mercredi 26 octobre 2011

L'art militaire des anciens par Juste Lipse dans une édition plantinienne de 1602...


Je m'adresse, aujourd'hui, aux latinistes et aux hellénistes distingués qui lisent ce blog, qui sont intéressés par le thème du militaria, qui se sont spécialisés dans l'histoire de l'armée romaine et qui ont un attrait pour la littérature du XVIe siècle... Bon, tout le monde est là ? Je compte : 1,2,3, [….], 12 avec Textor. Le compte est bon !


Je vous présente donc un ouvrage de Juste Lipse ou Joest Lipse (1547-1606). Né à Overijse en 1547, il compte avec Érasme parmi les plus grandes figures de l’humanisme pendant la Renaissance. Michel de Montaigne disait de lui qu’il était certainement un des érudits les plus savants de son époque. Après un cursus scolaire poursuivi successivement à Bruxelles, Ath, Cologne ainsi qu’à l’Université de Louvain, Juste Lipse approfondit sa formation en voyageant en Italie dans l’entourage du cardinal Granvelle. Sa carrière universitaire se partagera ensuite entre l’écriture et l’enseignement. Il a professé dans les villes de Iéna, Leyde et Louvain où il mourut en 1606.


Sensible aux questions spirituelles de son temps, il se tourna vers le protestantisme. Il abjurera publiquement de nombreuses années plus tard et mettra sa plume au service de la défense du catholicisme. Mais ce sont ses ouvrages sur l'armée romaine que je vous présente cette fois-ci, avec trois textes réunis en un seul exemplaire in quarto dans une reliure de l'époque.


Juste Lipse est, en effet, un auteur à succès qui a confié le soin de publier ses livres à la maison des Plantin-Moretus, famille avec laquelle il entretenait des liens d’amitié profonde. Grâce à l’important réseau commercial des imprimeurs anversois, les publications de Lipse se sont vendues dans toute l’Europe et ont ensuite été rapidement traduites dans de nombreuses langues. Pour vous plonger dans l’univers passionnant de l'armée romaine, l'éditeur n'a pas hésité à offrir au lecteur une grande quantité de gravures sur cuivre pour chacun des trois textes, dont un nombre important de planches dépliantes. Sans compter les gravures insérées dans le texte, ce ne sont pas moins de 34 superbes planches hors texte à pleine page ou dépliantes qui sont associées à ce fort volume.


Le premier texte est un commentaire de Polybe, général, homme d'état et historien hellène (-200 / -118 av J.C), dont Lipse cite de larges extraits en grec (avec la traduction latine en face). Il avait été publié la première fois en 1594. Notre édition, comme il est mentionné dans la page de titre est la troisième et date de 1602.


Il est suivi d'un deuxième texte qui est un recueil d'observations de l'auteur sur les 5 livres commentés dans le précédent texte, lui aussi édité en 1602, évidemment.


Le troisième ouvrage est une histoire des machines de guerre dont se servaient les anciens pour l’attaque et la défense des places fortes. Le Poliorceticôn est paru en 1596 pour la première fois. C'est la troisième édition de ce texte qui est proposée par l'éditeur. Elle est datée de 1605.


Je vous laisse admirer les clichés que j'ai fais de quelques gravures de cet ouvrage. Les amateurs d'histoire du livre apprécieront les 3 vignettes de la maison Plantin [Christophe Plantin vers 1520-1589 et son beau-fils Jan Moretus 1543-1610], toutes différentes. Vous noterez que le volume est en parfait état du texte, des gravures et de la reliure. Une infime restauration de la coiffe inférieure vous permettra de chipoter sur son état ;-)) Pierre


LIPSE (Juste). De Militia romana libri quinque - Analecta, sive observationes reliquae ad militiam et hosce libros - Poliorceticon sive de machinis tormentis, telis. Libri quinque, ad historiarum lucem. Editio tertia, correcta & aucta. Antverpiae (Anvers), Ex Officina Plantiniana apud Ioannem Moretum. 3 ouvrages de Juste Lipse sur l'art militaire des anciens en 1 volume in-4. Reliure pleine basane de l'époque, dos à 5 nerfs ornés de motifs dorés entre les nerfs. Titre sur étiquette, tranches colorées.


-De Militia romana libri quinque, commentarius ad Polybium. Editio tertia, aucta variè et castigata. Antverpiae, Ex Officina Plantiniana apud Ioannem Moretum. 1602. [1 f bl], 366pp.


- Analecta sive observationes reliquae ad Militiam et hosce libros, 1602. Antverpiae, Ex Officina Plantiniana apud Ioannem Moretum. [1 f bl], xxix, [2 ff index et privilège]


- Poliorceticon sive de machinis tormentis, telis. Libri quinque, ad historiarum lucem. Editio tertia, correcta & aucta. Antverpiae, Ex Officina Plantiniana, Apud Joannem Moretum, 1605. 219 pp,[2 ff index et privilège], [1 f bl]. Troisième édition corrigée et augmentée, illustrée de 36 gravures sur cuivre dues à Pierre van der Borcht : 25 à pleine page (dont 9 à 2 sujets) et 11 à mi-page.


Comme dans la plupart de ces éditions, le papier est parfois uniformément bruni. Belle édition plantinienne, abondamment illustrée, rassemblant trois textes sur l'armée romaine et les machines de guerre. Bel exemplaire. Vendu

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci pour cet article, Pierre, on ne traite pas assez de Juste Lipse sur les blogs de bibliophilie et on le confond souvent avec Juste Toucourt !!
Pourtant cet humanisme belge est passionnant à lire dans le texte. Et les impressions de Moret ont une belle élégance. En revanche, et je ne sais pas pourquoi, je n'ai quasiment jamais rencontré un Lipse en bonne condition. Le papier est systématiquement jauni. (sauf peut-être mon Admiranda, sive, de magnitudine romana libri quattuor.)

Textor

Pierre a dit…

Comme je l'ai indiqué, une petite proportion de feuilles sont uniformément jaunies, ce qui semble être fréquent chez les fournisseurs de Plantin et Moret. Le papier étant filigrané, il sera possible de retrouver ce fabricant pour lui intenter un procès (en latin).

Je vous avais compté dans mes lecteurs du jour, Textor. Je ne me suis pas trompé ;-)) Pierre

Anonyme a dit…

Je suis toujours là où l'on m'attend ! (A la différence de Bertrand qui est toujours là où on ne l'attend pas !! :))
Critiques sur le papier mise à part, vous avez là un beau livre qui ferait bien dans une bibliothèque seizièmiste.

Textor

Léo Mabmacien a dit…

J'ai eu la chance de pouvoir tourner les pages d'une édition lyonnaise in-folio des oeuvres de Lipse là où je travaille... Les gravures sont une pure merveille ! un livre que j'aimerais avoir.... (sourire)

Pierre a dit…

D'accord avec vous pour les illustrations, Léo. Pour ma part, j'aime beucoup la gravure du "garage à éléphant" ;-))