Selon le préfacier de l'œuvre, Jules Lemaitre, Jules Michelet a écrit en 1858 L'amour parce que la France était malade, qu'on ne savait plus aimer, et que les statistiques des mariages et des naissances y étaient pitoyables…
Reste que la vision de l'amour de l'auteur est édulcorée.
L'amour, selon Michelet, est l'amour qui aime. Et c'est pourquoi dans son
livre, il ne mentionne même pas la jalousie des sens. Aimer, c'est se donner plus que vouloir
prendre ou retenir ; c'est se donner avec son cœur, son esprit et son âme. C'est
se détacher du corps qui n'est que l'enveloppe et le signe…
On est loin de la vision de Stendhal ou de Balzac, celle de
l'amour libertinage, de celle du "Grand amour", qui rend idiot – ou méchant, qui mène au meurtre
et au suicide - et qui ne serait qu'une forme détournée d'égoïsme, diront plus
tard les psychologues de l'amour moderne.
Il faut dire que Michelet s'y connaissait en amour désintéressé
! Ce n'est pas trahir un secret d'état que de révéler (cela fut fait en 1951 quand
on autorisa Gabriel Monot à publier une partie de son journal intime) que l'auteur vécu
une histoire d'amour peu banale avec sa seconde épouse. Dressons le tableau :
Athénaïs Mialaret a près de trente ans de moins que son
mari. Elle est intelligente, volontaire, et d'une frigidité à toute épreuve (sic).
Mais ce qu'il faut comprendre avant tout, c'est que dans la vie du sévère
historien, qui n'a jamais vraiment aimé sa première femme, Athénaïs apparait comme
une illumination amoureuse qui va éclairer son univers romantique.
Et voici que commence un combat sans issue : Elle fait de
lui ce qu'elle veut. Certains jours, croyant la perdre, il lui semble qu'il va proprement
mourir d'amour, et il prend peur. D'autres fois, la joie le submerge, une joie
inimaginable, ivre de sacrifice…
Lorsqu'un grand écrivain fait une expérience comme
celle-là, nous sommes loin du ridicule d'un quinquagénaire amoureux. Athénaïs a
aimé son mari, se refusant et se donnant tour à tour avec l'instinct
infaillible des grandes amoureuses et des grandes prédatrices. Respectons donc cette histoire pathétique [qui est aussi
un peu la notre] même si le mot de Maurras semble juste : " le cœur de
Michelet se promut cerveau". L'hymne à l'amour que nous vous proposons
aujourd'hui à la vente est un chant lyrique et poétique dédié à la grandeur des
sentiments et à la perfection morale par l'amour. Autant de concepts indéfendables
de nos jours, bien évidemment ! Pierre
MICHELET (Jules). L'amour. Paris, Calmann Lévy, éditeur,
1899. 1 volume petit in-8 (18,5/12). Demi-chagrin bleu roi à coins, plats
bordés d'un double filet doré, dos à 5 nerfs, caissons dorés, gardes colorées,
tranche supérieure dorée. Chiffres estampés à froid au coin supérieur du 1er plat. XXI, 464 pages. Très bel état général. 65 € + port
2 commentaires:
"Une frigidité à toute épreuve"... bigre !
Combien d'épreuves ? :-))
C'est un mal très singulier, Nadia ! ;-)
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