jeudi 23 juillet 2009

Le coin du vétérinaire. Garsault et les musaraignes.


Des morsures de bêtes venimeuses et de musaraignes.

" Il arrive quelquefois que des serpents, aspics et musaraignes peuvent mordre ou piquer les chevaux dans les pâturages, alors le cheval vient à enfler, le venin court dans les veines et quand il a gagné le cœur, il suffoque le cheval, & cela en deux fois vingt quatre heures. " Garsault (A de) : Le nouveau parfait Maréchal, 1771.


Ce petit rongeur est donc dangereux ! Cette croyance remonte, de façon certaine à l'antiquité. Dans les Hippiatrica romains, Apsyrte et Hippocrate le vétérinaire le mentionne et on retrouve l'information dans le traité de Jean Jourdain ( Le Parfait Cavalier ) daté de 1655.

On retrouve la description de cette affection dans le traité de Solleysel (J de ) , Le Parfait Maréchal, 1713, page 313. " D'abord qu'on aperçoit le mal, si c'est la jambe, il faut mettre les jarretières avec du ruban de fil large d'un pouce, bien lier au dessus de l'endroit, afin que l'enflure ne passe pas outre…".


Le traitement proposé dépendait de la rapidité du palefrenier à se saisir du contrevenant. La dite musaraigne devait être pilée dans un litre de vin et la mixture était administrée au cheval. En traitement local, une friction avec de l'Orvietan et du Thériaque était conseillée…

C'est Philippe-Etienne Lafosse qui fut le premier en 1757 à mettre en doute l'affection et son vecteur. Et c'est vrai que quand on y pense… ( 2000 ans de réflexion quand même ) une ouverture de bouche de musaraigne de 3,4 mm pour une épaisseur de peau de cheval de 6,8 mm alors que l'on a même pas de dard pour injecter le poison permet d'envisager avec sérénité un non-lieu dans n'importe quel Tribunal de Province pourvu d'un expert agrée compétent.


L'ouvrage que je vous présente est une référence tant pour son texte, ses illustrations que par la pertinence, ou non, de ses assertions. Complet de ses planches, il est malheureusement d'un prix prohibitif lorsqu'il passe en salles des ventes. Les confrères peuvent, bien sûr, me l'emprunter pour affiner leurs diagnostics.

GARSAULT (A de ). Le nouveau Maréchal ou la connaissance générale et universelle du cheval, Paris, Bailly, 1771, in 4, 34 – 635pp, 49 planches dont 29 dépliantes, reliure plein veau, pièces de titre et dos ornés de dorures entre les nerfs, tranches marbrées, coins et coiffes usagés. Cahiers solides.

In memoriam : A toutes les musaraignes sacrifiées sur l'autel de l'ignorance… Pierre

2 commentaires:

Jeanmichel a dit…

J'ai eu ce très intéressant livre entre les mains pendant quelques jours, prêté par un client qui s'attendait vraiment à ce que je le lui rende. Bien qu'il l'ait eu trouvé en débarrassant un grenier, il devait en connaître sa "valeur prohibitive".
Mais François Alexandre Pierre de Garsault a également commis un surprenant "Faits des causes célèbres et intéressantes, augmentés de quelques causes", captivant comme un ouvrage de Pierre Bellemare, dans lequel on apprend notamment qu'un homme "écartelé ou tiré à quatre chevaux" subit un supplice beaucoup plus complet que celui que nous laissait entrevoir l'image d'Epinal de nos livres d'histoire, et que les souffrances peuvent durer jusqu'à deux heures.
Tout est envisagé, et cet avertissement vaut le détour :"Il est bon d'avertir que lorsque plusieurs criminels sont condamnés au même supplice, le plus coupable est exécuté le dernier, pour qu'il ait plus d'horreur de la peine qu'il va endurer".
Après ça, les musaraignes, ma foi...

Pierre a dit…

La "martyrologie" est un domaine curieux de la bibliophilie qui donne en général lieu à des ouvrages très bien illustrés.

Je pense en premier à un ouvrage en italien. Ce livre, connu sous le nom de Flos Sanctorum est l’œuvre de Alfonso de Villegas, théologien espagnol du XVIè siècle. Si vous n'êtes pas dégoûté, je vous propose ensuite de découvrir le "Théâtre des Martyrs" de Johann van Luyken. Ces deux livres ont été présentés sur le "blog des bibliophiles" il y a quelques temps.

Alors, là oui ! Une musaraigne écartelée par quatre chevaux, c'est dérisoire. Pierre