"La peinture est pour moi le moyen d'oublier la vie" |
L’esprit de cette démarche se retrouve tout particulièrement
dans ses peintures autour du thème du cirque (clowns, danseuses, écuyères, saltimbanques...)
où il rapproche le grotesque et le tragique. Rouault voit ainsi dans les
contrastes et les ambiguïtés du grand spectacle du cirque comme une allégorie
de l’existence de l’homme, oscillant entre la misère d’un monde sans dieux et
le divertissement vain.
Au début du 20eme siècle, le thème du cirque se substitue
peu à peu aux peintures d’histoire et aux peintures religieuses. Pour Rouault,
il traduit ainsi la misère de la condition humaine dans un monde sans dieux. D'ailleurs,
c'est son maître, Gustave Moreau qui lui disait : " Vous aimez un art grave, et
sobre et, dans son essence, religieux, et tout ce que vous faites sera marqué
de ce sceau.".
En 1917, Ambroise Vollard, l'un des marchands d'art les plus prestigieux de Paris dont j'ai parlé ici (vous pouvez cliquer), propose à Georges Rouault de lui acheter l'ensemble de son atelier, soit 770 œuvres. Le peintre accepte à condition de pouvoir terminer ses œuvres à son rythme. Passionné par l'édition de luxe, Vollard accable Rouault de travail en lui commandant les illustrations de nombreux livres: Réincarnations du Père Ubu, Cirque de l'Étoile filante, Passion, Miserere, Les Fleurs du Mal…
Sexagénaire, Rouault bénéficie d’une certaine sécurité
financière et d’une reconnaissance mondiale. Si Rouault a une vie plus sereine
et stable, il traverse pourtant une nouvelle guerre et connaît les affres d’un
procès avec les héritiers d’Ambroise Vollard décédé accidentellement en 1939.
Dans la solitude de l’atelier, au cours de la 2e guerre mondiale, il se
concentre sur les jeux des lignes, formes et couleurs et termine un grand
nombre d’œuvres importantes. Cette ultime période est la plus éclatante de son
œuvre et son couronnement. Au seuil de la mort, il brûlera 315 de ses œuvres comme pour
nous rappeler qu'il n'y a pas de foi sans humilité… Je vous propose aujourd'hui
un magnifique ouvrage qu'il fit éditer en 1943 sur le thème du divertissement.
Nombreux sont les peintres qui, au début du 20eme siècle, prennent
pour thème de leurs peintures les images colorées du cirque (Picasso, Degas,
Toulouse-Lautrec,...). Si le cirque retient ainsi l’attention des peintres,
c’est qu'il apparaît ainsi comme le lieu par excellence du divertissement. Mais
cette idée de divertissement porte en elle une ambiguïté. Certes le divertissement
nous procure un certain plaisir et nous permet d’oublier, pour un temps, nos
soucis mais il ne produit cet effet qu’en portant notre attention sur le futile… Le cirque est, aujourd'hui, avantageusement remplacé par
l'écran lumineux… Pierre
ROUAULT (Georges). Divertissement. Paris, Tériade pour les
éditions de la revue Verve, 1943. Un volume In-folio. Couverture rempliée gouachée
en deux tons, en feuilles. 75 pages et justification. Tirage limité à 1270 exemplaires,
celui-ci numéroté n° 705 sur vélin d’Arches. Manuscrit entièrement peint au
pinceau par Georges Rouault et gravé par Draeger. 15 héliogravures en couleurs
hors texte contrecollées sur papier légèrement gouaché avec serpentes. Très bel exemplaire. 340 € + port
7 commentaires:
Est-ce de l'édition ou de l'art ? Un tel ouvrage a t-il de l'attrait pour un bibliophile ?
Le type de question que l'on se pose en tapant l'article sur son clavier... Pierre
Bonjour Pierre,
je vois que vous vous poser beaucoup de questions. Il me semble que pour une passionnée comme moi de peintures du 20ème, de fauvisme, expresionnisme, tous les ismes ..., c'est un livre d'Art.
je ne sais pas quel est le critère qu'il faut aujourd'hui pour se dire bibliophile tellment chacun revendique ce titre dès lors qu'il a un peu de livres et de savoirs. C'est un livre de bibliophilie dans la mesure où il est justifié sur Vélin d'Arches, un beau papier. je l'utilise toujours pour les gardes des livres édités par les clubs de bibliophiles, de France ou d'ailleurs.
peint par Rouault et gravé par draeger, d'autres références.
Je ne vois pas pourquoi il n'aurait pas d'attrait. J'en ferait un très joli plein avec un décor à l'oeser dessus, chemise + étui et papier marbré main assorti avec le style de Rouault. je me paierai peut être même le luxe de mettre des gardes en soie assorties au Marbré. Katalin Parry, marbreuse marbre très bien la soie.
Il est dommage qu'on ne fasse plus attention à ces pratiques qui se retrouvent noyées par des gens qui sont incultes en matière de bibliophilie et qui se permettent de descendre la reliure sous le pretexte inexistant de la disparition du papier. Et pis quoi encore!!!
Bien à vous,Cher Pierre,
Sandrine.
AH je ne peux pas corriger les fautes ... Elles sont lègions ... Je me sens fatiguée d'avoir à justifier mon métier.
S.
Un ouvrage si grand mériterait un emboitage, je pense. Une information sur une fiche du même exemplaire indique d'ailleurs que l'ouvrage est présenté dans un emboitage en contreplaqué. Pierre
Si les Cardinaux peuvent se promener un peu entre les deux tours, ils ne manqueront pas d'aller voir les salles Rouault du Musée du Vatican. Peinture très apréciée des Papes, apparemment.
Textor
Rouault était très proche de quelques mystiques de la fin du 19eme tels, Léon Bloy, Huysmans, Maritain, etc... et il a souvent abordé les thèmes religieux. Ceci explique cela. De là à prendre la place du Michel-Ange qui se trouve face à l'urne de vote, c'est pas gagné ;-)) Pierre
j'ai en mémoire un christ peint par Rouault.
S.
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