Je vous ai déjà parlé du Livret des folastries de Pierre de Ronsard, ici (vous pouvez cliquer). Intéressons-nous aujourd'hui à une édition renommée, à son célèbre illustrateur, Aristide Maillol, et à son éditeur, non moins connu, Ambroise Vollard. Cet ouvrage est, comme à l"habitude, à la vente... Quatrième enfant d'un drapier de Banyuls, Aristide Maillol apprend le dessin et la sculpture à Perpignan. En 1882, il monte à Paris. A près quelques années d'études, il expose des paysages méditerranéens, des portraits de jeunes filles, réalise des peintures murales pour des théâtres et des cartons de tapisserie qui plairont à Gauguin.
Au tournant du siècle, Maillol se tourne vers la sculpture,
rencontre sa première protectrice, la princesse Bibesco, et le marchand
Ambroise Vollard. Il sculpte la Femme à la colombe, Jeunesse, Méditerranée, le
Désir, le Cycliste…, devient l'ami de l'écrivain Octave Mirbeau et d'Auguste
Rodin. Il est remarqué par le comte Harry Kessler, banquier allemand qui décide
de consacrer sa fortune à la constitution d'une grande collection d'art, passe
des commandes à Maillol, lui fait visiter Londres et l'emmène, en 1908,
découvrir cette Grèce qui fascine les deux hommes. Il lui ouvre surtout les
portes de l'Allemagne, où, avec ses statues inspirées par la Grèce antique, le
Catalan devient une vedette des beaux-arts outre Rhin.
S'il passe le plus clair de son temps entre Marly-le-Roi et
Banyuls, où il possède une maison, il expose également aux Etats-Unis, en
Angleterre. Mais c'est encore en Allemagne qu'il est le plus célèbre. Derrière
ce succès, il y a toujours Kessler. Libéral en politique et antinazi. Le comte
quitte le pays quand Hitler prend le pouvoir à Berlin. Maillol reste néanmoins
admiré en Allemagne, d'autant que les esthètes du Reich, Arno Brecker et Albert
Speer, par exemple, lui sont acquis.
Quel fut l'avis du patriarche barbu sur le régime nazi ? Dans ses nombreuses interviews, Dina Vierny l'explique : c'était un germanophile : tout cela n'en fait pas un
collaborateur. Il n'a d'ailleurs pas été inquiété à la libération de Banyuls,
en août 1944. Mais cela n'en fait pas non plus un résistant. En revanche, cette
proximité avec l'occupant a suffisamment énervé pour qu'il n'y ait pas plus
d'une dizaine de personnes derrière le corbillard du sculpteur, après sa mort
en 1944...
Né en 1866, Ambroise Vollard ouvre sa première
"boutique" rue Laffitte en septembre 1893, à Paris, à côté du célèbre
hôtel Drouot qu'il agrandira en 1895. L'année d'après, il déménage au 6, rue
Laffitte qui deviendra, jusqu'en 1924, la célèbre galerie Vollard avec sa
fameuse "cave" que bon nombre d'artistes et d'intellectuels viendront
fréquenter régulièrement. Le percement final du boulevard d'Haussmann le force
à déménager et il s'installera au 28, rue Martignac qu'il ne quittera plus.
Vollard a une réputation encore controversée dans le milieu
des historiens d'art. Génie pour les uns, profiteur pour les autres, il n'en
reste pas moins qu'il se démarque rapidement des autres marchands de la fin du
XIXème siècle à Paris. Il aura surtout l'intuition d'acheter la totalité des
œuvres des artistes non reconnus à l'époque comme Gauguin, dont il publie les
œuvres en 1894, Cézanne qu'il expose pour la première fois en 1895 à l'âge de
56 ans ou Picasso qu'il expose pour la première fois en France en 1901 alors
qu'il n'a que 20 ans.
Très rapidement, le nom de Vollard devient incontournable à Paris, et, fatalement, la légende autour du personnage se constitue. Son indolence, par exemple, est notoire, lorsqu'il accueille ses clients, ne répondant que partiellement aux questions qu'on lui posait ou, somnolant presque effrontément alors que l'acheteur risquait de s'en aller…
Une des facettes méconnues d'Ambroise Vollard est son intérêt pour l'édition. Toute sa vie durant, il publiera des ouvrages dont il commandera les
illustrations à des artistes d'avant-garde comme Pierre Bonnard , Emile Bernard, Aristide Maillol, Pablo
Picasso, Marc Chagall, Georges Rouault et bien d'autres. Pour cela, Vollard est
considéré comme un des acteurs principaux de la renaissance du livre d'art au
XXème siècle...
Je vous propose, aujourd'hui, le seul ouvrage illustré par
Aristide Maillol en pointes-sèches imprimé à l'eau-forte. Ce livre parut en
1938, d'après la page de garde, ou en 1939, d'après la couverture. Maillol
réalisa, pour cette édition, 43 planches sur plaques de zinc rayées après
tirage. Il s'agit aussi du dernier ouvrage édité par Ambroise Vollard qui
allait se tuer dans un accident de voiture quelques semaines après la
publication… Pierre
RONSARD (Pierre de) & MAILLOL (Aristide). Livret de
folastries. Editions Ambroise Vollard, Paris, 1939. Un volume petit in-4 (245 x
195 mm) en feuilles sous couverture illustrée à rabats. 43 gravures originales
d'Aristide Maillol. Une vignette de couverture, frontispice, une vignette de
titre, 15 gravures en hors-texte et 27 dans le texte. Table des gravures et
colophon illustré d'une vignette. Tirage à 230 exemplaires, celui-ci un des 170
numérotés sur vélin vergé de Montval au filigrane dessiné par Maillol n°67.
Imprimeurs : Henri Jourde pour le texte et Roger Lacourière pour les gravures.
Exemplaire en bel état, une petite brunissure au deuxième plat, en face
d'un défaut de papier cristal, dos légèrement bruni, cristal jauni. 1200
€ + port
1 commentaire:
Le Musée Maillol est situé au 61 de la rue de Grenelle dans le VIIe arrondissement de Paris.
Créé en 1995 par Dina Vierny, la muse du sculpteur Aristide Maillol, il présente de nombreuses œuvres de Maillol, ainsi qu'une importante collection d'art moderne du XXe siècle (peinture, sculpture et dessin).
Une bonne adresse. Pierre
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