lundi 10 septembre 2012

Les valeurs familales démontrées (sur ebook) par Johann David Wyss...

Ce message est à l'attention d'un de mes beaux-frères [il se reconnaîtra ; il sait aussi toute l'affection que je lui porte] mais vous pouvez quand même le commenter !

Hier après-midi, après une courte pose post-prandiale, il lisait tranquillement le fameux ouvrage de J.R Wyss - Le Robinson suisse - Histoire d'une famille suisse naufragée - alors que toute la famille réunie se reposait suite aux agapes d'un mariage princier dans la capitale. Un halo de lumière éclairait son visage et je fus surpris de constater que sa faible acuité visuelle, due en partie à l'âge, ne semblait pas le déranger pour la lecture. Moi qui le connais bien, je savais aussi que la lumière divine n'était en rien responsable du surprenant éclat de ses traits, aussi je me suis approché en tapinois…

Jean-Pierre, tu lis des ouvrages libres de droit sur une tablette numérique hors de prix alors ton beau-frère peine à survivre d'une activité commerciale prestigieuse dont les derniers perfectionnements de la science risquent de sonner le glas ! N'as-tu pas honte ? Trouves-tu du plaisir à laisser la trace grasse de tes doigts sur un écran plastique alors que le toucher d'un papier vélin, son odeur et la palette de ses teintes t'ont toujours agrémenté, jusque là ?

Il faut vivre avec le temps présent, me dis-tu ; le progrès doit faire fi des sentiments ; la fidélité au passé est un archaïsme intellectuel… Comment, toi qui va bientôt fêter tes quarante ans de vie commune avec ta charmante épouse, peux-tu délaisser une chose que tu as aimée sous le fallacieux prétexte que les nouveaux modèles sont plus performants ?

Je connais tes arguments. Ils ont été remarquablement exposés sur le blog d'un ami : "Est-ce criminel, faute d’avoir un beau papier sous les doigts, de se rabattre sur le format le plus pratique ? C’est vous, éditeurs et libraires, qui avez tué le livre en le réduisant à sa condition de support de texte. Il n’est donc pas étonnant que lorsque ce support est dépassé il soit délaissé. Avec le numérique, c’est sans doute un monde que l’on enterre, celui des bibliothèques Ikéa en agglo remplies de livres de poches, mais c’est une tombe sur laquelle j’irai cracher. Un nouveau monde s’ouvre avec une consommation de masse d’ebook dans laquelle les intermédiaires seront peu à peu supprimés (libraires, éditeurs, Pierre Brillard…), c’est indéniable. Mais parallèlement il y a une demande bibliophile qui reste sur sa faim depuis bien des années. Une demande qu’il faut absolument nourrir avant qu’elle ne s’éteigne. Attention cependant le bibliophile est un gourmet qui ne mange que des beaux papiers ! "

C'est donc à ton attention, pour te remettre dans le droit chemin, et pour endiguer un processus que je crois, malgré tout inexorable chez tous les autres lecteurs que je propose à la vente, aujourd'hui, ce même ouvrage dans une livrée qui me semble plus flatteuse pour son propriétaire. La comparaison sera évidemment à mon avantage !

1 - Les esprits les plus perspicaces constateront d'abord que l'ajout de gravures dans le texte est une avancée technologique que ne possède aucun ebook !
2 - Reconnais aussi que le terme " dibouc " est ridicule à prononcer alors que " ouvrage, livre, exemplaire ou recueil " pose son homme. Pourquoi pas "ichèvre ", pendant qu'on y est ?

3 - Sais-tu, de plus, le désagrément que tu vas causer à notre planète en utilisant des piles qui vont souiller le sol, puis les nappes phréatiques qui fourniront l'eau à tes petits enfants que tu adores ?
4 - Et puis, un ebook ne se prête pas, ne s'échange pas ! Souhaites-tu, en raison de ce pernicieux progrès, perdre les derniers amis qui te restent ? [ta famille te restera néanmoins fidèle, je te le promets, même moi que tu vas traîner dans la plus profonde misère…]

Non, je ne vois vraiment aucun avantage à lire sur une tablette numérique.

Miné par le remords, tu songes déjà à te débarrasser de cet outil de Satan. Avant que de le faire, suivi en cela par de nombreux lecteurs qui nous soutiennent, je te propose de m'échanger ta tablette contre l'excellent ouvrage que je présente ici. Il s'agit d'un cartonnage au plat historié particulièrement flatteur, les cahiers sont bien solides et la gouttière toute recouverte d'or reflétera, telle ton écran lumineux, l'éclat des rayons du soleil. Le livre est un peu plus lourd qu'une tablette, certes, mais jamais un ebook ne pourra caler un meuble aussi bien que ne le fera cet exemplaire…

Ne me remercie pas. C'est normal ! Pierre

WYSS (J.R). Le Robinson suisse ou histoire d'une famille suisse naufragée. Traduit de l'allemand par Frédéric Muller. Tours, Maison Alfred Mame et fils, 1928. Un volume in-4. Cartonnage à plat historié. Percaline polychrome à fond rouge, dos illustré, toutes tranches dorées. 400 pages. Bel état. Vendu

8 commentaires:

sebV a dit…

Confondre lecteur et bibliophile est à mon avis une erreur. Il y a nombre des grands lecteurs qui ne seront jamais bibliophiles et nombre de grands bibliophiles qui ne sont pas des grands lecteur.
La vérité est ailleurs comme dirait l'autre. Je développe un peu plus demain ;-)

Anonyme a dit…

Seb a raison.


Nadia

Pierre a dit…

Seb a raison mais c'était l'occasion de présenter son blog (en cliquant sur le mot souligné) et de faire sourire mon beau-frère... Pierre

sebV a dit…

Et l'occasion de présenter un beau livre par la même occasion ;)
Merci pour la pub !:)

Anonyme a dit…

La tablette c'est parfait pour lire le journal, mais horrible pour lire un livre.
Je partage tout à fait l'opinion de sebV. Je suis lecteur, Il y a encore heureusement des éditeurs qui publient des textes intéressants dans de belles editions, agréables à tenir en mains.
J'aime regarder les beaux livres anciens mais je ne suis pas bibliophile pour autant; j'ai été définitivement guéri par un vendeur de "haute bibliophilie" qui m'a escroqué. C'était ma première et dernière leçon dans ce domaine. En revanche je me régale à la lecture des blogs sur le sujet.
Bravo au nouvel arrivant et félicitations à Pierre et autres Bertrand qui sont très "fair play" en signalant ce nouveau confrère.
Patrick C.

Pierre a dit…

Je rappelle néanmoins que si un lecteur n'est pas forcement bibliophile, nombre de bibliophiles ont été et sont encore de grands lecteurs ! Pierre

Aragorn69 a dit…

Mon Cher Pierre,
Je suis très honoré d'avoir été, pour un instant, le sujet de ton blog, et de t'avoir permis, ce faisant, de décrire ce magnifique exemplaire du Robinson Suisse (j'espère qu'il trouvera preneur), auprès duquel la version de cet ouvrage enregistrée (légalement) sur mon Ipad fait effectivement triste figure. A noter cependant que l'écran de cette tablette est en verre, et non en plastique (tu me diras, avec raison, que cela ne fait pas avancer le débat pour autant...). Je reconnais bien volontiers que la lecture sur l'écran est moins confortable que celle d'un "vrai" livre, et que les doigts font d'avantage de marques "de gras" sur ce support lisse que sur des feuilles de "beau papier" (encore qu'elles s'effacent sans doute moins facilement et font plus de dégâts, si l'on a les doigts vraiment gras, sur ce dernier...), mais en voyage, il est bien pratique de disposer d'une mini-bibliothèque portable. Je me garderai bien d'énumérer par ailleurs tous les services annexes que me fournit cette tablette "à la pomme"(sachant que tu es déjà allergique au simple téléphone portable, mes arguments n'auraient aucune chance de recueillir ton adhésion...). Pour ce qui est de la planète, rassure-toi, il n'y a pas de piles dans un Ipad. Enfin je ne vois aucun inconvénient à prêter (pour un court instant, il ne faut tout de même pas pousser...) ma tablette, pour faire admirer (par exemple)la galerie de photographies de vacances (parmi lesquelles tu figures en bonne place). Le côté "convivial" n'est donc pas forcément gommé par l'utilisation de ce support numérique. Rejoignant l'avis de Seb, distinguons le plaisir de la lecture (que, comme tout plaisir, chacun est libre de "prendre" comme il l'entend), et celui de la bibliophilie, pour lequel tu es un expert éclairé et apprécié.
N'étant donc pas miné par le remords, je ne donnerai malheureusement pas suite à ta proposition d'échange (heureusement, imagine la catastrophe, si tu étais contaminé par le virus informatique!). Jean-Pierre

Pierre a dit…

Sans contestation possible, tes arguments sont recevables, Jean-Pierre. J'aurai toutefois essayé d'abuser ta générosité, sans résultat ;-))

Miné par l'évidence et donc promis à l'enfer du monde moderne , je m'en va ou je m'en vais (les deux se disent) croquer la pomme de la connaissance numérique... Pierre