samedi 29 octobre 2011

Registre des lois d'octobre 1790 à janvier 1791, parfois annoté par son destinataire...

Pour suivre le déroulement de la Révolution française à ses débuts, le mieux est encore d'aller à la source, de feuilleter tranquillement l'ensemble des lois qui ont émaillé cette période et qui répondent, à chaque fois de façon individuelle, à un problème soulevé par la Révolution.


Je vous propose de vous emmener, aujourd'hui, aux derniers mois de 1790, période où le conflit avec le clergé prend toute son ampleur. Le siècle des lumières ne s'était pas contenté de démontrer qu'une Foi immanente était un leurre et aussi qu'elle ne résistait pas aux démonstrations d'une science exacte. Il fallait tuer la bête ! La lecture des nombreuses lois visant à démanteler l'empire financier du clergé rappelle un peu la tâche d'un administrateur les biens face une société (religieuse) en liquidation judiciaire.


Et l'on réalise alors, à la lecture des lois votées par l'assemblée, que la Révolution était autant attachée, en ces périodes, à déshabiller le clergé qu'à habiller la bourgeoisie…On constate aussi que ces mêmes lois visaient à maintenir une autorité sur des provinces qui tenaient à leurs prérogatives. Les régions devaient accepter la formation des départements et l'envoie des agents de l'état nommés en fonction de la nouvelle répartition territoriale.


Tous les historiens sont d'accord sur l'enthousiasme indescriptible qui, à ce moment, anima le peuple tout entier et qui gagna même les ennemis du nouvel ordre de choses. On croyait que la liberté, l'ordre, le progrès, le bonheur dépendaient de la Constitution, et qu'une vie nouvelle allait commencer. On croyait aussi à la sincérité du Roi. Malheureusement, la fédération ne fut qu'une trêve, fort courte, aux hostilités des partis.


Le premier problème sera celui de l'armée et de nombreuses lois vont encadrer son action, vous le lirez. L'armée était travaillée par les deux partis. D'une part, les officiers qui appartenaient à la noblesse et qui ne cachaient pas leur préférence pour l'ancien régime, d'autre part les soldats qui faisaient cause commune avec le peuple et se défiaient de leurs officiers, les accusaient de voler une partie de la solde, les menaçaient et les insultaient. Il en résulta des révoltes jugulées par décret…


Les plus sérieuses difficultés furent causées par la déclaration de la constitution civile du clergé (décrétée en juillet et sanctionnée en décembre 1790). Elle amena dans l’Église un véritable schisme, le pape y ayant refusé son adhésion. Il y eut deux clergés, l'un constitutionnel, l'autre réfractaire. Les évêques et les curés destitués, pour n'avoir pas prêté le "serment de fidélité à la nation, à la loi et au roi", refusèrent de quitter leurs fonctions et d'abandonner leurs diocèses où ils prêchèrent la désobéissance à l'Assemblée et fomentèrent des troubles.


Toutes ces lois n'eurent pas, heureusement, un fondement et des conséquences tragiques. Il fallait déterminer la couleur de notre drapeau, la présentation des boutons de la Garde nationale, tout ceci par décret… Nous avons échappé à quelques lois fort amusantes. Le Mercure national publie en décembre 1790 un article qui propose que désormais tous les citoyens aient recours au seul tutoiement. "Le vous étant à l’origine adressé au seigneur et signifiant : Toi et tes vassaux" !


Je peux vous fournir la liste des 94 lois inscrites dans ce fort volume, si vous le désirez. Je ne le fais pas ici, pour ne pas surcharger ce billet du samedi. L'exemplaire que je vous propose est en très bel état. Il perdrait de sa valeur à être tronçonné ! C'est un document de travail, évidemment, mais la qualité de sa présentation et la multiplicité des vignettes en début de lois raviront aussi les bibliophiles. Je vous présenterai bientôt un volume de la même bibliothèque datant de 1793. Ça rigolera moins… Pierre


REGISTRE DES LOIX. 94 brochures in-4, A Paris de l'Imprimerie nationale. Dernier trimestre 1790. Reliure parchemin. Dos à trois nerfs. Fermeture par lanière. Bel état. Vendu
1- Loi relative aux religieux et religieuses réguliers et séculiers 14/10/1790
3 - Loi pour l'administration des biens des monastères 23/10/1790
6 - Loi relative à la municipalité de la ville de Castres 31/10/1790
7 - Loi relative à la vente du sel 31/10/1790
9 - Loi qui fixe les couleurs des pavillons 31/10/1790
15 - Loi sur le remboursement de la dette 05/11/1790 (sic)
24 - Loi concernant la fabrication des assignats 10/11/1790
29 - Loi relative à la fourniture du tabac aux matelots 17/11/1790
31 - Loi sur la vente des étalons de la nation 19/11/1790
39 - Loi pour l'habillement et l'armement des vainqueurs de la bastille 19/11/1790
48 - Loi sur la tranquillité de la ville d'Avignon 01/12/1790
54 - Loi relative à la création des tribunaux d'Appel 01/12/1790
57 - Loi relative au règlement des pensions du clergé 05/12/1790
58 - Loi relative à la subsistance des orphelins 10/12/1790
75 - Loi sur l'octroi d'argent au ministère de la marine 12/12/1790 (vers les missions d'Amérique)
93 - Loi relative aux boutons de la garde nationale 05/01/1791

8 commentaires:

Pierre a dit…

La première qui m'écrit que j'ai fait une faute à "Loix" avec un "X" ;-)) Pierre

Nadia a dit…

Pourquoi dites vous "la première" ? et non pas "le premier" ?

Serait-ce qu'il n'y a qu'une femme susceptible d'ignorer qu'au XVIIIème siècle, on écrivait "LOIX" ? je vous le dis, ici, les femmes n'ont pas bonne presse !

Unknown a dit…

REMARQUABLE! REMARQUABLE! REMARQUABLE! ...

En aparté, en ce qui concerne le vocable "Loix", cher Pierre, je ne relève même pas votre "mauvais esprit" (sourire)!!!......Je ne me sens nullement concerné(e) !! (sourire à nouveau)! La petite parenthèse est volontaire et il me semble vous avoir exposé ma conception à ce sujet sauf erreur ou omission de ma part!...
Je sais que vous adorez glisser quelques petites fautes d'orthographe par-çi par-là !!!... mais ici, vous avez été parfait!....;-)

Pour en revenir au registre ci-dessus, je ne sais où vous avez "déniché" ce Trésor mais je souligne que c'est un trésor pour ceux qui ne l'auraient pas remarqué !!!...
(Oui, il vous arrive d'être trop modeste Pierre!...)

Il ne me reste, je crois, qu'à vous souhaiter, à vous Pierre, ainsi qu'à tous les lecteurs passionnants et passionnés de ce blog un très agréable dimanche,

Dans l'attente de la présentation de votre volume de 1793,
Bien à vous.

François(e), ;-)

Pierre a dit…

Je ne suis pas intransigeant sur l'orthographe lorsqu'elle est est truffée de chausse-trapes, chères amies, et la correction j'ai mentionnée sur LOIX doit être interprétée ainsi : "La première personne qui m'écrit [....].

Là encore, je m'en sors bien ;-)) Pierre

Anonyme a dit…

AH! Ouf!
J'avais, pourtant, préparé ma reponse depuis un jour...La loi est d'un genre féminin tout à fait respectable, quand aux contrevenants, d'un genre masculin.
Et toc!
Bon Dimanche,
Bien à vous,
Sandrine.

Pierre a dit…

Françoise, vous avez raison d'écrire que cet ouvrage est un trésor : C'est à la fois une accumulation (94 lois) de choses précieuses (pour comprendre notre histoire), soigneusement conservée (ce parchemin a été protecteur tout en étant élégant), et je lui attache une grande valeur (intellectuelle et financière).

Merci d'avoir signalé que je n'avais pas mauvais esprit. C'est simplement que ma pensée dépasse ma rapidité au clavier ;-)) Pierre

syllabe a dit…

En artisan du quotidien, et ce n'est pas rien, votre tablette devrait être classée "soft power" français. De la même manière cela arrivera au pain de Belledonne.

Pierre a dit…

Ça c'est un compliment où je ne m'y connais pas ! Merci d'être indulgent avec le quotidien ;-)) Pierre