auteurs qui ont du renier beaucoup de leurs certitudes pour un peu de Foi ; Huysmans, Claudel, Maritain et Psichari conduisant la locomotive avec quelques passagers peu fréquentables comme notre bon Léon Bloy capable d'en irriter plus d'un…


Charles Péguy (1873 / 1914) est un écrivain, poète et essayiste français. Il était également connu sous les noms de plume de Pierre Deloire et Pierre Baudouin. Après avoir été militant socialiste, dreyfusard et anticlérical au cours de ses études, il se sent proche du catholicisme à partir de 1908. Son œuvre comprend des pièces de théâtre en vers libres et des recueils poétiques en vers réguliers d'inspiration mystique et évoquant notamment Jeanne d'Arc, un personnage historique auquel il restera toute sa vie profondément attaché, mais aussi des essais où il exprime ses préoccupations sociales et son rejet de la modernité. Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc est une pièce de théâtre dont la première version date de 1910, une seconde, posthume, et augmentée de deux actes inédits, a été publiée en 1956. Notre exemplaire reprend donc la première version. Trois protagonistes sont présents et le thème central de leurs échanges est la question du mal et de la souffrance dans le monde. Péguy s'est expliqué lui-même sur les sources qui l'avaient inspiré. Il donne, dans l'ordre, premièrement, le catéchisme ; deuxièmement la messe ; troisièmement les évangiles. L'auteur a donc une vision, étymologiquement parlant, païenne de la religion et comme Jeanne, découvre la foi par le catéchisme, les sacrements et la liturgie. Ce chemin vers la Foi est donc radicalement opposé aux courants modernes qui se rapprochent d'une Foi théologique essentiellement tournée vers l'ancien testament. Charles Péguy est, à cet égard, le plus pur représentant de la Foi catholique et nationaliste (il est tué d'une balle dans le front au début de la bataille de la marne). Certains ont eu vite fait de l'utiliser à des fins politiques…


Mario Prassinos (1916-1985) est un peintre non figuratif français d'origine grecque de la nouvelle École de Paris. En 1922 les Grecs de Turquie quittent le pays pour fuir les persécutions et sa famille s'installe en France. En 1934, sa sœur Gisèle Prassinos écrit ses premiers textes que publie la revue "Minotaure". Il rencontre alors, chez Man Ray, les poètes surréalistes, André Breton, Paul Éluard, René Char puis les peintres Max Ernst et Salvador Dali. Il réalise quelques dessins et frontispices pour l'éditeur Guy Lévis-Mano. Après une première exposition personnelle, préfacée par René Char, Mario Prassinos s'éloigne à partir de 1939 du surréalisme. Engagé volontaire durant la guerre, il est blessé et reçoit la Croix de guerre (les grands artistes sont-ils tous des héros ?).


Il se lie avec Raymond Queneau et collabore avec les éditions de la NRF pour lesquelles il crée des maquettes de livres dont certains bibliophiles raffolent. Ce livre en est un exemple. En 1985, Prassinos travaille aux onze Peintures du Supplice qu'il réalise pour décorer la chapelle Notre-Dame de Pitié à Saint-Rémy-de-Provence. C'est là qu'est exposée la donation des 108 œuvres qu'il a faite à l'État français en 1985. A ce titre Prassinos ( comme Louis Jou, un illustrateur que j'affectionne aussi, vous le savez) a été consacré artiste Provençal… Vous aimez ce type de cartonnage ? Pierre

PEGUY (Charles). Le mystère de la charité de Jeanne d'Arc. Librairie Gallimard, collection NRF, 1943. In-12, cartonnage orné, 206 p. Exemplaire numéroté. Vendu

1 commentaire:

calamar a dit…

Je n'avais pas vu ce billet...
ah oui, j'aime assez les cartonnages NRF, Paul Bonet ou Prassinos, et surtout au format in-12. Au format in-8, ils sont fragiles...
A noter tout de même qu'ils exigent des conditions de conservation strictes, ils se ternissent assez facilement.
Et leur tirage est assez problèmatique, si quelques-uns font partie de l'édition originale (à côté d'autres papiers), il y a eu sur certains titres à succès des retirages.
Les tirages ont été assez importants, la cote n'est en général pas élevée. J'ai même acheté neuf, dans une librairie classique, un cartonnage Giono des années 50 : il n'était pas encore épuisé chez Gallimard. Et c'était en 1995...