lundi 25 août 2014

Conspiration de Saillans : Ouvrage publié par ordre en 1792. Ce qu'il arrivait alors aux frondeurs…


Le paysan des Cévennes n’avait pour l’Ancien Régime aucune antipathie. Cependant, homme de tradition, il voyait à regret le pays troublé par des innovations bruyantes et peu en harmonie avec ses idées catholiques, il déplorait l’attitude antireligieuse du nouveau gouvernement et fermement attaché au Roi, il réprouvait la conduite des chefs révolutionnaires de Paris.


Un homme ardent et dévoué, Claude Allier, prieur de Chambonas en Vivarais, conçut le projet hardi de grouper toutes les bonnes volontés pour profiter de l’état d’âme des montagnards de la région et tenter un mouvement royaliste. La Lozère, le Vivarais, le Gard, le Gévaudan et le Velay lui paraissaient disposés à prendre les armes contre les nouveaux potentats. Il s’assura le concours de chefs vaillants et déterminés, se créa des intelligences dans toute la région restée fidèle aux traditions politiques et religieuses du pays, et parvint en assez peu de temps à créer une organisation puissante dont il pensa tirer parti pour la lutte qu’il voulait entreprendre.


Claude Allier avait choisi comme point de concentration de ses troupes contre-révolutionnaires les châteaux de Jalès et de Bannes, perdus au milieu des Cévennes, au fond du département de l’Ardèche. Lorsqu’il jugea le mouvement assez avancé et l’instant opportun, il fit convoquer dans la plaine de Jalès, en août 1790, toutes les gardes nationales de la région " sous prétexte de leur faire renouveler le serment civique du 14 juillet ". Vingt mille hommes répondirent à l’appel du prieur de Chambonas, et, devant un autel dressé en plein air, prêtèrent serment de " défendre la nation, la loi et le Roi ". 


Une seconde fois, en février 1791, Claude Allier convoqua ses troupes dans la plaine de Jalès. Le « Camp de Jalès » devenait officiellement le centre de la résistance qu’allaient opposer à la Révolution tous les braves gens du pays. L’assemblée nationale en apprenant ce qui se passait dans les montagnes des Cévennes, ordonna l’arrestation de tous les chefs royalistes de la région et de Claude Allier. L’abbé de la Bastide, son frère, le procureur Rivière, les trois Allier, réussirent à se cacher. M. de Malbosc fut pris, enfermé dans la citadelle du Pont-Saint-esprit, et massacré impitoyablement.


Il partit en janvier 1792 pour Coblentz où se trouvait la Cour. Reçu avec joie par les Princes, il leur exposa « avoir recruté à Nîmes, à Montpellier, à Arles, à Mende, au Puy, dans le Comtat et dans le Vivarais, 60.000 hommes » affiliés à la confédération de Jalès et prêts à se lever à l’appel des chefs royalistes. Le succès était assuré ! Les Chevaliers de Malte promirent de concourir au soulèvement et de débarquer dans le Midi avec leurs frégates. Tous les émigrés sollicitèrent l’honneur d’aller au camp de Jalès ; les Princes n’eurent plus que l’embarras du choix !


Ils lui ouvrirent un crédit de 300.000 livres et lui adjoignirent, pour commander les troupes, le Comte de Saillans, ancien lieutenant-colonel aux Chasseurs du Roussillon, émigré après l’échec du complot de Perpignan dont il avait été l’âme. La proclamation du comte de Saillans aux troupes royalistes, affichée dans tous les hameaux, faisait de son côté une grande impression. Rédigée dans un style abandonné depuis plusieurs années, elle avait « un parfum d’Ancien Régime » qui réveillait les plus endormis et annonçait la fin d’un mauvais rêve. La suite ?


Une armée arriva du Gard. Des gardes nationaux, des grenadiers, des volontaires accoururent de partout, et bientôt, écrasés sous le nombre, les royalistes étaient repoussés malgré les efforts héroïques de Dominique Allier et de Guilhaume de Mélon qui restèrent les derniers sur le champ de bataille. Après une défense désespéré, Jalès fut pris et livré aux flammes ; Saillans, fait prisonnier avec deux prêtres et quelques compagnons, fut conduit à la mairie des Vans où tous furent massacrés. Saint-André de Cruzières fut brûlé ; le feu détruisit en partie Bannes et Berrias… La tête du Comte de Saillans fut tranchée d’un coup de sabre et brandie ensuite comme un trophée au milieu des hurlements de joie de toute l’assistance… Rien de très original, donc ! 


Pour ceux que l'histoire n'intéresse vraiment pas – sommes-nous, en fait, vraiment maîtres de notre destin ? - je leur propose alors d'acquérir ce rare ouvrage pour son élégante reliure… Les réalisations de Victor Champs sont recherchées par les collectionneurs, pour la bonne tenue de leurs corps d’ouvrage et le fini du travail. Avec Carayon, ils furent les relieurs qui, dans les travaux relativement simples, résumèrent le plus haut degré de la perfection d’exécution. Jean Stroobants travailla a ses côtés un moment ou tout au moins pour lui. Il lui succéda au 4 rue Gît-le-Cœur en 1904. Pierre


COLLECTIF. Conspiration de Saillans avec des pièces authentiques. Rédigé par ordre du département de l'Ardèche. Privas, De l'imprimerie de Pierre Guillet, 1792. Un volume, petit in-8. Demi reliure maroquin  cerise à coins, plat bordé d'un filet doré, dos à nerfs décoré aux petits fers, roulette sur les nerfs, filets dorés, tranche supérieure dorée, gardes colorées. Reliure signée par Champs-Stroobants. [2ff bl], [2ff titre], 124pp, [2ff bl]. Rare et bel exemplaire. 350 € + port

1 commentaire:

Pierre a dit…

Philippe Gandillet, de retour à Paris pour finaliser quelques définitions approximatives du dictionnaire - Valétudinaire, hypocondriaque, versatile et pusillanime - me prie de remercier les 264 membres honoraires qui se sont inscrits sur le blog pour lire ses chroniques et les informe qu'il reprendra ses causeries du lundi en fin d'année, comme à son habitude...

Il me charge aussi de dire aux personnes qui utilisent ces mots sans en connaître exactement le sens de l'appeler sur son portable avant de formuler leur phrase. Ne le remerciez pas, il est magnanime (je crois que c'est comme cela que l'on dit...) !

Pierre