Je n’ose faire de projets, surtout en ce qui concerne
l'avenir…
Avec précaution, les deux techniciennes responsables de l’appareil
de radiothérapie ont posé, une dernière fois, le masque sur mon visage et l’ont
enlevé quelques minutes plus tard, laissant sur ma peau un quadrillage en nid d’abeilles
révélateur de la pression nécessaire à la contention du crâne. Une multitude de
pensées se sont entrechoquées, dans ma tête, pendant cette séance. On pourrait
même parler de mouvement brownien tant le résultat de cette réflexion me semble
complètement nul ! J’étais à la fois délivré d’une contrainte et paniqué à
l’idée que la guérison ne dépendait plus, dorénavant, que de moi et d’une
chimiothérapie aux résultats aléatoires.
Je bénéficie donc, à partir de ce jour, de quatre semaines de repos
thérapeutique qui seront aussi quatre semaines de repos et d’apaisement si j’arrive
à maîtriser intelligemment ce temps libre qui m’est offert. J’ai essayé, pendant
ces 30 séances de radiothérapie, d’arracher un sourire à ceux qui liront
éventuellement ces billets, plus tard. J’avais besoin d’être
rassuré et, charité bien ordonnée commençant par soi-même, j’ai commencé par me
rassurer moi-même en puisant l’énergie nécessaire pour faire face à la maladie dans
la réflexion de mes maîtres. Bien évidemment, l’expérience des uns ne sert pas nécessairement
aux autres et la mienne est bien modeste…
A la fin de cette séance, une des deux jeunes femmes avec
qui je croisai un regard me dit : " Bon rétablissement ! " C’est exactement la
phrase que je voulais entendre ; pas plus ! Je lui redonnai alors mon badge de
membre privilégié en poussant la porte de la salle de traitement vers la sortie. Ce chemin
vers la guérison devrait m’amener, en théorie, vers l’amélioration de mon état physique , me permettre
de retrouver tout ou partie de mon autonomie en sachant que les six mois de
chimiothérapie qui vont suivre vont éventuellement reporter cette échéance.
Avant d’aller retrouver, pour une quinzaine de jours, la
Bretagne où j’ai encore un peu de mes racines, je vais utiliser le réseau de
notre gare routière tarasconnaise pour aller visiter quelques musées aux
alentours. J’irai aussi flâner dans les rues en pensant à l’avenir. Tout
finit toujours par un projet, n'est-ce pas ?
Pierre
6 commentaires:
J'adore ce billet que l'on sent empreint de plein d'émotions : le plaisir d'en avoir fini avec cette première étape, mais aussi la peur de se lâcher, tout seul, vers cette autre chose qu'on appelle l'inconnu.
La Bretagne va forcément vous rendre des forces ! pensez à nous en vous goinfrant de galettes... mais surtout, pensez à vous.
Un peu de peur, en effet. Reste à savoir si cela est sensé... Pierre
tu as passé une étape : maintenant tu es un homme de radio ! - et bientôt le doctorat de chimio ?
Ou Pierre Brillard, le nouveau Jules Verne, le tour du monde en 30 jours, quelle aventure. Bon séjour en Bretagne.
Daniel B.
J'ai fait aujourd'hui mon premier voyage en autonomie totale. Suivant en cela les conseils du Guide du routard, j'ai pris le bus pour visiter Arles. Un "Nouveau Monde" s'est alors ouvert à moi ; une société cosmopolite, une jeunesse au look calibré, une vieillesse guère souriante, une primatiale méconnue, des rampes d'escalier absentes et une capacité d'anticipation à améliorer…
Je suis comme un nouveau-né qui découvre son environnement : à la fois émerveillé par la vie et, en même temps, encore inadapté à son rythme.
Pierre
Beau billet Pierre, Arles est parfait pour un premier voyage en autonomie, bon rétablissement !
Léo
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